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Reflexions

Les possibles de l’expérience ARCHAS

© Cesur A. Polat, 2021

Dans le cadre de la saison 2 d’ARCHAS à l’automne 2021, nous avons étudié deux farces composées et probablement jouées autour de 1520 dans la région vaudoise, découvertes dans les années 1920 et pour lesquelles on observe un récent regain d’intérêt : La Présentation des joyaux et La Fontaine de Jouvence. Fondé sur la théorie de l’imagination utile aux historien-nes et sur la pédagogie innovante, cet atelier a ainsi permis de donner voix et vie à ces œuvres.

L’utilisation de la réalité virtuelle n’a pas été uniquement une simple tentative de reconstitution ou de conservation d’un patrimoine étudié par les historien-nes et rejoué par les artistes. Cela a été également une mise en œuvre d’expérimentations pratiques, inspirées de sources écrites et iconographiques abordées sous un angle nouveau.


Espaces expérimentaux

Les environnements construits par François Daniel (Archéovision) pour ARCHAS nous ont servi d’espaces de mise en scène des farces. D’une part, ces lieux virtuels ont permis de « repenser la co-présence » du public et des acteur-rices, une caractéristique majeure de l’art théâtral. De l’amphithéâtre rempli de centaines de spectateur-rices bruyant.es aux tréteaux situés au centre du marché de village, l’interaction avec ces personnages virtuels dont l’humeur peut être modifiée à l’aide d’un bouton, nous a poussé à réfléchir sur les « possibles contacts, et les différences, entre la présence théâtrale et la présence virtuelle ». Le jeu immersif d’une pièce dans des conditions si différentes nous a donné une visualisation concrète de l’impact des conditions de jeu sur nos propositions de mise en scène: changements de tons et de postures en fonction des objectifs de chaque scénario (jouer devant des spectateur-rices attentifs ou essayer d’attirer les gens de passage?), des bruits environnants ou de la position abaissée ou surélevée des comédiens par rapport au public.


Performances du passé

D’autre part, au-delà de l’immersion dans l’environnement virtuel, la place de spectateur-rice que peut prendre l’étudiant-e a ajouté un nouvel aspect à l’expérience ARCHAS. L’observation des mouvements de celui qui joue dans le monde virtuel donne des indications complémentaires sur ce qu’aurait pu être la performance des acteur-rices du passé. Ainsi, ARCHAS rend non seulement vie à ces œuvres passées par le biais des interprétations scéniques et textuelles contemporaines, mais également stimule l’imagination historique de celles et ceux qui étudient ces œuvres. L’expérience ARCHAS se place de ce fait dans le croisement ambigu entre l’imaginaire et la scientificité, entre la recherche de véridicité des historien-nes et la liberté créatrice des metteur-euses en scène.


Illustrations: Participante d’ARCHAS dans le rôle du Fol (Présentation des Joyaux); dessins sur une page de la farce manuscrite Janot dans le sac (AEF Littérature 14.1 v; Photo: NW)