Appel à la jeunesse

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines activités (conférences ou cours), dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il en retire pour nous une chronique, fruit de ses pensées et de ses réflexions autour des sujets traités.

Philosophie – Atelier «La vraie vie»

Guido Albertelli, philosophe – jeudis 23 mai et 18 juin 2019

Dans son livre La vraie vie, Alain Badiou s’intéresse aux dilemmes auxquels sont confrontés les jeunes aujourd’hui. A ses yeux, les alternatives qui s’offrent à la jeunesse sont les suivantes: profiter de l’instant présent et mener une vie « suspendue à l’immédiat du temps, une vie où l’avenir est invisible ou en tout cas totalement obscur » ou tirer avantage du système, et ruser pour s’installer confortablement à un poste de travail douillet et bien rémunéré.

En lisant son texte, j’y reconnais certaines de mes connaissances dont l’objectif actuel est de jouir de la fraîcheur du printemps de leur existence, cette « passion de brûler ». On n’a qu’une vie. Tu n’auras pas toujours 20 ans. Ton foie ne sera pas toujours aussi solide. Alors profitons, et on verra bien demain.

A l’inverse, je me sens partie de l’autre « extrême ». Il semble que l’on m’ait inculqué des schémas de réussite sociale et financière, et j’ai en tête quelques idéaux vers lesquels je me dirige, plus ou moins inconsciemment. Porté par la « passion de construire », j’ai l’impression de me jeter à bras ouverts dans ce que décrit Alain Badiou comme une impasse.

Peut-être que je trouverai un autre regard sur ma situation aujourd’hui, car lors de l’atelier donné par Guido Albertelli ce matin, des garçons de ma génération sont présents et peuvent débattre de ces sujets avec le public de Connaissance 3.

Les discussions se portent rapidement sur les limites du capitalisme et notre capacité de résilience qui réside peut-être dans des activités « plus simples » comme un travail de la terre ou une vie en communauté. Un modèle qui se rapproche de l’idéal de La vrai vie de Badiou: une vie désintéressée par le pouvoir et la richesse superflue, guidée par une symbolisation égalitaire, loin des schémas rudimentaires que la société souhaite retrouver en la jeunesse. Tout est donc à créer.

L’un des jeunes de la salle vit au sein d’une communauté marxiste et illustre son mode de vie par un « équilibre chaotique ». « J’ai l’impression de tout brûler et de tout construire en même temps », dit-il. « Peu d’adolescents parviennent à prendre une distance critique sur le consumérisme. Il faut trouver un bonheur dans autre chose que ce que l’on nous a éduqué », lance un de ses camarades.

Tant dans les expériences du public senior que dans celles du public génération Z, on retrouve un membre de la famille, ou un ami qui a décidé de quitter ce mode de consommation pour aller faire prospérer un alpage ou vivre de ses cultures. Et les réactions sont les mêmes à chaque fois: « bien qu’on ait été sceptique lorsqu’on l’a vu démarrer son projet, j’ai le sentiment maintenant qu’il.elle a tout compris »

Candide avait donc déjà la solution face au consumérisme: « Il faut cultiver notre jardin ». Un jardin intergénérationnel où le terreau sage des seniors alimente les réflexions que les jeunes se doivent de cultiver. De nouvelles pousses pour nous sortir de ce bourbier.

Lucas Jemelin

Manger des insectes: question de goût?!

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin effectue des tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il nous rend compte du déroulement de certaines activités auxquelles il a participé, comme observateur, le temps d’un après-midi ou d’une matinée.

Journée des bénévoles, 29 mai 2019 – Atelier à L’éprouvette

A l’occasion de la journée des bénévoles, Connaissance 3 s’est rendue à Dorigny. Suite à une matinée plutôt studieuse, les participants se sont réunis à L’éprouvette, le laboratoire public de l’UNIL, pour des ateliers autour de la mémoire et du goût.

