Un paraplégique marche par la pensée : les dessous d’un exploit

Pour permettre à Gert-Jan, paraplégique depuis 12 ans, de remarcher en imaginant son mouvement, une interface cerveau-machine a été élaborée. Retour sur l’histoire d’une prouesse.

Pour permettre à Gert-Jan, paraplégique depuis 12 ans, de remarcher en imaginant son mouvement, une interface cerveau-machine a été élaborée, valant une publication dans la revue Nature. Or il faut du temps et une grande équipe multidisciplinaire pour développer un tel dispositif. Retour sur l’histoire d’une prouesse.

« Ce n’est pas une simple amélioration technologique. C’est un changement conceptuel radical », se réjouit Grégoire Courtine, professeur en neurosciences à l’EPFL, au CHUV et à l’UNIL, qui a supervisé cette avancée avec Jocelyne Bloch, neurochirurgienne et professeure au CHUV, à l’UNIL et à l’EPFL. Cette révolution, c’est celle qui permet à Gert-Jan, atteint d’une lésion de la moelle épinière, de marcher par sa pensée. Une première.

Illustration du pont digital. © Frederic Merlos / EPFL

L’interface cerveau-machine rendant possible cette performance relie digitalement sa tête à ses jambes. Lorsqu’il pense à bouger ces dernières, les neurones de la zone de son cortex moteur s’activent et génèrent une activité électrique. Un dispositif implantable muni de 64 électrodes inséré à la place d’un bout de son crâne capte ces signaux et les relaie à un ordinateur portable par l’intermédiaire d’un casque muni d’antennes. Un programme informatique décode ces intentions motrices et envoie en temps réel des commandes à des électrodes de stimulation implantées dans la moelle épinière de Gert-Jan. La région responsable du mouvement de la jambe reçoit ce signal. Avec un délai de moins d’une seconde, Gert-Jan retrouve le contrôle de ses muscles.

Ce scénario, qui semble tout droit sorti d’un récit de science-fiction, est pourtant réel et vient de faire l’objet d’une publication dans Nature. Mais un tel exploit ne se fait pas du jour au lendemain, commente Gert-Jan : « Ce n’était pas juste un moment « waouh ». Ça a été long pour arriver ici. C’est toujours un travail difficile, mais je suis très heureux d’avoir réussi à être là où je suis aujourd’hui. » Il a fallu des années de travail de la part d’une cinquantaine de personnes : des ingénieurs, des médecins, des biologistes, des mathématicien·e·s, des informaticien·e·s, sans oublier les physiothérapeutes qui ont suivi la réhabilitation du quadragénaire.

Anatomie chronologique de cet exploit :