Comme pour de nombreux·euses·x cariocas, il est aussi temps pour nous de reprendre le travail. Le début de la semaine est rythmé par le planning que nous commençons peu à peu à connaître : réveil, petit-déjeuner et marche matinale jusqu’au Swissnex. Depuis là, nous avons rejoint Vincent et Malin avant de nous mettre en route pour notre rendez-vous de la journée. En effet, il s’agissait de rencontrer Priscila Pereira Da Silva, la coordinatrice du projet « Crescer sem violência » (Grandir sans violence) faisant partie de la fondation Roberto Marinho. Bien que nous ayons déjà rencontré Priscila par Zoom au début de notre projet il y a quelques mois, se fût un réel plaisir de se voir enfin en « présentiel » et de pouvoir échanger plus amplement avec elle. 

Nous arrivons tout d’abord devant un bâtiment moderne avec une entrée très sécurisée puisque celui-ci héberge de nombreux bureaux dans le secteur de la finance et des médias. Priscila nous a accueilli à l’entrée et nous a fait visiter les locaux en précisant qu’elle se perdait parfois elle-même puisqu’elle n’y a été que très peu présente en raison de la pandémie et du télétravail. Arrivé·e·s dans les locaux de la fondation, l’échange a enfin pu commencer par une présentation du projet par Priscila. En effet, « Crescer sem violência » n’est pas une association ni une fondation, mais un projet faisant partie de la Fondation Roberto Marinho. Cette fondation a été créée par Roberto Marinho, le fondateur du groupe médiatique « Globo » ayant exercé une forte influence au Brésil. Sa fondation touche toujours au domaine médiatique puisqu’un de leurs projets a été de créer une chaîne télévisée éducative appelée « Futura ». C’est à partir de ce moment qu’entre en scène le projet « Crescer sem violência » puisqu’il s’agit de sensibiliser les enfants aux violences sexuelles dont iels peuvent être victimes mais aussi à d’autres types de violences comme le harcèlement scolaire, les violences psychologiques ou encore la santé mentale. Actuellement, cette sensibilisation consiste en de courts dessins-animés mettant en scène des enfants issus d’une famille multi-ethnique et recomposée afin de coller le plus possible aux structures familiales brésiliennes actuelles. Les enfants sont aussi de genre et d’âge différents afin de toucher le plus d’individus possible. Puisque les questionnements et les problématiques que rencontrent les enfants sont différentes en fonction de leur âge, les dessins animés sont divisés en trois catégories correspondant à la petite enfance (de 0 à 7 ans), à l’enfance (de 8 à 13 ans), à la pré-adolescence et adolescence (14 ans et plus). 

Avant de nous dévoiler son projet, Priscila nous présente d’abord quelques chiffres. Il est tout d’abord important de se rendre compte que la plupart des violences sexuelles sont commises par une personne faisant partie de l’entourage de l’enfant. En effet, l’association estime que 77% des agressions sont perpétrées par des membres de la famille. L’association a également mis en avant l’impact de la pandémie de la COVID-19 sur les violences sexuelles, celle-ci serait la cause de l’augmentation actuelle du nombre de cas. La pandémie a aussi eu des conséquences sur la santé mentale des jeunes puisqu’environ un quart d’entre elleux présentait des signes dépressifs durant cette période. Il est néanmoins difficile de présenter des chiffres exacts en raison de l’arrêt de la publication de statistiques durant la pandémie par le gouvernement concernant le nombre de décès liés à la COVID-19, l’augmentation des violences domestiques ou encore des suicides. En plus de l’augmentation des violences sexuelles liées à la pandémie de la COVID-19, ces violences touchent des enfants de plus en plus jeunes, ce qui accroît l’impunité des agresseur·euse·x·s puisque les jeunes enfants ont plus de peine à parler de leur situation. 


Sensibiliser les jeunes aux violences sexuelles, c’est-à-dire leur faire prendre conscience qu’iels n’ont pas à accepter ces comportements inappropriés et leur apprendre à les dénoncer, s’avère donc fondamental. L’école représente ainsi un lieu de prévention privilégié puisque c’est un endroit où l’enfant n’est plus sous l’emprise de potentiels agresseur·euse·x·s présent·e·x·s au sein de sa famille ou de son entourage. Au vu du haut taux de violences sexuelles – on estime qu’une personne sur dix aurait vécu des violences avant ses 18 ans – mais aussi de l’importance que prend les mariages de mineur·e·x·s dans la société brésilienne (le Brésil étant le cinquième pays avec le plus haut taux de mariage d’enfants au monde), l’éducation sexuelle au Brésil est confrontée à des enjeux totalement différents qu’en Suisse. 

En combinant les informations issues de notre entretien de la journée ainsi que celles que nous avons récoltées lors de nos précédents interviews, nous avons pu commencer à préciser et finaliser notre projet d’innovation sociale en vue de la présentation du lendemain. Après avoir repris des forces dans un buffet servant des plats typiquement brésiliens, nous nous sommes à nouveau rendu·e·s dans les locaux de Swissnex afin de se remettre au travail. Chaque groupe a pu débriefer à propos de toutes les informations obtenues depuis le début de notre séjour mais aussi issues des entretiens menés en Suisse avec divers professionnel·le·x·s. Il s’agissait ensuite de donner forme à notre innovation sociale en rédigeant une présentation de quelques minutes permettant d’expliquer rapidement et facilement notre projet aux invité·e·x·s de l’événement du lendemain. 

Marion Le Morvan