Garantir un niveau de vie décent tout en réduisant la consommation d’énergie est possible. Mais comment y parvenir ? Une étude publiée le 30 juin dans la revue Global Environmental Change propose des pistes.
Pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, à savoir limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C sans s’appuyer sur des technologies futures spéculatives, il apparaît clair aujourd’hui que la consommation mondiale d’énergie doit diminuer. Mais comment faire pour respecter ce principe sans que cela n’entrave l’accès de certaines populations à un niveau de vie décent ? Une recherche publiée le 30 juin dans la revue Global Environmental Change, et menée conjointement par l’Université de Leeds, l’UNIL, l’Unige et le Mercator Research Institute on Global Commons and Climate Change de Berlin, s’est penchée sur la question.
Il faut dire que pour l’instant nous sommes bloqués dans une situation apparemment sans issue. La coauteure de l’étude et professeure ordinaire à l’Institut de géographie et durabilité de l’UNIL Julia Steinberger résume :
« Actuellement, les pays qui satisfont les besoins de leur population le font tous à un niveau de consommation énergétique par habitant très élevé, alors que les pays à consommation énergétique basse sont en insuffisance au niveau des besoins humains. »
Pour comprendre comment sortir de cette impasse, les chercheurs ont examiné quels facteurs pourraient permettre de parvenir à un bon niveau de vie sans surconsommation énergétique.
Des paramètres interconnectés
Par le biais d’une analyse statistique basée sur les données de 106 pays, les scientifiques ont observé des interdépendances existant entre la satisfaction des besoins fondamentaux (alimentation, eau, assainissement, santé, éducation et moyens de subsistance) et des éléments comme l’égalité économique, la qualité du système démocratique ou les conditions d’accès aux transports et aux infrastructures. Celles qui permettent aux personnes d’avoir une basse consommation énergétique tout en participant à la vie de la société. Des paramètres extrêmement interconnectés.
Leur conclusion : pour parvenir à un avenir durable du point de vue social et environnemental, les gouvernements doivent améliorer considérablement les services publics, réduire les disparités de revenus, limiter l’extraction des ressources et abandonner la croissance économique dans les pays riches.
Julia Steinberger commente :
« Contrairement à des hypothèses largement répandues, les faits suggèrent que des niveaux de vie décents ne nécessitent ni une croissance économique perpétuelle ni des niveaux de richesse élevés. En fait, dans les pays riches ou même modérément riches, cela est préjudiciable au niveau de vie. Et cette croissance est aussi fondamentalement non durable : elle est liée à l’augmentation de la consommation d’énergie et rend donc pratiquement impossibles les économies d’énergie qui sont nécessaires pour lutter contre le changement climatique. »
Des clés pour changer de trajectoire
Pour les pays en développement, l’amélioration du niveau de vie doit se faire notamment par la mise en place de services publics gratuits et de qualité dans des domaines tels que la santé, l’éducation et les transports, mais aussi par une répartition plus équitable des revenus, grâce par exemple à une augmentation du salaire minimum, un revenu de base universel ou l’introduction d’un niveau de salaire maximum. La professeure conclut :
« Pour l’instant, aucun pays n’a encore trouvé le bon équilibre. Mais grâce à cette recherche, nous avons maintenant les clés pour comprendre ce qui fait que certains États y arrivent mieux que d’autres. Nous savons désormais sur quels facteurs les sociétés peuvent s’appuyer pour changer de trajectoire. »
Une bonne nouvelle pour la justice climatique et le bien-être humain. Mais les chercheurs sont clairs : il faut agir. Car, sans ces transformations fondamentales, notre système économique actuel et les économies d’énergie nécessaires pour éviter des changements climatiques catastrophiques risquent de compromettre le niveau de vie dans le monde.