Colloque international « Formes narratives et supports médiatiques », 20-23 octobre 2021, Université de Lausanne (annonce de colloque)

Cet événement se déroulera en deux volets. La première partie « Impact de la sérialité sur le récit audiovisuel », organisée par Alain Boillat et Valentine Robert, se tiendra à l’UNIL du 20 au 21 octobre 2021. La deuxième partie « Transferts, reconfigurations et transition numérique dans la bande dessinée », organisée par Rahaël Baroni, Olivier Stucky et Gaëlle Kovaliv, se tiendra à l’UNIL du 21 au 23 octobre.

Impact de la sérialité sur le récit audiovisuel (20-21 octobre)

Le premier volet entend interroger la manière dont les pratiques sérielles contribuent à déterminer et façonner le récit cinématographique et télévisuel, notamment en matière de tension narrative, de temporalité, de point de vue et de construction des personnages. Les principes de segmentation (en volets, épisodes, chapitres, saisons), de répétition/variation et d’amplification (potentiellement infinie) seront au cœur des analyses proposées, ainsi que le rapport au spectateur/ à la spectatrice induit par les différents modes de consommation de ces productions, tant au niveau du support ou canal (DVD, streaming, VOD, etc.) qu’à celui du dispositif (salle de cinéma, salon domestique, écran personnel, etc.) ou de la temporalité (visionnement régulier à horaires fixes, visionnement continu, durée de l’attente jusqu’au volet ou à la saison suivante, etc.). En définissant la série comme la reprise d’une même diégèse (ou de certaines composantes diégétiques) dans des productions filmiques distinctes, ce colloque entend décloisonner les approches de la sérialité en envisageant les phénomènes de manière croisée (voire comparée) par la prise en compte conjointe des domaines cinématographique et télévisuel, et ce dans une perspective d’histoire des discours et des pratiques. Information et programme sur cette page.

Transferts, reconfigurations et transition numérique dans la bande dessinée (21-23 octobre)

Le second volet du colloque, mêlant communications scientifiques et tables rondes, vise à interroger l’interdépendance entre les supports médiatiques et les formes narratives qui s’y déploient dans le cadre particulier de la bande dessinée. L’une des spécificités de ce médium est justement de se définir par la projection d’une séquence d’images sur la surface qui lui tient lieu de support, ce qui explique cette focale particulière. Les questionnements diversifiés qui composent le programme de ces trois journées, tant du point de vue des approches, des méthodes que des objets convoqués, s’inscrivent dans des enjeux particulièrement contemporains. En effet, la problématique de l’évolution de l’identité culturelle de la bande dessinée en lien avec l’émergence des technologies numériques, est très actuelle, car celle-ci semble avoir modifié en profondeur les modes de production, de diffusion et de consommation des récits graphiques. En raison du contexte sanitaire, l’accès physique aux conférence est restreint aux détenteurs d’un certificat COVID. Néanmoins, les conférences seront retransmises à distance sur Zoom, sur inscription. De même, afin de garantir la fluidité de l’organisation et le respect des limitations d’occupation de la salle, il est nécessaire de s’inscrire. Informations, inscription et programme sur cette page.

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Narratologie dans l’antiquité grecque

Par Raphaël Baroni

Mimesis et diegesis

Platon et Aristote se sont penchés l’un comme l’autre l’existence de différents modes de représentation d’une histoire, dessinant les contours d’un débat qui demeure encore, dans ses grandes lignes, celui de la narratologie transmédiale. Le premier déploie sa condamnation de la mimèsis dans un ouvrage visant à définir les contours d’une république idéale, tandis que le second s’attache à élaborer une poétique plaçant les genres dramatiques au cœur de sa réflexion. Cette différence de cadrage, à la fois poétique et politique, apparaît fondamentale pour comprendre la théorisation des formes narratives dans l’antiquité grecque, dans la mesure où les questions formelles sont indissociables de leur portée éducative, éthique ou esthétique.

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Narratologie médiévale

Par Alain Corbellari

Ce qui, dans la culture du Moyen Âge occidental, ressortit à ce que l’on peut appeler des réflexions d’ordre narratologique s’articule selon trois axes :

  1. il y a d’abord les considérations explicites que l’on peut tirer des arts poétiques latins des XIIe et XIIIe siècles ;
  2. il y a ensuite les idées, essentiellement implicites, que l’on peut déduire de la lecture des œuvres vernaculaires, en particulier françaises, de la même époque ;
  3. il y a enfin tous les commentaires (des razos de troubadours au De vulgari eloquentia de Dante) consacrés à la poésie des troubadours. Bien que centrés sur la poésie lyrique, ces commentaires, qui se développent en genre autonome à partir du XIIIe siècle, n’en développent pas moins, incidemment, d’intéressantes considérations sur le rapport de la vie à l’œuvre en développant le potentiel narratif de la poésie troubadouresque.

