Le handicap au cœur du réel

Le handicap et sa perception sociale via les archives de la RTS entre 1956 et 2020. Un projet axé sur la connaissance et l’inclusion.

On peut en être victime, directe ou proche, et en souffrir. Mais il y a maintes façons de voir et de vivre avec un handicap. La société doit s’ouvrir davantage, c’est le but du projet sur les chemins de l’inclusion, qui explore la question dans les archives de la RTS entre 1956 et 2020.

Lors d’une riche soirée de lancement à l’UNIL, la sociologue Anne Marcellini a présenté, avec d’autres protagonistes du projet, les différentes étapes d’une étude socio-historique financée par le programme Agora du FNS.

Sur les chemins de l’inclusion est d’abord une recherche menée par l’Institut des sciences du sport (Issul / SSP), qui ambitionne via une plateforme numérique, ainsi qu’un film documentaire dont la réalisation subtile transcende par l’émotion la pure information scientifique, d’intervenir dans la société (au premier plan, les écoles) pour contribuer au changement en cours. La Suisse a ratifié en 2014 la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’ONU et se doit de transformer à cet égard son environnement social.

Des archives et des événements

Destinée à tout un chacun, la plateforme comporte un aspect ludique et pratique qui permet d’accéder à des contenus très riches (archives télévisuelles sur diverses thématiques en lien avec le handicap et capsules filmées évoquant les réactions à ces images lors d’ateliers avec des personnes concernées), de poser des questions et de réagir avec des idées et propositions, soit pour améliorer la plateforme soit pour organiser des événements. Après la recherche académique, qui a été durant quatre ans nourrie par divers travaux de master et de doctorat, il s’agit désormais de « poursuivre le projet avec les associations, les personnes concernées et plus généralement la société », décrit Anne Marcellini.

Une problématique à la fois diverse et commune

Intitulé INEXCLUSIO. Une histoire, des images, des visages, le film qui accompagnera la plateforme lors des interventions scolaires, associatives et politiques est lui-même déjà une construction collective (comme tout film) puisqu’il donne largement la parole (y compris parfois sur la forme) à des personnes sourdes ou malentendantes, aveugles ou malvoyantes, ou encore vivant avec des atteintes motrices, des déficiences intellectuelles, des troubles psychiques ou des neurodivergences. L’éventail des intervenantes et intervenants donne une image transversale et non sectorielle du handicap, ce qui indique une problématique politique commune vis-à-vis d’une société encore trop monolithique face à la complexité et à la diversité des handicaps.

En collaboration avec la RTS

Les archives numérisées de la RTS (reportages, fictions-docus, émissions de plateau, etc.) ont été mises à la disposition du projet de recherche grâce à une collaboration étroite avec le service Données + Archives de la RTS. « Nous voulions étudier la façon dont ces images ont participé à un état d’esprit général vis-à-vis de l’invalidité, sur sept décennies, et contribué elles-mêmes à façonner nos représentations collectives », esquisse la directrice du programme de recherche. Portant sur l’activité physique des enfants aveugles, le placement en institution parfois à vie, les voyages à Lourdes, la difficulté des déplacements en train, le sport-handicap et de nombreux autres aspects, ces archives peuvent faire sourire, ou attrister, et permettre de mesurer aussi le chemin réalisé dans la vision de moins en moins misérabiliste du handicap, ainsi que tout ce qui reste à parcourir.

Quel soutien dans la société?

Le travail de médiation qui débute passera par L’éprouvette en soutien à la création d’ateliers. En mai 2024, avec la fin du projet Agora, il s’agira de passer le témoin et de confier la gestion de la plateforme à d’autres acteurs sociaux afin de poursuivre la construction d’une société plus ouverte à tous les niveaux. On pense, notamment, à la vie professionnelle très peu inclusive dès lors qu’il s’agit de permettre aux personnes handicapées qui le souhaitent de travailler non pas dans un atelier protégé, une institution spécialisée, mais aux côtés des valides, de se former et d’apporter leur contribution originale, avec un soutien adéquat dont on semble encore fort loin.

« Nous devons construire cette société de manière participative, avec les principaux intéressés et pas seulement pour eux, ou en agissant à leur place, en reconnaissant toutes nos différences et en les prenant en compte », conclut la sociologue de l’inclusion. Avec les associations, les acteurs politiques concernés et / ou sensibilisés à ces questions, ainsi que tous les événements qui peuvent mettre le handicap au cœur de la société, ce projet ambitionne d’améliorer les savoirs pour favoriser des manières de penser et de vivre plus égalitaires.

Où voir le film ?

Comment découvrir INEXCLUSIO. Une histoire, des images, des visages ces prochains temps?

Il faudra participer à des séances de médiation scientifique ou alors suivre les projections festivalières qui seront annoncées (voir https://cheminsinclusion.ch/ et https://wp.unil.ch/handirtsarchives/). Dans un an, le film sera proposé sur le site de la RTS en Play RTS.

Réalisé par Anne Marcellini, monté par David Huwiler. Avec, à l’écran, Hadja a Marca-Kaba, Céline Steiner-Délèze, Raphaël de Riedmatten et Pierre Weber. En partenariat avec Agile.ch, Asa-Handicap Mental, Procap Vaud, Solidarité Handicap Mental, Toutouïe (Bejune).