On affirme souvent que les interprétations « savantes » des récits littéraires sont celles qui prennent leurs distances avec certains phénomènes relatifs à la pratique « ordinaire » de la lecture tels que l’implication affective dans l’histoire ou une forme de croyance en l’existence des personnages. Si des voix contraires s’élèvent depuis plusieurs années, cette position reste, implicitement ou explicitement, dominante dans les départements de littérature et les programmes de l’école publique.
Le présent essai fait l’hypothèse que la distinction entre lecture « ordinaire » et lecture « savante » est largement caduque, parce qu’aucun discours porté sur une fiction ne peut s’empêcher de proposer une version alternative du monde raconté, version à laquelle il fait semblant de croire. Cela revient à affirmer que chaque interprète se situe discursivement dans une position comparable à celle des personnages, non pas en habitant directement la fiction, mais, indirectement, en la cohabitant.
Aurélien Maignant, Cohabiter la fiction. Lecture ordinaire, univers de croyances et interprétation des mondes littéraires, Lausanne, Archipel Essais, vol. 28, 2020, 144 p.
Fabula propose de lire un extrait de cet ouvrage ainsi que la postface rédigée par Marc Escola, URL: https://www.fabula.org/actualites/a-maignant-cohabiter-la-fiction-lecture-ordinaire-univers-de-croyances-et-interpretation-des-mondes_99536.php