Le troisième axe étant cependant quelque peu périphérique par rapport à notre objet (on renverra à ce propos au livre de Michel Zink, Les troubadours une historie poétique), c’est sur les deux premiers que l’on se concentrera ici.

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L’héritage de Ricoeur (annonce de parution)

Ce numéro double revient sur l’héritage de Ricoeur, en particulier sur la manière dont la trilogie Temps et récit (1983-1985) est venue renouveler la manière d’envisager les rapports entre la mise en intrigue et l’expérience humaine, le rapport au temps et la construction identitaire. A bien des égards, Temps et récit peut ainsi être considéré comme un point de jonction entre la narratologie classique et postclassique ainsi qu’entre la théorie du récit et les études narratives.

Ce dossier est publié de manière coordonnée dans les Cahiers de narratologie et dans la revue Poetics Today. Il réunit les contributions de Raphaël Baroni, Claude Calame, Marco Caracciolo, Philippe Carrard, Jonas Grethlein, Stéphane Lojkine, Adrien Paschoud, Marie Vanoost et Ioana Vultur.

Cahiers de narratologie: https://doi.org/10.4000/narratologie.11864

Poetics Today: https://read.dukeupress.edu/poetics-today/issue/42/3

Narratologie vidéoludique / Narratology of Videogames

Par Marc Marti

La narratologie vidéoludique se situe au carrefour de deux champs d’études, d’une part les game studies et de l’autre la narratologie. L’état de la question doit donc prendre en compte ces deux champs et les approches qui s’y développent concernant la narrativité, qui reste une question étroitement liée aux évolutions techniques et aux pratiques des joueurs. Pour les narratologues, le récit est un élément inhérent aux univers et aux pratiques vidéoludiques telles que les étudie la ludologie dans le cadre des game studies. Cette position de principe n’est pas nouvelle et elle s’intègre à des réflexions déjà avancées dans les deux domaines (Ryan 2007 ; Rueff 2008 ; Marti 2012 ; 2014 ; Zabban 2012 ; Barnabé 2014). Selon cette perspective, quelle que soit sa forme, le jeu vidéo reste fondamentalement une expérience temporelle, à la fois simulacre et simulation, et peut, à ce titre, s’articuler sur un « mode narratif » (Ricœur 1983 : 85).

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Théorie du déplacement déictique / Deictic Shift Theory

Par Mary Galbraith

À la mémoire de Janyce M. Wiebe, traduit de l’anglais par Sylvie Patron

Deixis (dont l’adjectif correspondant est déictique) est le terme sémiotique utilisé pour renvoyer à un ensemble d’indices personnels, temporels et spatiaux spécifiques (voir Bühler 2009 [1934, 1999], 262-347). Le centre déictique, appelé « origo » chez Karl Bühler, coïncide a priori avec notre propre vécu corporel, inséré dans le temps et l’espace réels. Cependant, à travers des processus psychologiques comme l’identification et la mimèsis, nous avons également la possibilité d’entrer dans la réalité d’êtres imaginaires, dans des espaces et des temps imaginaires, en nous appuyant sur les indices apportés par le texte fictionnel. L’étude de la façon dont les lecteurs déplacent leur centre déictique de la situation spatio-temporelle et personnelle dans laquelle ils se trouvent vers la situation spatio-temporelle et personnelle imaginaire du texte fictionnel constitue la tâche d’investigation prioritaire de la théorie du déplacement déictique.

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Débattre d’une fiction (annonce de parution)

L’interrogation qui préside au nouveau numéro de Fabula-Littérature Histoire Théorie est aussi simple qu’abrupte : que faisons-nous avec les fictions et aux fictions elles-mêmes lorsque nous débattons d’elles ?

Chimène pouvait-elle épouser Le Cid ? La Princesse de Clèves a-t-elle bien fait d’avouer à son mari qu’elle était aimée d’un autre homme ? Pourquoi Cendrillon ne s’est-elle pas rebellée plus tôt ? Meursault était-il raciste ? Hercule Poirot a-t-il commis une erreur sur l’identité du meurtrier ? Les Lannister devaient-ils absoudre Ned Stark ? Don José pouvait-il épargner Carmen ? Néo aurait-il dû se soumettre à la prophétie de l’Oracle ? Peut-on accepter d’entrer dans les raisons de Humbert Humbert et faut-il faire lire Lolita aux adolescent.e.s d’aujourd’hui ? Horace devait-il s’abstenir du meurtre de Camille ? Fallait-il vraiment que Dumbledore cache la vérité sur le destin d’Harry ? Manon a-t-elle sincèrement aimé Des Grieux, et le récit du chevalier est-il toujours bien honnête ? Faut-il blâmer Charles de la mort d’Emma ?

