Il aime déjà Lausanne mais conserve Bordeaux dans son cœur. Mickael Terrien est un jeune professeur qui s’intéresse au foot, aime en faire et surtout en étudier la dimension économique et publique dans le cadre désormais de l’UNIL-IDHEAP.
«Le foot s’apparente à un bien public et c’est la seule industrie quasiment transparente», commence-t-il. La presse en effet décortique tout : les joueurs sont des salariés dont tout le monde connaît l’état de santé ou le salaire. Ce dernier en général est élevé, voire très élevé en équipe nationale. «C’est un sport qui génère énormément d’argent et on peut dire que le moins bon en équipe de France est millionnaire», poursuit Mickael Terrien. Intéressant pour les médias, objet d’autorégulations et de politiques publiques, le foot est aussi un laboratoire de recherche en matière de gestion et d’économie pour ce nouveau professeur de la Faculté de droit, des sciences criminelles et d’administration publique.
Le sport comme miroir de la société
Un paradoxe point aussitôt puisque «tous les clubs de foot perdent de l’argent», précise l’économiste. En cause justement cette «course à l’armement» qui pousse les uns et les autres vers une surenchère financière creusant leurs difficultés. Au niveau des politiques publiques, le sport miroir de la société est révélateur d’un «modèle français plus égalitaire entre les différentes fédérations» et d’une Suisse qui «donne énormément aux plus performants», esquisse-t-il. Au sein d’un même pays, cela se complique puisque le spécialiste a identifié pas moins de dix catégories de modèles économiques auxquels se rattachent 72 fédérations françaises, dans une étude réalisée avec Antoine Feuillet, de l’Université Paris-Sarclay, et Emmanuel Bayle, à l’Institut des sciences du sport de l’UNIL…
Management du sport en Suisse
Les professionnels du foot européen s’interrogent et certains se retrouvent sur les bancs de l’IDHEAP, dont l’unité de régulation du sport travaille beaucoup avec l’UEFA Academy à Nyon. Mickael Terrien a pris la responsabilité académique de ces formations, qui délivrent deux diplômes UNIL-IDHEAP en lien avec le management du sport. Il cite les enseignants impliqués : Jérôme Berthoud et Colm Patrick Hickey. Mickael Terrien a pris la succession du professeur Jean-Loup Chappelet, qu’il consulte volontiers et dont il rappelle le rôle pionnier dans la création du management du sport en Suisse. «C’est aussi le plus grand expert au monde sur la question olympique et un homme très bienveillant», résume-t-il.
L’économie ou la science des choix
Lui-même a créé un cours en économie du sport dans le cadre du Master en politique et management publics, avec un volet économétrique spécifiquement adapté au domaine sportif. L’économie est «la science des choix», souligne-t-il très simplement. Toute décision humaine, impliquant ou non une transaction financière, peut donc être traitée sous le prisme économique du calcul entre les coûts acceptés et les bénéfices escomptés. L’économiste peut donc intervenir dans tous les domaines, «même si, selon les problématiques, ce n’est pas forcément l’angle le plus pertinent», nuance-t-il. D’où la nécessité et la capacité à l’UNIL de traiter un sujet comme le foot ou d’autres sports de manière interdisciplinaire, sociologique, politique, juridique, médicale ou encore criminalistique…
On ne termine pas un portrait de Mickael Terrien sans évoquer ses nuits parfois trop courtes depuis la naissance de Marcus il y a quelques mois. Il cite aussi sa femme Clarisse, jusqu’ici chargée de projet en éducation à la citoyenneté et solidarité internationale, et ses parents dont on entrevoit l’influence : «Mon père, ancien joueur et entraîneur, m’a donné la passion du foot et ma mère celle des livres», glisse-t-il, soucieux de reconnaître les filiations et les héritages qui contribuent à façonner une vie.