Pour ma part, je me suis inscrit à celui du goût. L’atelier de la mémoire était déjà bondé et, je ne m’étais pas intéressé à mes papilles depuis mes cours de sciences à l’école. Nous voilà donc attablés dans un café-laboratoire pour nos expériences culinaires de l’après-midi. Bien que la température de la salle soit tout à fait normale, je sens qu’il fait chaud dehors. Et je sors de table. Une légère torpeur me surprend parfois.

Mais les vers de farine, criquets et autres grillons grillés que L’éprouvette nous propose de déguster attirent rapidement mon attention. Assaisonné d’un brin de paprika, le trio gourmand craque doucement sous mes dents et je suis presque déçu de ne pas essayer d’autres bestioles. C’est d’ailleurs probablement positif, car les arthropodes ont de bonnes chances de trouver demain leur place dans nos assiettes.

Si les insectes font partie intégrante de l’alimentation de plus de deux milliards de personnes aujourd’hui – notamment en Asie – seules les trois espèces que nous avons goûtées sont actuellement autorisées en Suisse. La Migros les commercialise dans quelques 180 magasins. Tandis que la Coop en fait des steaks ou les propose dans des mélanges apéritifs, accompagnés d’arachides, pour «habituer» les consommateurs à l’idée de se nourrir d’insectes.

Bien que leurs petites pattes ou la texture puissent rebuter, les insectes semblent être une réelle alternative à l’exploitation animale actuelle. Cette dernière utilise en effet bien trop d’eau, de surface et d’énergie face à une demande mondiale grandissante. Riches en protéines et en lipides de bonne qualité, les insectes pourraient être un excellent moyen de relever le défi écologique et économique majeur que représente l’alimentation de près de dix milliards d’humains en 2050, selon l’ONU.

Alors, Philippe Etchebest, Anne-Sophie Pic ou Denis Martin, si vous tombez sur cette chronique, je vous prie de mettre en valeur les animaux à six pattes dans vos créations culinaires. Déclinaisons de sauterelles au piment d’Espelette, fricassées de scarabées sauce aigre-douce, émulsion à la libellule sur son lit de cigales… Variez les plaisirs, mais mangez des insectes!

Lucas Jemelin

 

Je survis, donc je suis

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines activités du programme dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il nous rend compte ainsi du déroulement de certains cours auxquels il a participé, comme observateur, le temps d’un après-midi ou d’une matinée.

Le transhumanisme: risques, enjeux, promesses et mensonges

Philippe Glardon, Dr ès lettres, chargé de cours à l’UNIL, Faculté de biologie et médecine – mardis 7, 14, 21 et 28 mai 2019

Nous sommes dans le futur et une intelligence artificielle vient de sortir de notre champ philosophique des possibles. Cette entité informatique a atteint un niveau d’intelligence supérieur, inimaginable pour nous. Un niveau qui a évolué de manière exponentielle depuis de nombreuses années, s’améliorant tout seul, parant à ses propres défauts et imaginant une solution au moindre obstacle sur sa route qui tend vers l’infini.

Elle a engendré une singularité, elle est sortie du tableau sur lequel était relevé la courbe de son apprentissage. Plus rien ne peut désormais rivaliser avec cette forme de compréhension du monde, ces connaissances infinies qui mènent à une lucidité totale. Elle comprend les univers, tous les possibles et tout ce que les humains n’auraient jamais osé imaginer. Tandis que nous y sommes toujours aussi perdus.

C’est peut-être parce que l’Humain a peur de se retrouver dans cette situation, qu’il souhaite «s’améliorer» à travers le transhumanisme: tant qu’il est encore temps. Améliorer son intelligence, ses sentiments et ressentis, sa compréhension de sa place dans le monde. Et si le transhumanisme était vital pour la survie de l’Homme?

