Session 5 : La co-production de la ville durable

Sous session 5.A. > Agir en faveur d’un urbanisme circulaire : acteurs, instruments de régulation et régimes de production (réseau AménagAu)

Zéro artificialisation nette, zéro gaspillage et préservation des ressources planétaires, neutralité carbone… Ces grands objectifs en vue de la transition énergie-climat appellent une relation nouvelle entre, d’un côté, l’aménagement et l’urbanisme et, de l’autre, la circularité des ressources, comprise comme un principe de réduction des émissions et de réutilisation des matériaux, des déchets.

Ainsi la notion de recyclage urbain et immobilier s’installe dans le paysage des pratiques de l’aménagement et de l’urbanisme. Elle désigne des opérations de conversion de sols et bâtiments vacants. Les pressions législatives s’accélèrent aussi en faveur de la prévention, du tri, recyclage, réutilisation ou réemploi des déchets. On peut penser, sans exhaustivité, aux déchets du BTP, aux eaux usées, aux déchets ménagers (plastique, carton, verre…) ou encore aux terres polluées.

Cela met en jeu les équipements immobiliers, le réaménagement d’espaces publics et privés, également celui des espaces ouverts, en particulier les espaces verts et plus largement ce que l’on pourrait appeler les infrastructures environnementales circulaires afin de rendre possible une approche circulaire de la transformation et de la gestion urbaines. Cela ne va pas sans interroger les relations de coopération et les réseaux de coordination entre entreprises, administrations publiques, communautés locales, concepteurs et expertises, investisseurs.

Cette session souhaite réunir et mettre en discussion des travaux autour de trois grandes directions :

  • D’une part il s’agira d’explorer le phénomène à partir d’études de cas qui seront analysées sous l’angle des acteurs parties prenantes, des problèmes rencontrés, des choix spatiaux opérés, des outils opérationnels et des instruments de régulation.
  • D’autre part, on pourra interroger en quoi– la circularité – comprise comme nouvelle doctrine, reproblématise les paradigmes de l’aménagement et de l’urbanisme comme disciplines et pratiques de transformation des espaces.
  • Enfin, on pourra explorer les contradictions et compromis suscités par les frottements entre nouveau et anciens régimes de production de la ville : un urbanisme de la circularité s’affirme alors que les préceptes et pratiques d’un urbanisme de l’expansion perdurent.

Sous session 5.B. Susciter la ville inclusive (réseau Aménagau)

L’urbanisme inclusif est considéré comme une approche qu’on peut qualifier de socio-écologique et qui fait de plus en plus son chemin actuellement. Que ce soit la question de l’inclusion des personnes vulnérables  dans l’accès en toute sécurité à l’espace public et leur accessibilité aux divers espaces et services publics (femmes, personnes âgées ou en situation de handicap, enfants, personnes itinérantes, personnes immigrantes, réfugiés, etc), les pouvoirs publics tentent d’élaborer des politiques et des programmes en faveur de la justice spatiale et du droit à la ville pour rencontrer les besoins de leur population à travers les principes de l’inclusivité des territoires.

Comment et avec quels outils, les villes et les communes (municipalités de petites et moyennes dimensions) prennent-elles en considération en toute équité, les besoins de tous les citoyens et citoyennes dans l’aménagement des espaces publics ? De quelle manière et avec quels outils, les diverses parties prenantes se donnent les moyens d’y arriver ? Quels sont les freins et les obstacles qui demeurent ? Que fait la société civile pour suppléer aux déficiences des politiques publiques ? Quelles innovations et expérimentations porte-elle ? En quoi ses actions sont-elles sources d’inspiration ?

Le thème de l’urbanisme inclusif se veut donc une espace de réflexion, de partage et de discussion sur les réalités spatiales vécues, perçues et conçues (Martin, 2006 ; Lefebvre, 1974) des divers groupes de population ayant des besoins particuliers, tels qu’identifiés dans les travaux de chercheur.es depuis ces dernières années (Paré et Mounier, 2022 ; Pham et al., 2019 ; Louargant, 2015; Côté et Andrew, 2013 ; Paquin, 2006).

C’est aussi un changement potentiel de paradigme pour penser la fabrique de la ville, qui incite à changer de regard, à croiser plus que jamais les expertises et à envisager autrement les espaces partagés.

Le contenu de cette session devrait s’inscrire dans un renouvellement de la pensée pour une fabrique urbaine plus juste. Les suites de ces riches échanges et discussions pourraient bien donner également lieu à la création d’outils de l’urbanisme permettant l’émergence de villes et territoires plus inclusifs, où chercheur.es, praticien.nes, acteurs/trices communautaires, professionnel.es et jeunes chercheur.es pourraient contribuer par leur savoirs et expériences, pour une meilleure inclusivité des territoires.

