Sur les pas de Maurice Béjart

La doctorante Auriane Marmier a, dans le cadre d’un concours de renommée internationale, présenté sa thèse en dansant !

La doctorante de l’IDHEAP Auriane Marmier a, dans le cadre d’un concours de renommée internationale, présenté sa thèse sur les Open Government Data d’une manière plutôt originale, soit en dansant !

Dans une vidéo sous-titrée en anglais, elle danse gracieusement et énergiquement sa thèse entre autres sur le campus, baskets ou pointes aux pieds, parfois avec un masque sur le visage dans un style assez contemporain. Ou elle joue au ping-pong avec une paire de pointes. Et lance un petit clin d’œil à la Suisse dans une scène de tir à l’arc, tout cela sur une musique libre de droits sympathique mais selon elle pas assez riche émotionnellement. Peu importe : Auriane Marmier a réussi à créer des tableaux loufoques et différents les uns des autres.

La danse, pour elle, est un superbe outil de vulgarisation.

« J’ai envie que les gens comprennent mes travaux »

Auriane Marmier

Elle a récemment mené à l’Institut de hautes études en administration publique (IDHEAP) une recherche doctorale sur les Open Government Data (OGD). Elle travaille sur les données de différentes organisations publiques que les administrations cherchent à partager avec les journalistes, les scientifiques ou les citoyens lambda. « En fait, il y a plein de plateformes qui sont mises en place pour qu’on puisse utiliser ces données, les télécharger et en faire ce qu’on veut, explique-t-elle. Finalement, je me suis aperçue que les données ne sont pas utilisables. » Ses recherches démontrent notamment que la pluralité des formats dans lesquels les données sont publiées sont de mauvaise qualité. Les différentes perceptions et compréhensions des OGD par les employés du secteur public, ainsi que le manque de connaissances et d’alignement entre l’informatique et les différents services et métiers affectent considérablement la publication des OGD et limitent donc leur réutilisation.

Un concours très sérieux

Pas évident de danser une recherche sur les Open Government Data. Mais Auriane Marmier a de la suite dans les idées et des compétences artistiques certaines. Elle a notamment fait ses classes au Ballet Junior de Genève : elle voulait devenir chorégraphe. Des ennuis de santé ont mis un terme à sa carrière. Elle a donc démarré ses études en management (bachelor en HEC suivi d’un master à l’IDHEAP).

« Je me suis aperçue, en faisant cette thèse, que j’adore entreprendre les choses différemment, je ne suis pas une scientifique pure et dure .»

Auriane Marmier

Guère étonnant que cette atypique chercheuse-danseuse ait participé, en janvier 2022, à la quatorzième édition du concours Dance Your PhD en envoyant sa vidéo aux organisateurs. Il s’agit d’une démarche sérieuse, organisée par l’American Association for the Advancement of Science (AAAS) et la revue Science. Cet événement a été créé en 2008 par John Bohannon, ancien correspondant de la prestigieuse revue scientifique et actuel directeur de la science chez Primer, une société d’intelligence artificielle dont le siège est à San Francisco. Cette initiative d’information sur la recherche vise le grand public en mettant au défi les doctorantes et les doctorants d’interpréter leurs travaux dans une chorégraphie mêlant sciences et arts de la danse. Le concours est divisé en quatre catégories (biologie, chimie, physique et sciences sociales) et est jugé par un panel de danseurs, de scientifiques et d’artistes réputés. Chaque gagnant reçoit un prix de 750 dollars et le grand vainqueur toutes catégories empoche 2000 dollars supplémentaires.

Une faculté enthousiaste

C’est son superviseur de thèse Tobias Mettler, professeur à l’IDHEAP, qui à la lecture de son CV l’a encouragée à participer à ce concours dans la catégorie sciences sociales. Pour concevoir sa vidéo, la scientifique s’est associée à Virgile Thévoz, un video designer. La Faculté de droit, des sciences criminelles et d’administration publique, enthousiaste, a soutenu son projet. Sans compter ses heures de travail pendant les week-ends et les soirées de décembre 2021. Un processus créatif pas simple à expliciter « J’étais dans mon monde à moi, j’avais l’impression que danser mes idées était très clair, mais en fait pas du tout ! » ironise-t-elle. Côté danse, elle s’est inspirée de Maurice Béjart, de son style néoclassique, où les danseuses malgré des pointes aux pieds s’épanouissent dans les mouvements. « J’adorais ça car techniquement je peux faire des scènes intéressantes avec les pointes. Je n’aime pas les styles trop rigides, trop classiques. » Auriane Marmier est également fan de Caroline Carlson, une précurseuse de la danse contemporaine qui se produisait à l’Opéra de Paris, une féministe de la danse, « un personnage très drôle ».

L’essentiel ? Participer

Les résultats du concours Dance Your PhD viennent de tomber : aucun prix pour notre danseuse-chercheuse. « Je ne suis pas déçue, c’est une compétition, ça fait partie du jeu, dit-elle. En revanche, je constate que pour la troisième année consécutive le gagnant est un rappeur. Il avait une équipe de 25 personnes autour de lui. Avoir un minimum de moyens, c’est important car on ne peut pas tout faire tout seul, mais là c’est exagéré. » Sans regrets ni amertume, Auriane Marmier affirme avoir eu une chance inouïe de pouvoir se lancer dans un tel projet à l’UNIL.  Désormais, elle danse surtout dans son salon. « C’était cool de concevoir cette vidéo, cela m’a permis de tourner cette page de ma vie », conclut-elle­.

Regardez sa vidéo!