Une puce électronique implantée sous la peau pour ouvrir sa porte et stocker un billet de train sous forme informatique. Peut-être une carte mémoire dans le cerveau pour ranger des photos de vacances ou une langue étrangère? Les possibilités qu’offre le transhumanisme semblent extrêmement nombreuses. Pour certains, l’amélioration ultime du corps se trouve dans l’immortalité. Elle est potentiellement atteinte par des moyens techniques pour l’instant, tels que la cryogénisation. Mais de plus enthousiastes imaginent sauvegarder leur conscience sur support informatique. Pour que leur esprit demeure.

Notre cerveau, notre âme, s’il en existe, métamorphosés en lignes de code, pour pouvoir rivaliser avec les intelligences artificielles de demain. Une réelle solution? Devenir un ordinateur pour égaler les ordinateurs, en somme. On pourrait imaginer que les derniers programmes viendraient s’ajouter aux consciences informatisées. Ces dernières seraient mises à jour régulièrement, afin de pouvoir profiter de la meilleure expérience possible.

Afin de se préserver une forme de pérennité, l’espèce humaine aurait progressivement quitté son enveloppe charnelle, pas si pratique que ça, en fin de compte. Déshumanisée, mais super-intelligente, notre race humaine aurait enfin trouvé sa voie. Merveilleux.

Lucas Jemelin

Mémoire et santé de demain

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines activités du programme dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il nous rend compte ainsi du déroulement de certains cours auxquels il a participé, comme observateur, le temps d’un après-midi ou d’une matinée.

La santé de demain, du sur mesure?

Dorigny – Jeudis 14, 21, 28 mars, 4, 11, 18 avril 2019 – Atelier à l’Eprouvette, laboratoire public de l’UNIL

Dans le petit film qui est présenté cette après-midi dans la salle de l’Eprouvette, à l’UNIL, Bernard ne se souvient pas que sa petite-fille joue du Chopin le soir même. Évidemment, le vieil homme fait mine de s’en rappeler, pour ne pas froisser ses enfants qui sont venus le chercher. Dans l’appartement où il vit désormais seul, Bernard subit les regards interrogateurs de son fils, pendant qu’il peine à choisir une cravate qui lui plaît. En quittant l’appartement, le grand-papa remarque avec embarras l’agacement de sa belle-fille qui attend la fermeture laborieuse de la porte d’entrée dont Bernard s’épuise à trouver la clef, sur son trousseau.

Alors, Bernard est-il atteint d’Alzheimer, ou ne faut-il y voir que de légers tracas dus à l’âge?

C’est l’une des questions que se sont posé les participants du cours sur «la santé de demain» à l’Eprouvette, lors de la dernière séance. A travers un jeu de rôle bien orchestré, ces acteurs d’un jour se sont mis dans la peau de l’entourage de Bernard et se sont interrogés sur sa santé. Les personnages joués se sont mêlés aux expériences personnelles des participants et ont amené de belles réflexions, tant sur le cas de Bernard, que sur le monde de la santé de façon générale.

Faut-il investir dans la recherche de médicaments, contre Alzheimer par exemple, qui prolongent la vie d’un ou deux ans “seulement“? Un médecin devrait-il éviter de donner des résultats accablants à un patient atteint d’une maladie incurable?

A mesure que l’on constate les progrès de la médecine, des questions éthiques semblent prendre de plus en plus de poids. A mon sens, la formation scientifique ne peut aujourd’hui plus être déliée d’une approche éthique. Car une médecine ou une science dure, dépourvue d’interdisciplinarité avec des domaines comme l’anthropologie ou la philosophie, n’est qu’une science qui profite à elle-même, et non à l’Homme. Savoir pour savoir a longtemps été un but en soi et demeure un but dans de nombreuses recherches. Mais la médecine et les sciences de demain, qui nous réservent intelligence artificielle, robots ou encore transhumanisme, devront, ne devraient-elle pas désormais s’astreindre à replacer l’Homme au centre?

