Par Alexandra Georgakopoulou et Sylvie Patron
Le concept de small stories (« petites histoires », « petits récits », « micro-récits », aucune traduction n’est vraiment adéquate) a été introduit dans la discussion scientifique par Michael Bamberg et Alexandra Georgakopoulou (voir Bamberg 2004, 2007 [2006]; Georgakopoulou 2006a, 2007 [2006b], 2007; Bamberg et Georgakopoulou 2008). Il désigne « un ensemble d’activités narratives sous-représentées, comme les récits d’événements en cours, d’événements futurs et hypothétiques, d’événements partagés (connus), mais aussi les allusions à des récits, les récits différés ou encore les refus de raconter » (Georgakopoulou 2007 [2006b]: 122; 2007: vii; Bamberg & Georgakopoulou 2008: 381). Ces activités narratives sont sous-représentées ou ne sont pas considérées comme des récits dans l’analyse narrative traditionnelle héritée des travaux de William Labov et dans tous les travaux sur les récits de vie basés sur des entretiens de recherche. Le but de la small stories research est de déplacer l’attention, auparavant centrée sur les récits de soi, récits longs, pris en charge par un narrateur unique, consacrés à des événements passés non partagés, vers les récits souvent courts et fragmentés que l’on trouve dans les environnements interactionnels de tous les jours, et particulièrement aujourd’hui sur les réseaux sociaux. Les small stories se distinguent des big stories par leur contenu, peu développé et en apparence anodin, relevant de l’expérience quotidienne, mais aussi par leur structure: elles ne remplissent pas toujours les critères textuels identifiés pour le récit, peuvent porter non sur des événements passés mais sur des événements en cours ou situés dans un futur proche, contiennent généralement une action ou une « complication » minimales, sont co-construites par les participants (les interactions entre participants étant parfois plus importantes que les événements rapportés). Elles peuvent se dérouler dans des lieux et des contextes différents et ont un caractère incomplet et fragmentaire si on les analyse dans le cadre d’un seul événement de parole. Lire la suite