Appel à communication : Mondes imaginaires et univers transmédiatiques

Colloque international organisé par Ugo ROUX, Laurent COLLET, Anne GAGNEBIEN et Alessandro LEIDUAN 

Institut Méditerranéen des Sciences de l’Information et de la Communication (IMSIC) 

Observatoire des Mondes Imaginaires (OMI) 

7, 8 et 9 avril 2020 à Toulon, France

Date limite d’envoi des propositions : 15 février 2020

D’un côté la fiction et le récit occupent une place majeure au sein de la culture dans nos sociétés modernes, et de l’autre les technologies de l’information et de la communication étendent les possibilités de leur production et de consommation. Parmi les diverses formes d’expression des récits qui ont vu leurs logiques changées par cette imprégnation numérique, la transmédialité apparaît comme étant une facette fondamentale (Cornillon, 2018), notamment au sein des industries culturelles.

La notion de transmédia a ainsi été créée pour qualifier les phénomènes d’extension de structures narratives sur de multiples médias « pour créer des oeuvres aux développements transmédiatiques autant qu’intertextuelles et autoréférentielles » (Peyron, 2008, pp. 355-356). Plus généralement, la production de contenus transmédiatiques semble s’articuler autour de trois éléments principaux : 

1. L’extension de l’oeuvre originale sur plusieurs médias ; chaque extension est autonome (elle n’a pas besoin de l’oeuvre originale pour être appréciée et inversement) et contribue par son apport à l’oeuvre globale. 

2. Le monde narratif qui doit idéalement proposer à la fiction la possibilité d’évoluer avec de nouveaux contenus pertinents, ce que Henry Jenkins (2008) qualifie de « worldmaking » ; afin d’assurer sa cohérence lors de son expansion, un univers fictionnel doit se conformer au canon que fixe l’oeuvre dont il est tiré (Saint-Gelais, 2011) ; cette règle tend à s’effacer lorsque cette extension se tourne vers une terra incognita de l’oeuvre de départ (Périer, 2017). 

3. Le public ; la participation de ce dernier est essentielle à mesure que la narration gagne de nouveaux médias ; « il s’agit de miser sur l’engagement des fans et leur goût pour l’approfondissement, ce que Henry Jenkins nomme le forage (drillability) » (Peyron, 2014, p. 53). 

Or, si ce phénomène a fait l’objet d’une cristallisation autour d’une notion partagée chez les chercheurs, les professionnels et (éventuellement) les amateurs de la culture populaire, et même si des propositions de catégorisations ont vu le jour (Cailler et Masoni Lacroix, 2017 ; Groupierre, 2017 ; Ryan, 2017), la définition du transmédia et sa circonscription ne font pas encore consensus. Cette déficience a certainement pour cause le continuum des possibilités induit par « la ductilité du concept de storytelling transmedia proposé par Henry Jenkins. » (Cailler et Masoni Lacroix, 2017). 

Le succès problématique de la narration transmédia

Linda Hutcheon et Siobhan O’Flynn considèrent comme des adaptations transmédia « les recréations, les remakes, les remédiations, les révisions, les parodies, les réinventions, les réinterprétations, les expansions et extensions » (2013, p. 181). Cette idée est cependant réfutée par Henry Jenkins qui 

souligne nettement la différence entre transmédia et adaptation lorsqu’il affirme que l’adaptation ne peut être du transmedia storytelling puisqu’elle n’est que la « re-présentation d’une histoire existante plutôt que l’extension et l’addenda d’un monde fictionnel. » (2009). En accord avec ce dernier, Marie-Laure Ryan voit dans l’activité transmédiatique une hybridation « entre la transmédialité inhérente à l’adaptation, et la capacité de la transfictionnalité à étendre un monde fictionnel. » (2017). 