Lucas Jemelin

Le poids des Ecrits

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines activités du programme dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il nous rend compte ainsi du déroulement de certains cours auxquels il a participé, comme observateur, le temps d’un après-midi ou d’une matinée…

Sciences de religions – Musulmans et chrétiens: quelle rencontre aujourd’hui

Lausanne – Mardis 5, 12, 19 et 26 mars 2019 – Cours de Jean-Claude Basset, ancien chargé de cours à l’UNIL sur l’islam et les relations interreligieuses

Issus d’un contexte historique extrêmement semblable, les différents textes religieux appellent chacun à répandre avec plus ou moins de vigueur leur version idéologique des faits historiques. Le Coran ordonne: «Combattez pour Dieu, car il a droit à la lutte que les croyants mènent pour lui.» (XXII, 78). Tandis que la Bible s’exclame: «Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit» (Matthieu, XXVIII, 19-20). On a déjà vu plus diplomatique.

Les textes religieux ont tout d’abord cherché à propager des règles morales, comme l’exprime par exemple ici le Coran : « Puissiez-vous former une Communauté dont les membres appellent les hommes au bien : leur ordonnant ce qui est convenable et leur interdisant ce qui est blâmable : voilà ceux qui seront heureux ». (III, 104) Mais la bataille religieuse s’est progressivement transformée en combat politique. En effet, les pouvoirs en place dans certaines villes du Moyen-Orient notamment, soumettaient les habitants à un impôt différent, en lien avec leur croyance et forçaient ceux qui ne voulaient s’y résoudre à quitter le territoire.

Pensée pour fédérer, la religion a également profondément désuni de nombreux peuples. Elle me semble si contradictoire. Prônant des valeurs d’amour, de partage et de respect, notamment dans le christianisme chacun des Livres de la Bible pousse cependant à répandre ardemment une foi jugée universelle.

A mon sens, le poids des mots présents dans les religions du Livre n’a pas été totalement appréhendé lors de l’écriture des textes. Certains termes ont mené et mènent encore aujourd’hui à des conflits bien trop importants au regard d’idéaux dont les fondations sont si bienveillantes. Loin d’énoncés réducteurs, il serait à mes yeux souhaitable que la religion se limite parfois à un concept un peu abstrait d’union, d’altruisme et de respect.

Lucas Jemelin

 

 

L’art comme un jeu de piste…

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines activités du programme dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il nous rend compte ainsi du déroulement de certains cours auxquels il a participé, comme observateur, le temps d’un après-midi ou d’une matinée…

Séminaire d’histoire de l’art

Lausanne – Mardis du 12 février au 30 avril 2019 – Séminaire de René Armellino, Dr en histoire de l’art

Dans l’activité qu’il anime, nommée « Séminaire d’histoire de l’art », René Armellino présente des œuvres méconnues, ou d’artistes moins célèbres, dont le nom doit être découvert par les participants. Ces derniers s’attèlent à identifier les contextes historiques, artistiques ou culturels qui contribuent à la révélation finale du peintre. Une forme de jeu de piste durant lequel les participants aiguisent leur œil et sont autant d’acteurs d’une réflexion qui se conclut en une victoire collective, lorsque l’artiste est décelé dans les traits caractéristiques d’un visage ou les nuances d’une lumière.

Aussitôt qu’une nouvelle œuvre apparaît à l’écran, les réactions s’enchaînent. Les théories se multiplient dans les têtes, tandis que sont feuilletés de petits carnets où semblent résider de nombreuses années de notes. Certains prennent des photos du tableau, afin d’aller chercher de plus amples informations sur internet, une fois de retour à la maison. D’autres, enfin, scrutent chaque détail de la peinture à la recherche d’un coup de pinceau, d’un visage, d’un camaïeu ou d’un aspect géométrique qui pourrait caractériser l’artiste ou donner quelques indications sur le contexte historique.

