L’UNIL, deuxième haute école la plus durable de Suisse

C’est le résultat d’un classement réalisé par le WWF, qui a pris en compte 28 hautes écoles helvétiques. Nous avons fait le point avec le vice-recteur Benoît Frund.

Selon un classement réalisé par le WWF, qui a pris en compte 28 hautes écoles helvétiques, l’UNIL se positionne à la seconde place au niveau de la durabilité. Nous avons fait le point avec le vice-recteur Benoît Frund.

Avec un score de 88,17 points sur 100, l’Université de Lausanne se classe juste après l’École polytechnique fédérale de Zurich (89,92) et avant l’Université de Berne (87,92). Le WWF a inclus dans ses critères des éléments tels que l’ancrage de la durabilité au sein de la Direction de la haute école, l’alimentation sur le campus ou encore des engagements sociétaux et des partenariats avec des institutions externes.

Benoît Frund, que pensez-vous de ce résultat ?

B. F. : Il est fort satisfaisant et nous en sommes fiers. L’ONG de protection de l’environnement continue de reconnaître un travail réalisé depuis de nombreuses années. Rappelons qu’en 2019 l’UNIL avait été classée première dans le ranking du WWF, ex-aequo avec l’Université de Berne. Il est aussi intéressant de noter que toutes les universités et hautes écoles, ou presque, ont progressé en matière de stratégie de durabilité. En tant que président du Réseau durabilité des hautes écoles de swissuniversities, je trouve très réjouissant que des équipes prennent en charge les questions liées à la transition écologique dans presque chaque institution.

Comment se fait-il que l’UNIL soit une si bonne élève d’année en année dans le domaine de la durabilité ?

La prise en compte de ces questions par l’UNIL ne date pas d’hier, et cela nous donne peut-être un peu d’avance sur les autres hautes écoles suisses. Quand a été ouvert, dans notre institution, le poste de membre de direction d’une université en charge de la durabilité en 2011, une première en Suisse, je pense que cela a envoyé un signal dans le paysage académique. Cela a orienté la politique de notre institution sur le long terme, car les recteurs successifs ont priorisé les questions environnementales. De plus, des chercheuses et chercheurs des différentes facultés s’intéressent au sujet depuis très longtemps. Il existe une recherche et un enseignement continus en matière de durabilité. Je pense par exemple à des monitorings uniques menés dans les Alpes, sur la répartition des espèces en fonction de l’élévation des températures. 

Concrètement, par quelles actions l’UNIL marque-t-elle des points en matière de protection environnementale ?

Depuis le dernier classement de 2019, l’institution a renforcé ses politiques volontaristes sur le campus. Nous nous concentrons notamment sur l’offre alimentaire. Nous avons publié un cadre de référence ambitieux, qui sera désormais obligatoire. Cela se traduira par encore plus de produits locaux et d’offre végétarienne, et moins de viande. Cette dernière doit être issue d’exploitations régionales. Dans le domaine énergétique, il faut mentionner tout le processus de labellisation « Site à 2000 watts » en transformation (créé par l’Office fédéral de l’énergie). Il s’agit d’un label et non d’une récompense, qui reconnaît que notre stratégie s’inscrit dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015, visant à maintenir le réchauffement climatique en dessous de 2° C par rapport aux niveaux préindustriels. À l’UNIL, d’ici 2027, le système centralisé de production de chaleur, fonctionnant au gaz et au mazout, sera notamment remplacé par des pompes à chaleur haute température alimentées par l’eau du lac Léman. Nous n’allons pas nous reposer sur nos lauriers, du travail à ce niveau reste encore à faire. Ensuite, je peux mentionner notre Charte d’investissement responsable. Nous avons discuté avec la Banque Cantonale Vaudoise (BCV), qui gère nos avoirs. Les propositions faites ont eu pour impact de changer la façon dont la BCV gère l’ensemble des avoirs institutionnels dont elle s’occupe. L’UNIL vise à exclure les investissements dans des entreprises liées à l’armement nucléaire, à la violation des droits humains ou encore dans des firmes dont les revenus dépendent de façon significative de l’extraction de charbon, pour ne citer que quelques exemples. Encore une fois, il reste du travail dans ce domaine. Enfin, citons la création en 2019 du Centre de compétence en durabilité, dont le but est d’encore mieux ancrer la durabilité dans la formation, la recherche et le dialogue avec la société.

Le WWF rapporte que l’UNIL n’a pas annoncé d’objectifs en matière de neutralité carbone. Pourquoi n’est-ce pas à l’agenda ?

Nous estimons que nous ne pouvons pas prétendre à cela, à notre échelle. Mais nous nous investissons beaucoup pour diminuer les émissions. En dehors du label « Site à 2000 watts », nous nous concentrons sur les déplacements professionnels. On sait qu’il s’agit d’une partie importante de l’impact carbone : elle peut constituer entre 25 et 50% de l’impact d’une institution universitaire. Nous avons été aidés par la crise pandémique, qui nous a montré qu’il était possible de réaliser des événements sans déplacements, sans vols inutiles en avion.

Les achats de l’Université occupent aussi une place non négligeable dans notre stratégie, dont le matériel informatique et numérique. Il ne s’agit pas seulement de savoir quels ordinateurs acquérir, mais aussi et surtout comment on les fait durer. Et de quelle manière on s’occupe du stockage de toutes les données. Faut-il faire grossir les data centers ? Nous essayons de trouver des solutions pour ne pas sauvegarder 20 fois les mêmes choses et ainsi faire diminuer l’empreinte CO2. Voilà pour le niveau institutionnel.

Bien des nouveautés sont aussi à signaler du côté de l’enseignement, de la recherche et du dialogue avec la société. Je pense par exemple au projet Climact en train de se développer entre l’UNIL (Faculté des géosciences et de l’environnement, principalement) et l’EPFL. Plusieurs réflexions se font notamment au Pôle environnement et climat, créé par la Faculté de droit, des sciences criminelles et d’administration, avec toutes les problématiques liées aux sciences juridiques et administratives. Un gros travail commence maintenant autour du climat et de la santé, au niveau de la Faculté de biologie et de médecine. Mentionnons aussi l’appel à projets Volteface 2. Le processus est en cours et nous aurons sûrement des propositions de toutes les facultés. En sciences humaines, des événements sont proposés sur les imaginaires autour de la transition écologique ou encore de la nature en ville, avec des partenaires de la société civile comme le Théâtre de Vidy, les communes, les plans climat, etc. La liste est encore longue !

Comme l’encourage le WWF, pourquoi ne pas récompenser les étudiantes et étudiants engagés dans la durabilité avec des crédits ETCS ou encore des certificats spéciaux ?

À l’UNIL, nous sommes un peu réticents au « paiement » en crédits ECTS de chaque activité ou projet durables qu’une étudiante ou un étudiant fait ou crée. Il s’agit d’une façon de faire un peu mercantile. Mais une chose est certaine : nous continuerons de soutenir l’activité associative étudiante, qui a dû se mettre entre parenthèses à cause de la crise sanitaire et de l’absence des étudiants sur le campus.