À la vision de Jenkins, de contenus transmédiatiques dans lesquels les redondances sont à éviter au maximum d’un support à l’autre, s’oppose la notion de « monde transmédial », créée par Lisbeth Klastrup et Susana Tosca, qui intègre la possibilité d’adaptations (Klastrup et Tosca, 2004, 2014 ; Tosca et Klastrup, 2011, 2016). Ces mondes « sont des entités abstraites où l’adaptation d’oeuvres antérieures servant de canon est tout à fait légitime et participe aux processus de constitution de ces mondes » (Di Filippo, 2017 ; Di Filippo et Landais, 2017, p. 14). Ainsi, les mondes transmédiaux reposent sur d’autres critères que ceux du transmédia posés par jenkins : ces mondes se focalisent notamment sur (1) l’arrière-plan narratif qui donne sens à la situation du récit (le Mythos), (2) le cadre géographique et historique où se déroule l’action (le Topos), (3) ce qui définit l’ensemble des valeurs morales de l’univers en question (l’Ethos) et (4) ce qui renvoie aux thèmes, aux motifs et aux types d’intrigues propres à un univers donné (le Tropos, dernier élément ajouté par Isabelle Périer aux trois autres critères proposés par Klastrup et Tosca). 

Parmi les nombreuses logiques redéfinissant le divertissement contemporain, le transmédia (Jenkins, 2013) apparaît comme une notion pivot à questionner ; ce que propose ce colloque « Mondes imaginaires et univers transmédiatiques » organisé par l’Institut Méditerranéen des Sciences de l’Information et de la Communication et l’Observatoire des Mondes Imaginaires. 

Orientations et suggestions de réflexions

Cet appel à communication est ouvert aux approches disciplinaires et méthodologiques plurielles ; les propositions sont libres dans la mesure où celles-ci respectent la thématique du colloque. Aussi, cet appel à communication est ouvert aussi bien aux chercheurs qu’aux acteurs socioprofessionnels ; leurs retours d’expérience sur des projets transmédiatiques sont les bienvenus. 

Les propositions abordant la multiplicité des formes et pratiques d’écriture, les nouveaux usages et fonctions induits par les transmédialités numériques et la manière dont le public s’inscrit dans ces nouvelles logiques, ainsi que la circulation des objets culturels au sein des espaces sociaux seront particulièrement appréciées à partir du moment où la notion de transmédia est questionnée dans une perspective critique. Les évaluateurs seront particulièrement attentifs aux propositions interrogeant la théorie cognitiviste de la fiction (Lavocat, 2016), qui est le présupposé du transmédia. Si un même contenu fictionnel peut migrer d’un média à l’autre, c’est parce qu’il a une « unité » qui est indépendante de toute médiation sémiotique. Schaeffer affirme, dans cette optique, que « toutes les fictions existent sous la forme de contenus mentaux » (1999, p. 212). Mais cet auteur indexe le sens de la fiction sur une attitude mentale spécifique (la « feintise ludique partagée ») qui ne rend absolument pas justice à la fonction que certains spécimens fictionnels (entourés de prestige culturel) ont exercée dans la tradition occidentale : la problématisation du réel, le questionnement des catégories mentales qui rendent intelligible le réel. Toute fiction étant un reflet analogique du monde réel, elle problématise les mêmes catégories qui rendent intelligibles des situations empiriques analogues à celles que son contenu représente. On pourrait se demander alors si les fictions transmédiatiques remplissent encore cette fonction de problématisation. Leur émergence historique ne sonne-t-elle pas le glas de toute problématisation du réel par la fiction ? 

C’est pourquoi nous attendons des contributions qu’elles se saisissent de ce terme de transmédia dans les diverses industries de contenus et les services d’information et de communication comme les 

communications marchandes, la valorisation du patrimoine ou le marketing territorial et qu’elles renvoient à un aspect des problématiques et discussions soulevées dans cet appel. 

Bibliographie

Bahuaud, M. (2013). Transmedia storytelling : quand l’histoire se conçoit et se construit comme une licence. Terminal. Technologie de l’information, culture & société, (112), 77-88. doi : 10.4000/terminal.552 

Cailler, B., & Masoni Lacroix, C. (2017). Temps et espace de l’interactivité, vers une définition de la transmédialité. Revue française des sciences de l’information et de la communication, (10). doi : 10.4000/rfsic.2694 

Cornillon, C. (2018). Sérialité et transmédialité : infinis des fictions contemporaines. Paris : Honoré Champion éditeur. 

