Le barrage de la Grande-Dixence

Arrêts sur images

Un travail sur les photographies du fonds Hans Steiner a été engagé dans le cadre d’un séminaire interdisciplinaire dirigé par Philippe Kaenel (Section d’histoire de l’art) et François Vallotton (Section d’histoire) au cours du semestre d’été 2007. Suite à ce séminaire, les étudiant(e)s ont poursuivi leurs recherches et nous proposent d’explorer quelques thématiques définies.

Le 3 août 1953, on pose la première pierre d’un chantier d’une ampleur encore jamais atteinte en Valais : le barrage de la Grande-Dixence.

Dès 1922, la société EOS (Energie Ouest Suisse, aujourd’hui Alpic) s’installe en Valais, qui recèle plus de la moitié des glaciers du pays et constitue de fait la plus importante réserve d’énergie hydraulique en Europe. Après avoir acheté quelques petites usines électriques, la société débute les travaux de la première Dixence en 1929, dans le Val des Dix. Ces travaux vont durer 6 ans.

Alors que le second conflit mondial se termine, la demande énergétique augmente considérablement en Europe de l’Ouest et l’important projet de la nouvelle Dixence est mis à l’étude en 1950 par la compagnie Grande Dixence SA, créée pour l’occasion.

Il va s’agir de faire de ce nouveau projet un barrage remplaçant la première Dixence en tirant profit d’autres bassins de captage, la Viège et la Bagne, ainsi que des eaux du barrage de Cleuson.

De 1953 à 1961, ce ne sont pas moins de 6 millions de mètres cubes de béton qui vont être coulés dans le val des Dix, obstruant la Dixence et créant un lac artificiel qui atteint, à la fin de la construction, près de 5 kilomètres de long.

Hans Steiner, visiblement fasciné par cet ouvrage va se rendre à Hérémence pour capturer la construction du barrage sur sa pellicule, comme de nombreux autres photographes. Les 278 photos prises à cette occasion ne sont pas datées, mais l’état d’avancement du chantier permet de circonscrire la période entre 1958 et 1960. En effet, les photos montrent un barrage dans un état avancé, dont de nombreux « étages » sont encore à couler, mais dont la hauteur est déjà imposante. De plus, lors de la visite d’Hans Steiner, le barrage est déjà partiellement rempli, ce qui indique que son passage est postérieur à 1957, année durant laquelle le barrage est mis en service, bien qu’encore inachevé, pour répondre aux besoins pressants de l’économie helvétique en énergie.

Pour résister aux 400 millions de mètres cubes d’eau qui composent son lac de retenue, l’ouvrage se dresse solidement tel un mur de 193m de largeur à sa base et 15m à son couronnement. Le mur vertical montré par les images de Hans Steiner, alors que la pression de l’eau n’est pas encore totale, sera complété en aval par un pan en forte pente.

Ne se concentrant pas seulement sur l’édifice, dont la longueur finale, d’un versant à l’autre, totalisera près de 750m, Hans Steiner photographie également une partie des équipements et des machines. On trouve dans ces planches, pêle-mêle, les bétonneuses et leurs wagonnets suspendus, mais également le bidon de thé porté sur le dos d’un ouvrier, ravitaillant ses collègues. Le photographe fait d’ailleurs de l’ouvrier, souvent casqué et vêtu d’un chaud pull de montagne, son sujet favori puisqu’il lui dédie un bon nombre de prises de vues, souvent lors des pauses.

Le 22 septembre 1961, la dernière benne est vidée sur le couronnement du barrage, mettant un terme au chantier. Le barrage de la Grande-Dixence, érigé à la force de 3000 hommes, peut entrer pleinement en service.

Photographies: © Hans Steiner / Musée de l’Elysée, Lausanne