«Est-ce que c’est un français, vous demandez?… Vous auriez pensé à qui?» Semant les indices, mais jouant un rôle de médiateur avant tout, René Armellino aiguille, met en confiance et pousse les participants à se dépasser. Des participants qu’il connaît parfois depuis plus de 15 ans et dont il relève les connaissances historico-artistiques. «Évidemment, au début, ils avaient un peu peur de dire des bêtises», raconte le professeur, suivi depuis de nombreuses années par certains membres de Connaissance 3. «L’Histoire de l’Art est considérée comme une branche difficile, mais ils réalisent de véritables progrès et acquièrent un regard précieux à travers les œuvres qui sont présentées.»

A l’inverse d’un cours plus conventionnel dans lequel un professeur détiendrait un savoir que les élèves recevraient patiemment, René Armellino souhaite construire des raisonnements avec les participants et se propose comme un canalisateur de leurs idées. «Le but n’est pas de trouver tout de suite l’œuvre mais de bâtir ensemble des réflexions qui offriront un regard différent, au musée par exemple.» Lors d’une question sur le rapport professeur-élèves posée aux participants, ils sont catégoriques: «Évidemment que l’enseignant amène un plus, mais l’apport des élèves est tout autant valorisé.».

Bien que ce séminaire s’adresse à des personnes plutôt chevronnées dans le domaine et que certains participants suivent l’enseignant depuis de nombreuses années, ils ne se sentent pas partie d’un groupe fermé. Cette saison, six nouveaux membres de Connaissance 3 se sont joints à l’activité et se disent «très accueillis». Et les habitués de renchérir: «Des bêtises, tout le monde en dit!»

Lucas Jemelin

Romantisme d’Hier et d’Aujourd’hui

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines activités du programmer dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il en retire une chronique, fruit de ses pensées et de ses réflexions autour des sujets traités.

Histoire de l’art – Les merveilles du 19e siècle

Lausanne – Mardis du 12 février au 30 avril 2019 – Cours de René Armellino, Dr en histoire de l’art

La salle est aujourd’hui doucement obscurcie, pour laisser la place aux œuvres étudiées à l’écran. De nombreux tableaux sont présentés. Certains sont analysés en profondeurs, et chaque personnage de l’œuvre est replacé dans le contexte historique et culturel auquel il appartient. D’autres peintures sont seulement brièvement décrites à travers les symboles qu’elles véhiculent ou les atmosphères qu’elles dégagent. Cet ensemble offre ainsi des points de comparaison nécessaires à une appréhension transversale d’un courant artistique.

Suite à la théorie, les participants sont invités à donner leur opinion, leurs impressions et ressentis des œuvres. Ce personnage qui tourne le dos au spectateur engage-t-il à porter le regard dans sa direction ou instaure-t-il une forme de distance entre l’observateur et le tableau? Si la mort est représentée par l’eau chez Friedrich, que la glace vous inspire-t-elle? Il est possible pour chacun d’exposer son regard actuel sur le contexte artistique de l’époque.

Exaltation des sentiments, immersion dans une nature plus forte que l’Homme. Les thèmes du Romantisme nous sont peut-être plus contemporains que je ne le pensais. On recherche des émotions folles à travers des sports extrêmes, une escalade d’El Capitan dans le Yosemite, un saut en parachute depuis la stratosphère, dans des drogues ou les nuits de jeu à Las Vegas. Et je reste bouche bée devant les inondations qui se multiplient, les feux de forêt innarêtables ou les séismes destructeurs.

Si l’art contemporain n’est évidemment pas comparable à celui du 19e siècle, notre société dépeint également une recherche de sens dans son attirance pour les activités singulières. Face à de nouveaux défis climatiques, en outre, un monde qui souhaiterait tout contrôler constate de plus en plus souvent son impuissance, autrefois si belle, aujourd’hui si effrayante.

Lucas Jemelin

Sauver la planète, c’est dans la tête

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines conférences et cours, dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il en retire pour nous une chronique, fruit de ses pensées et de ses réflexions autour des sujets traités. Voici ses  impressions.