Di Filippo, L. (2017). Conan entre personnage transmédia, monde transmédial et réalisations locales. Revue française des sciences de l’information et de la communication, (10). doi : 10.4000/rfsic.2578 

Di Filippo, L., & Landais, É. (2017). Dispositifs transmédiatiques, convergences et publics : construire et penser les relations entre médias. In Penser les relations entre médias Dispositifs transmédiatiques, convergences et constructions des publics. Strasbourg : Néothèque. 

Gambarato, R. R. (2012, septembre). How to Analyze Transmedia Narratives ? Communication présentée à New media : Changing Media Lanscapes, Saint-Pétersbourg, Russie. 

Groupierre, K. (2017). Le transmédia : un dépassement du médium ? Appareil, (18). doi : 10.4000/appareil.2403 

Hutcheon, L., & O’Flynn, S. (2013). A Theory of Adaptation. Abingdon-on-Thames : Routledge. 

Jenkins, H. (2008). Convergence Culture: Where Old and New Media Collide (Updated). New York : New York University Press. 

Jenkins, H. (2009). The Aesthetics of Transmedia: In Response to David Bordwell (Part One). Repéré à http://henryjenkins.org/blog/2009/09/the_aesthetics_of_transmedia_i.html 

Jenkins, H. (2013). La culture de la convergence – Des médias au transmédia (C. Jaquet, Trad.). Paris : Armand Colin. 

Klastrup, L., & Tosca, S. (2004). Transmedial Worlds – Rethinking Cyberworld Design. Proceedings of the 2004 International Conference on Cyberworlds, 409-416. doi : 10.1109/CW.2004.67 

Klastrup, L., & Tosca, S. (2014). Game of Thrones: Transmedial Worlds, Fandom, and Social Gaming. Storyworlds across Media: Toward a Media-Conscious Narratology, 295-314. 

Lavocat, F. (dir.). (2016). Interprétation littéraire et sciences cognitives. Paris : Hermann. 

Périer, I. (2017). Le jeu de rôle, une autre forme de narration sérielle ? Itinéraires. Littérature, textes, cultures, (2016-2). doi : 10.4000/itineraires.3453 

Peyron, D. (2008). Quand les oeuvres deviennent des mondes. Réseaux, (148-149), 335-368. 

Peyron, D. (2014). Les mondes transmédiatiques, un enjeu identitaire de la culture geek. Les Enjeux de l’information et de la communication, 15/2(2), 51-61. 

Ryan, M.-L. (2017). Le transmedia storytelling comme pratique narrative. Revue française des sciences de l’information et de la communication, (10). doi : 10.4000/rfsic.2548 

Saint-Gelais, R. (2011). Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux. Paris: Le Seuil. 

Schaeffer, J.-M. (1999). Pourquoi la fiction ?. Paris : Seuil. 

Servais, O., & Sepulchre, S. (2018). Towards an Ordinary Transmedia Use: A French Speaker’s Transmedia Use of Worlds in Game of Thrones MMORPG and Series. M/C Journal, 21(1). Repéré à http://journal.media-culture.org.au/index.php/mcjournal/article/view/1367 

Tosca, S., & Klastrup, L. (2011). When Fans Become Players: LOTRO in a transmedial world. Ring Bearers: The Lord of the Rings Online as Intertextual Narrative, 46-69. 

Tosca, S., & Klastrup, L. (2016). The networked reception of transmedial universes: An experience-centered approach. MedieKultur: Journal of Media and Communication Research, 32(60), 107-122. doi : 10.7146/mediekultur.v32i60.23362 

Modalités de soumission

Les propositions de communication, en français ou en anglais, comprendront : 

1. Prénom, Nom ; 

2. Titres et fonctions ; 

3. Institutions de rattachement (p. ex. université, laboratoire) ; 

4. Coordonnées de l’auteur (courriel) ; 

5. Un résumé entre 350 et 400 mots ; 

6. Trois ou quatre références bibliographiques ; 

7. Une courte biographie de l’auteur à la troisième personne du singulier (max. 500 caractères espaces non-compris) ; 

8. Une mention « hors-thème » le cas échéant. 

Il est demandé aux auteurs de respecter les normes bibliographiques APA (American Psychological Association) en version française telles qu’elles sont présentées sur le site Internet de l’Université de Montréal : https://bib.umontreal.ca/citer/styles-bibliographiques/apa 

Les références bibliographiques sont en fin de texte et n’apparaissent pas en notes de bas de page. 