De quelle nature sont nos jugements sur les fictions ? À quelles opérations se livre-t-on pour simplement en parler et très régulièrement en débattre ? Car la fiction n’est pas seulement l’objet d’une expérience individuelle vouée à rester silencieuse : elle est aussi ce dont on parle avec d’autres lecteur.trice.s ou spectateur.trice.s, ce qu’on partage à condition d’en débattre, de confronter des opinions et de soumettre un jugement à la discussion. Mais de quoi discourt-on au juste lorsqu’on s’interroge sur la conduite d’un être de papier, qu’on débat d’une situation fictive ou qu’on revient sur un dénouement arbitraire ? Dans nos échanges les plus quotidiens sur les fictions, peut-on seulement départager les propositions qui portent sur l’œuvre de celles qui portent sur le monde fictif, et les jugements sur la situation fictionnelle des jugements sur le monde réel ? Si le débat s’accompagne toujours d’une intervention sur la fiction, quels sont les enjeux éthiques ou politiques d’une telle ingérence ?

Les multiples querelles et controverses dont les fictions ont fait l’objet en Occident ont été largement étudiées par l’histoire littéraire, notamment en ce qu’elles nous instruisent sur les représentations du monde réel et les pratiques esthétiques à travers le temps. Le débat sur la fiction mérite toutefois d’être constitué comme objet théorique.

URL: https://www.fabula.org/lht/25/

Cohabiter la fiction (annonce de parution)

On affirme souvent que les interprétations « savantes » des récits littéraires sont celles qui prennent leurs distances avec certains phénomènes relatifs à la pratique « ordinaire » de la lecture tels que l’implication affective dans l’histoire ou une forme de croyance en l’existence des personnages. Si des voix contraires s’élèvent depuis plusieurs années, cette position reste, implicitement ou explicitement, dominante dans les départements de littérature et les programmes de l’école publique.

Le présent essai fait l’hypothèse que la distinction entre lecture « ordinaire » et lecture « savante » est largement caduque, parce qu’aucun discours porté sur une fiction ne peut s’empêcher de proposer une version alternative du monde raconté, version à laquelle il fait semblant de croire. Cela revient à affirmer que chaque interprète se situe discursivement dans une position comparable à celle des personnages, non pas en habitant directement la fiction, mais, indirectement, en la cohabitant.

Aurélien Maignant, Cohabiter la fiction. Lecture ordinaire, univers de croyances et interprétation des mondes littéraires, Lausanne, Archipel Essais, vol. 28, 2020, 144 p.

Fabula propose de lire un extrait de cet ouvrage ainsi que la postface rédigée par Marc Escola, URL: https://www.fabula.org/actualites/a-maignant-cohabiter-la-fiction-lecture-ordinaire-univers-de-croyances-et-interpretation-des-mondes_99536.php

La marquise sortit à cinq heure (annonce de parution)

Marc Escola propose dans l’atelier de théorie littéraire de Fabula une fabuleuse anthologie de textes évoquant cette fameuse marquise et ses activités à lheure du thé (ou de l’apéro). Ce texte fascinant nous permet de réfléchir sur la place occupée par l’arbitraire et la contingence dans la fiction. Un texte à ne manquer sous aucun prétexte, pour constater qu’en effet, « une marquise et une pendule hantent depuis près d’un siècle la théorie du récit et l’histoire du roman ».

URL: https://www.fabula.org/atelier.php?La_marquise_sortit_a_cinq_heures%2E_Une_anthologie

Rythme / Rhythm

Par Jan Baetens

L’analyse temporelle du récit aborde généralement trois domaines: ordre, fréquence et durée (Genette 1972). Souvent pensée en termes de vitesse, l’analyse de la durée se donne pour but de décrire le rythme du récit. Elle regroupe un certain nombre de questions, tantôt formelles et tantôt thématiques, que Kathryn Hume énumère ainsi : a) descriptions en prose de vitesse physique, b) retardement narratif, c) le calcul du temps diégétique par page, d) les réflexions fictionnelles sur la vitesse comme donnée culturelle (Hume 2005 : 105).

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