Des costumes qui s’effacent et des drames qui émergent

Par Claire Cornaz :

Une critique sur le spectacle :

Les Femmes Savantes / De Molière / Mise en scène de Vincent Bonillo / Théâtre du Grand-Champ / Le 02 et 03 mars 2022 / Plus d’infos.

© Philippe Pache

Le théâtre de Grand-Champ accueille en ce début d’année 2022 la Cie Voix Publique et le metteur en scène Vincent Bonillo, pour une représentation des Femmes Savantes de Molière qui met l’accent sur les conflits secouant cette famille, au nom de la science et de la philosophie.

Habillée de quatre chaises, de paravents et d’un portant à vêtements sur roulettes, la scène se présente d’abord de manière propre et modeste. Pendant la première moitié de la représentation, les comédiens et comédiennes usent des costumes mis à disposition sur le portant et se changent au fil de leurs répliques. Chrysale, le père de famille, retire son costume de travail pour enfiler un jogging ; tandis que les femmes savantes – Philaminte, la mère, Bélise, la tante et Armande, la fille aînée – superposent les tenues, enfilant des robes par-dessus leurs vêtements afin de préparer leur leçon à venir avec le bel-esprit Trissotin. L’hilarité se déclenche lorsqu’enfin cette démonstration a lieu et qu’on peut admirer la manière dont les femmes savantes suivent leur héros, maquillées, les cheveux coiffés de guirlandes et portant des accoutrements excentriques, tout à fait emblématiques de l’absurdité des propos tenus par Trissotin. 

Mais dès lors que cette scène se termine, le portant à vêtements est mis de côté et le rythme soutenu de la comédie laisse place à celui, plus lent, d’un drame familial. Des papiers sont lancés avec colère, des chaises sont déplacées et des ballons éclatés, des paravents poussés à l’annonce du mariage entre Henriette et Trissotin. La propreté qui régnait sur la scène laisse place au désordre qui ronge cette famille et leur demeure.  Les femmes savantes retirent leur maquillage, retrouvent des tenues contemporaines moins extravagantes.  La douleur et le chagrin que peuvent ressentir les personnages se donne à voir, comme lorsque Clitandre et Henriette voient leur mariage compromis, ou lorsque Armande souffre de la relation entre sa sœur et son ancien prétendant. La comédie prend presque des allures de tragédie, Vincent Bonillo mettant l’accent sur les aspects les plus sombres de la pièce.