Recteur entre 2006 et 2016, Dominique Arlettaz a donné sa leçon d’honneur le 8 septembre 2021. Il parle ici de l’UNIL, de la politique des hautes écoles et de quelques coïncidences mathématiques.
Dix ans d’influence personnelle sur la marche de l’UNIL et sur le cadre légal et financier qui conditionne, aux niveaux cantonal et national, la gouvernance des hautes écoles ont suffi à son bonheur. La loi sur l’Université de Lausanne l’autorisait en 2016 à briguer un troisième mandat de Recteur. Dominique Arlettaz, on le sait, a préféré céder sa place et plonger à nouveau dans l’enseignement qui l’enchante, avec ou sans masque. « Une collègue m’avait dit alors ne pas imaginer une autre personne à ma place, j’ai pensé qu’il était vraiment temps que je passe la main », sourit-il, confiant dans la stabilité de l’UNIL et la nécessité que d’autres offrent à l’institution de nouvelles idées.
Garder le savoir vivant
Nommé professeur honoraire, il a donné sa leçon d’honneur à la Faculté des géosciences et de l’environnement (FGSE) pour clore un parcours professionnel débuté en 1988 à l’ancienne Faculté des sciences, dont il fut le dernier doyen. Après 33 ans comme professeur, chercheur, doyen, vice-recteur, recteur, puis enseignant à nouveau, sans oublier sa présidence de la Chambre des recteurs des hautes écoles universitaires suisses, où il a veillé, notamment, à la juste répartition des subventions fédérales entre les universités, il s’en va dans la discrétion, concédant juste une pointe de nostalgie, lui qui vient d’achever aussi son mandat à la présidence du Conseil d’administration de l’Hôpital du Valais.
Le navire UNIL, sous sa direction, a hissé les voiles de deux nouvelles facultés pour faire dialoguer deux domaines de recherche et d’enseignement à la Faculté de biologie et de médecine et pour offrir au sein de la FGSE une vision globale de la Terre, de l’environnement humain, géographique et physique à l’heure où les questions climatiques sont prioritaires. Mais les autres facultés n’ont pas été en reste : « toutes les sciences ont le même droit d’être intéressantes », glisse le mathématicien…
Une affaire de transmission
A l’heure de dire au revoir, il a vivement exprimé dans son ultime leçon sa reconnaissance d’une part envers l’institution « ouverte, imaginative et non figée dans la tradition », ses collaborateurs « généreux et créatifs », le service public dont il loue la force, et d’autre part toute une série de mathématiciens d’hier et d’aujourd’hui qui ont orienté ses intérêts de recherche et ont été, pour certains, des amis et des sources d’inspiration proches. Il l’a souvent répété au cours des années : « Les scientifiques s’inscrivent dans une aventure collective et leurs découvertes, aussi novatrices soient-elles, s’appuient sur des pistes explorées par d’autres et ouvrent des perspectives pour l’avenir ». Là encore c’est une affaire de confiance et de transmission.
Se concentrer sur des choses simples
Dominique Arlettaz prône les changements dans la stabilité, l’optimisme jusque dans les difficultés à surmonter, et dit avoir appris des mathématiques comme de ses responsabilités institutionnelles à «prendre du recul pour se concentrer avec rigueur sur des choses simples, à bien poser les problèmes pour viser l’essentiel et se battre là où cela en vaut la peine sur le long terme».
Le bonheur dans les mathématiques
Sa spécialité est la topologie algébrique, qui se situe, explique-t-il, au croisement de l’algèbre et de la géométrie. Ce grand observateur s’est laissé surprendre, voire intriguer, par des coïncidences entre ces deux domaines distincts, coïncidences qui lui ont donné l’occasion de combiner différentes pièces d’un grand puzzle, apportant ainsi sa propre pierre à un édifice mathématique toujours en construction, inaccessible pour certains mais qui apporte à ceux qui s’y risquent patiemment « beaucoup de bonheur ». Le professeur invite d’ailleurs toute personne un peu déprimée à se plonger dans une question mathématique…