Sous session 5.C. Jouer avec l’urbanisme de l’incertitude. Contextes, démarches, objets

D’une certaine façon, tout exercice de conception urbaine constitue une tentative de composer avec l’incertitude. Les pratiques d’urbanisme peuvent essayer (a) de la maitriser en assignant des usages et des fonctions aux espaces et matérialités urbaines (urbanisme de programme) ; (b) de l’intégrer à travers des processus plus ou moins souples vis-à-vis des évolutions et des besoins futurs (urbanisme de projet) ; ou bien (c) de l’instrumentaliser en recourant à l’expérimentation, au test et au prototypage sans nécessairement s’inscrire dans le temps long de la ville (urbanisme tactique et/ou éphémère). A l’heure de l’anthropocène et des crises à répétition qu’on lui attribue, l’enjeu pour l’urbanisme serait désormais de transformer l’incertitude en « opportunité ». En dépassant les tentations de maîtrise/intégration/instrumentalisation, il s’agirait plutôt de la catalyser en plaçant l’agilité, l’indéfinition et la dérive au cœur des processus de conception urbaine, sans pour autant abandonner l’objectif de générer des transformations socio-spatiales souhaitables. En ce sens, la notion même de « projet » doit être repensée pour favoriser une véritable approche écosystémique et inclusive des territoires, permettant de naviguer entre des connaissances expertes et l’énonciation d’une expérience sensible du vivant (humain et non-humain) toujours incertaine. Aussi nous interrogerons-nous ici sur cette forme renouvelée d’ « urbanisme de l’incertitude », à travers (1) ses conditions d’émergence (contextes) ; (2) ses postures, ses approches et ses ressources (démarches et outils) ; et (3) ses réalisations matérielles (objets, artefacts et produits urbains).

Sous session 5.D. Accompagner l’aménagement et l’urbanisme par la participation publique

La participation du public aux décisions d’aménagement du territoire et d’urbanisme est devenue au cours des dernières décennies un nouvel impératif de l’action publique urbaine, ce qui a donné lieu au déploiement d’une multitude d’expérimentations. Cet accroissement des pratiques participatives amène une interrogation récurrente sur l’impact des dispositifs de participation sur les décisions et les actions publiques, ainsi que sur les processus décisionnels en général. L’objectif de cette sous-session est de s’interroger sur les pratiques participatives sous l’angle de ses effets sur le contenu des exercices de planification et les modes d’élaboration des politiques urbaines. Elle vise à mieux comprendre les effets des pratiques participatives sur l’action publique urbaine et les pratiques d’aménagement et d’urbanisme. Cette sous-session s’intéressera également aux possibilités de transfert de politiques, d’institutions, d’instruments et de « bonnes pratiques » en matière de participation publique dans le champ de l’aménagement et de l’urbanisme. Ce sera l’occasion de réfléchir au renouvellement des pratiques aménagistes et urbanistiques dans un contexte de grandes transformations socioécologiques.

Sous session 5.E.  Intégrer les récits et les imaginaires

Qu’est-ce qu’une métropole ? Un périmètre institutionnel, un amoncellement de réseaux et de flux, une concentration hors-norme de fonctions urbaines supérieures, d’activités, d’habitats humains et non-humains. Tout cela à la fois. Mais une métropole, c’est également un espace sensible et vécu, la rencontre physique (infrastructures), géographique (hydrographie, topographie) et symbolique (représentations) de plusieurs échelles (paysagères, d’usage, etc.) et le résultat d’une tension permanente entre ordinaire et spectaculaire, local et global, vivant et non-vivant. Comment planifier et projeter une telle complexité autrement qu’en la racontant. Si, depuis une trentaine d’années, le récit s’est effectivement imposé comme l’un des outils privilégiés de la fabrique territoriale, quid des narrations métropolitaines à l’heure des transitions ? Le récit constitue la matière à partir de laquelle une vision planificatrice, un projet, une expérimentation peut se développer voire même de se dire a posteriori. Dans un monde anthropocentré, ce sont naturellement les récits humains (ceux des habitants notamment) qui s’énoncent et guident l’action. Dans un monde en transition, les fictions non-humaines (au travers des différents “parlements” de rivière par exemple) tiennent une place tout aussi importante et sont également mobilisées pour faire projet. A y regarder de plus près, qu’il s’agisse de défendre une orientation d’aménagement ou bien de clarifier les propositions de telle ou telle partie prenante, humaine ou non, les projets urbains et/ou territoriaux n’ont jamais été aussi bavards. Dimension performative de l’action collective qu’il nous faut prendre très au sérieux tant il est vrai que les histoires que les acteurs racontent ont des effets sur celles qu’ils construisent. Aussi, proposons-nous trois focales dans le cadre de cette session :

  • la première s’intéresse aux nouveaux « récitants » des territoires métropolisés. Il s’agit plus spécifiquement d’approcher les mises en récit du vivant, de saisir les dispositifs de mise en dialogue des humains et des non-humains qui précèdent, accompagnent ou succèdent la production des documents d’urbanisme, leur mise en œuvre et les réalisations qui en résulte ;
  • la deuxième se penche sur les renouvellements de la prospective territoriale initiés par les approches narratives des transitions. En tant que modalité d’exploration des mondes possibles (quoique fictifs), les récits s’offrent comme des leviers d’exploration des devenirs vraisemblables (ou du moins nécessaires) aux, ou rendues possibles par, les transformations à venir. De ce point de vue, les territoires de l’anthropocène proposent et génèrent pléthores de fictions – que la ville soit post-carbone, verte ou morte, etc. ; scénarisations prospectives encore peu renseignées mais pourtant à l’origine de nombreuses formes d’action publique ;
  • la troisième focale cible la transformation des imaginaires narratifs actuellement à l’œuvre. Les visions territoriales à l’origine des documents d’urbanisme, des stratégies de mise en œuvre et des projets urbains sont souvent de nature politique ; elles spatialisent un état souhaité de la société. Elles s’alimentent d’imaginaires que la métropole en régime de transition ébranle ou renverse. Quels sont-ils ? Comment ces imaginaires nourrissent les propositions et productions des professionnels de l’aménagement ?