Narration à la sixième personne

Par Gilles Merminod

Si l’usage narratologique a consacré les expressions « récit à la première personne » et « récit à la troisième personne », la notion de récit à la sixième personne ne se rencontre guère dans les ouvrages théoriques. Il existe bien, en langue anglaise,  quelques travaux qui emploient l’expression « they-narratives » pour décrire certains récits d’expérience collective (Richardson 2015 ; Fludernik 2017 ; Alber 2018). Il reste néanmoins que la sixième personne se présente comme le parent pauvre de la narratologie, loin derrière les deuxième et même quatrième personnes. Pourquoi ? Serait-ce parce que la sixième personne n’est qu’une variation en nombre de la troisième et qu’au contraire des récits à la deuxième ou à la cinquième personnes, elle paraît, somme toute, assez naturelle ? Peut-être, mais ce serait négliger les enjeux qu’il y a à dépeindre avec constance ce que c’est que d’agir et de penser collectivement.

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Narration à la première personne

Par Gilles Philippe

L’usage commun nomme récit à la première personne une fiction dont le narrateur est aussi le protagoniste; le je y relate tout ou partie de sa propre histoire. Par extension, la catégorie s’emploie parfois pour désigner un récit dont le narrateur n’est ni le protagoniste ni même un des acteurs, mais qui rapporte les événements comme témoin ou conteur de première ou de seconde main. Rappelons pour mémoire que, dans Figures III (1972), Gérard Genette avait posé une distinction à laquelle certains se réfèrent encore: est dit hétérodiégiétique un narrateur qui ne s’attribue aucun rôle dans le récit (tout en restant susceptible d’y apparaître, au moins par métalepse), homodiégétique un narrateur qui appartient aussi au monde du récit; si, dans ce second cas, il est de surcroît le protagoniste, l’étiquette peut alors se préciser en autodiégétique.

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