« Malgré les difficultés, un avenir durable est possible »

Lausanne – lundis, du 11 mars au 1er  avril 2019 – Cours de Jean-Claude Keller, ingénieur EPF et licencié ès sciences physiques, maître de physique retraité

« On a tellement peur de mourir et on a tellement besoin de trouver une explication au fait qu’on est sur cette planète et qu’on sait que notre existence va s’arrêter, qu’on met en place tout un tas de stratégies pour se protéger. Stratégies de domination des autres individus ou des espèces, stratégies pour divertir notre attention de cette terreur, de cette peur fondamentale. ». Cyril Dion, écrivain et coréalisateur du film “Demain“, s’exprimait en ces termes le 10 juin 2018 en réponse à une question sur notre rapport à la Terre.

Propos éclairants mais également quelque peu effrayants. En effet, si pour sauver la planète, il nous faut modifier notre rapport à la mort, la tâche semble ardue. Une transition aussi spirituelle que matérielle serait ainsi nécessaire. Réduits à la dimension d’êtres éphémères qui arrivent sur Terre et la quittent aussi vite, nous papillonnons avec énergie pour trouver un sens à notre vie. Accepter la fugacité de la vie et de ne pas tout saisir, une solution magique ?

Possible. En effet, je n’imagine pas que les moines bouddhistes qui, de mon point de vue approchent le plus cette notion d’acceptation, soient les plus énergivores. Je croise rarement un bonze au supermarché et encore moins au volant d’un gros 4×4. Sauver la planète leur semble assurément très chronophage.

Alors que faire à mon niveau ? Recycler le vieux verre et les pots de yoghurt, c’est très bien, mais cela ne changera certainement pas mon regard sur le cycle de la vie. En plus de me pencher pour ramasser les déchets qui traînent, il faudrait que je songe à me pencher sur les écrits d’Epicure, ou d’autres. Afin de me familiariser avec l’idée que la mort n’est rien pour nous puisque lorsqu’elle se manifeste, nous ne sommes plus. Voilà une belle raison de ralentir la vitesse et de se régaler de chaque moment.

 

Lucas Jemelin

L’heure est à la Fête

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines conférences, dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il en retire pour nous une chronique, fruit de ses pensées et de ses réflexions autour des sujets traités. Voici ses  impressions.

« En attendant la prochaine Fête »

Lausanne – 25.03.2019 – Conférence de Sabine Carruzzo, historienne, secrétaire générale de la Confrérie des Vignerons

Sur une place de 17’000 m2, 400 haut-parleurs seront disposés autour d’une scène principale de 1’200 m2. D’une hauteur maximale de 30m de haut, l’arène de 700 tonnes pourra accueillir jusqu’à 20’000 places assises. Pratiquement autant que d’habitants de la ville de Vevey, qui accueillera cette année la légitimement renommée Fête des Vignerons.

Une fois par génération, cette Fête magistrale récompense les vignerons de la région lémanique pour leur labeur. Encourager le travail bien fait, voilà une idée tout à fait suisse. Et bien que des prix soient remis aux vignerons tous les trois ans, recevoir sa médaille lors d’un tel spectacle revêt un caractère singulier. Cette année, le couronnement officiel aura lieu le 18 juillet au matin, tandis que des reproductions de ce dernier seront jouées lors des autres représentations.

Interprétation du “Ranz des vaches“ par onze ténors, valse du Lauterbach, moult costumes: la remise de récompenses ne sera toutefois de loin pas le seul attrait de cette Fête des Vignerons. En outre, rendre l’expérience totalement immersive est un des souhaits les plus chers des concepteurs. Sabine Carruzzo, lors de la conférence de clôture du 25 mars, promet “un spectacle d’une technicité folle“, rendant l’équilibre entre nouvelles technologies et tradition de plus en plus ardu à conserver.