Les propositions devront être envoyées sous format *.doc ou *.docx à l’adresse de messagerie suivante : ugo.roux@univ-amu.fr, laurent.collet@univ-tln.fr, anne.gagnebien@univ-tln.fr et alessandro.leiduan@univ-tln.fr. 

Chaque proposition sera accompagnée d’une version entièrement anonymisée (vérifier que l’identité de l’auteur n’apparaisse pas dans les métadonnées). 

Un courriel accusant réception des propositions sera envoyé. 

Les expertises et révisions se feront en double aveugle par un comité scientifique international. 

Comité scientifique international

Raphaël Baroni Pr associé, Université de Lausanne

Anne Besson Pr, Université d’Artois

Mélanie Bourdaa MCF HDR, Université Bordeaux Montaigne, MICA

Rémi Cayatte Dr, Université de Lorraine, CREM

Laurent Collet MCF HDR, Université de Toulon, IMSIC

Laurent Di Filippo MCF, Université de Lorraine, CREM

Michel Durampart Pr, Université de Toulon, IMSIC

Florent Favard MCF, Université de Lorraine, CREM

Anne Gagnebien MCF, Université de Toulon, IMSIC

Jacques Ghoul-Samson Doctorant, Université de Toulon, IMSIC

Anaïs Goudmand Dr, Université de Lausanne

Alessandro Leiduan MCF, Université de Toulon, BABEL

Matthieu Letourneux Pr, Université Paris Nanterre, CSLF

David Peyron MCF, Aix-Marseille Université, IMSIC

Thibault Philippette Dr, Université Catholique de Louvain

Martin Ringot Doctorant, Aix-Marseille Université, CAER

Ugo Roux Dr, Aix-Marseille Université, IMSIC

Marie-Laure Ryan Dr, chercheuse indépendante

Comité d’organisation

Ugo Roux Dr, Aix-Marseille Université, IMSIC

Anne Gagnebien MCF, Université de Toulon, IMSIC

Rémi Cayatte Dr, Université de Lorraine, CREM

Laurent Collet MCF, Université de Toulon, IMSIC

Alessandro Leiduan MCF, Université de Toulon, BABEL

David Peyron MCF, Aix-Marseille Université, IMSIC

Valorisation scientifique

Au-delà d’une publication des actes du colloque (revue ou ouvrage), nous projetons de filmer le colloque afin d’en faire une diffusion à la fois en direct et en différé sur les télévisions sociales. 

Calendrier prévisionnel

Décembre 2019 : Diffusion de l’appel à communication et début de la campagne de communication autour du colloque 

15 février 2020 : Date limite de réception des propositions de communication 

1er mars 2020 : Date de notification d’acceptation ou de refus auprès des auteurs 

1er mars 2020 : Ouverture des inscriptions 

1er avril 2020 : Clôture des inscriptions 

7 avril 2020 : Date limite de réception des règlements d’inscription 

7, 8 et 9 avril 2020 : Colloque 

30 septembre 2020 : Date limite de réception des articles complets 

30 novembre 2020 : Premiers retours d’expertises et début des navettes experts/auteurs 

30 janvier 2021 : Date limite de réception des articles finalisés 

Courant 2021 : Publication des actes du colloque 

Inscription et tarifs

L’inscription au colloque est payante pour les communicant.e.s. Le tarif comprend la participation au colloque, les repas (hors gala), le livre des résumés, les goodies, les pauses café. 

  • Tarif normal : 60 € 
  • Tarif membre de l’OMI ou de l’IMSIC : 40 € (joindre un justificatif) 
  • Tarif réduit doctorant (y compris étudiant) : 20 € (joindre un justificatif) 
  • Repas de Gala : 40 €