Lucile Franz rend visible une population déclassée

Le Prix de la Société académique vaudoise récompense le travail d’une doctorante de la Faculté des sciences sociales et politiques, mené auprès de personnes ballottées entre aides sociales et politiques sécuritaires répressives dans le canton de Vaud.

Le Prix de la Société académique vaudoise récompense le travail d’une doctorante de la Faculté des sciences sociales et politiques, mené auprès de personnes ballottées entre aides sociales et politiques sécuritaires répressives dans le canton de Vaud.

Lucile Franz est diplômée d’un Bachelor en sciences politiques à l’UNIL et d’un Master à l’Institut des hautes études de l’Amérique latine, à Paris 3 Sorbonne Nouvelle. Pour son mémoire, elle s’est rendue au Costa Rica pour rencontrer des femmes impliquées dans le crime organisé. « Là est né mon intérêt pour le lien pauvreté-prison et les réponses des pouvoirs publics », indique la Nyonnaise. Après une mission de recherche en Équateur sur cette thématique, elle revient à l’UNIL, où elle se fait engager comme assistante diplômée à l’Institut des sciences sociales en 2016.

Pour sa thèse chapeautée par le professeur René Knüsel, Lucile Franz s’est penchée sur les itinéraires de personnes en situation de marginalité sociale dans le canton de Vaud : endettées, souvent consommatrices de stupéfiants et expérimentant la prison pour des délits mineurs, elles sont prises en charge par l’aide sociale ou l’assurance invalidité. La doctorante a fréquenté pendant une demi-année des centres d’accueil à bas seuil d’accessibilité dans une démarche d’observation, a écrit une dizaine de portraits de ces personnes qualifiées de « marginaux affiliés » et a interrogé 25 membres de la police et des services sociaux.

Écrasement institutionnel

Grâce à sa thèse soutenue en automne 2022, Lucile Franz a pu « rendre visible cette population déclassée, naviguant d’une institution à l’autre et ne répondant pas aux critères exigeants d’insertion des politiques sociales ». La chercheuse pointe certains mécanismes, comme les dettes après une condamnation pénale. « Les frais de justice sont à la charge des condamnés. Cumulant poursuites, antécédents pénaux et aide sociale, ils n’ont que peu d’intérêt à retrouver un emploi à cause des saisies sur salaire, qui au final leur apportent moins d’argent que l’aide sociale. »

Lucile Franz travaille actuellement comme collaboratrice scientifique à la HES-SO Valais/Wallis au sein de l’équipe CrimSo. Elle travaille sur des projets portant sur la probation et le travail social dans les prisons. Motivée par le Prix de la Société académique vaudoise, elle souhaite déposer un projet pour continuer à explorer ces sujets. Enfin, à partir du printemps 2024, la scientifique donnera un cours en politique sociale à l’Université de Neuchâtel.