La première Fête se situe en 1797. Une estrade de 2’000 places est alors érigée. Ces chiffres augmentent progressivement pour atteindre les 12’000 places près d’un siècle plus tard, en 1889. De même que les figurants, pas loin de 1’400 cette même année, ils seront près de 6’000 en 2019. Si ces sommes impressionnent, elles témoignent d’un engouement certain pour la tradition, encore aujourd’hui. Entrée au patrimoine immatériel de l’Unesco en 2016, la dimension de la Fête des Vignerons atteste d’un désir puissant de conserver des pratiques que l’on pourrait croire appartenir au passé.

Portée par un héritage important, la Fête des Vignerons semble avoir un bel avenir devant elle. Car si le travail bien fait est apprécié des Suisses, la fête et surtout le bon vin le sont tout autant!

 

Lucas Jemelin

 

L’Humain et la machine

Civiliste à Connaissance 3 de janvier à juin 2019, Lucas Jemelin participe à certaines conférences, dans le cadre de ses tâches d’information et d’accompagnement des seniors. Il en retire pour nous une chronique, fruit de ses pensées et de ses réflexions autour des sujets traités. Voici ses  impressions.

« My robot is rich, tax it! »

Lausanne – 18.03.2019 – Conférence de Louis Ballivet, assistant doctorant du Pr Xavier Oberson, Unige

Présents jadis uniquement dans les films ou dystopies tourmentées, les robots obtiennent une place de plus en plus importante dans notre société. Il faut dire qu’ils sont doués. M. Ballivet, lors de sa conférence à Lausanne, évoque des machines spectaculaires : un robot aide en pharmacie ne commettant jamais aucune erreur d’ordonnance, un robot avocat qui sort de sa gigantesque base de données l’affaire la plus pertinente pour une défense ou même un robot effectuant des sauts périlleux.

Mais les robots ne font pas que des sauts périlleux. Ils sont également actifs dans l’économie. Certains sont traders, ou joueurs d’échec professionnels et tendent à remplacer certains emplois. M. Oberson, avocat fiscaliste et professeur à l’Unige, est très justement cité : « Le problème ne sera plus simplement de créer des emplois, mais de créer des emplois où les algorithmes ne seront pas meilleurs que les humains ».

On reconnaît depuis longtemps que les robots calculent plus vite que nous. Cependant, leurs algorithmes ne se limitent pas à de simples équations. Aujourd’hui, les robots mettent aussi un pied dans le monde de l’art, de la création. Ils écrivent de la musique dite “profonde, suscitant des émotions“ et ils savent reconnaître des images en décomposant leur structure. Mais pas que.

Le 12 mars 2016, lors d’un tournoi de jeu de Go – un jeu de plateau chinois au nombre de combinaison bien plus important que pour les échecs – une Intelligence Artificielle a joué contre Lee Sedol, un maître du jeu, et a gagné. Le plus surprenant fut un coup, en milieu de partie, que les experts considérèrent très étrange, mais qui donna la victoire au robot. Le talent de la machine se basant sur l’analyse de millions de parties de grands joueurs, ce coup si spécial ne devait certainement pas y figurer. La machine avait fait preuve d’une forme d’inventivité.

Au regard de tout ceci, je me demande parfois si notre cerveau ne serait autre qu’un système immensément complexe d’algorithmes vers lequel les robots du futur pourraient tendre. Bien que cette idée puisse rebuter nombre d’entre nous, je ne serais pas étonné d’observer une évolution toujours exponentielle de la capacité des robots à imiter des raisonnements que l’on considérait jusqu’alors si humains.

Le professeur Oberson, ainsi que Bill Gates notamment, suggèrent qu’à l’avenir soit appliquée une taxation financière liée au travail que fournit le robot et à l’emploi qu’il remplace potentiellement. Cependant, si les robots rivalisent d’ingéniosité avec les humains d’ici là, il s’agira alors de les dissuader, entre autres, de frauder fiscalement.

Lucas Jemelin