Le développement alternatif comprend une série de courants alternatifs au développement par l’économie de marché. En effet, pour que l’on puisse parler de développement alternatif, il faut qu’il y ait une vision normative dominante du développement. Cette vision normative est celle qui domine depuis bientôt soixante ans. Le discours d’investiture du président Truman en 1949 marque le début historique du développement tel qu’on le connaît généralement: les pays développés du Nord doivent aider les pays sous-développés du Sud en instaurant l’économie de marché et la démocratie à n’importe quel prix. Cette vision n’ayant pas plu à tout le monde, d’autres mouvements ont tenté de proposer d’autres modes de développement, c’est ce que nous allons survoler ici.
Les théories alternatives du développement
« Le développement » ou le monde selon l’Occident
Le discours d’investiture du président Truman en 1949 marque donc le début de ce qu’on appelle le « développement ». En effet, ce discours contient tous les éléments qui ont poussé les organisations internationales à penser le développement tel qu’il est aujourd’hui: instaurer une économie de marché, sauver les peuples vivant dans des pays non-démocratiques, pousser à la croissance économique et au progrès technologique: en somme, faire du monde une copie de ce que les États-Unis étaient en ce temps-là où le progrès était la seule obsession présente dans toutes les têtes. Mais c’était sans penser au fait que peut-être, certains ne seraient pas d’accord avec cette vision du monde.
La conférence de Bandung (18-24 avril 1955)
Cette conférence réunit vingt-neuf représentants de pays d’Afrique et d’Asie. Elle se prononça sur son non-alignement à l’un des deux blocs de la guerre froide. C’est l’apparition des pays du Tiers-monde, c’est-à-dire ceux qui ne soutiennent ni les États-Unis, ni l’Union Soviétique. C’est une des premières fois qu’ils ont la parole sur le plan international et ils en profitent pour marquer leur indifférence face à ce conflit censé changer la face du monde. Cette conférence finit par condamner toute colonisation et tout impérialisme, par proclamer la neutralité des pays participants ainsi qu’un accord de coexistence pacifique entre eux. C’est la première critique au développement universaliste proposé par Truman.
Théories de la dépendance
Cette théorie est une théorie développée dans les années 1960 par des intellectuels sud-américains. Elle propose l’idée que les pays industrialisés du nord, ont mis en place et alimentent une certaine politique économique faisant en sorte que les pays en développement restent toujours dépendants économiquement. Cette théorie résulte d’une vision bien connue de l’histoire, qui dit que les plus riches ont besoin que les plus pauvres restent pauvres pour pouvoir, eux, rester riches. Le problème du sous-développement serait d’abord causé par les restes de la colonisation, qui font que les anciens pays colonisateurs gardent des avantages face à leurs anciennes colonies. Ensuite, l’autre cause est le pouvoir technologique qui est entre les mains des pays industrialisés et dont ils maîtrisent complètement la portée. Ces théories rejoignent parfois les théories néo-marxistes et proposent parfois la solution de la « déconnexion » des pays en développement du système mondial.
Le développement par le bas
Ces théories sont nées dans les années 70 devant le constat de l’incapacité de venir à bout de la pauvreté dans le monde à travers le développement économique pour. La pauvreté devient alors un objet analytique à part entière, et le principe de ces théories du développement par le bas propose des solutions dans lesquelles les bénéficiaires seront également acteurs de leur développement économique. Il s’agit donc d’encourager la pauvreté à s’éradiquer d’elle-même. Ce sont à nouveau des théories développées en Amérique du Sud.
Toujours dans les années 1970, la croissance est remise en question aussi par Ernst Schumacher, qui propose de repenser les échelles et les finalités de l’activité économique.
Développement durable
Le développement durable propose une alternative à l’industrialisation des pays en développement. En effet, si le monde entier tournait autant que les pays dits « développés », le problème écologique serait encore plus important aujourd’hui. C’est pour cela qu’il est important de relever que toute proposition de développement consciente et respectueuse de l’environnement peut être comprise comme une alternative au développement classique.
Les objectifs du millénaire
Les objectifs du millénaire, bien qu’énoncés dans le cadre d’une assemblée de l’ONU, font partie de ce que l’on peut appeler « développement alternatif ». En effet, au vu des problèmes rencontrés dans le développement économique, ces objectifs ont l’avantage de recentrer les efforts qui doivent être produits sur des notions plus terre à terre que l’industrialisation et l’essor de l’économie de marché, comme la réduction de la pauvreté et de la mortalité infantile, l’amélioration de l’éducation et de l’égalité homme-femme, le souci de l’environnement et le traitement des pandémies. Ces objectifs sont certes quelque peu utopistes, mais ils ont le mérite de replacer les problèmes humains au centre de la problématique du développement.
Le BRICS: vers un nouveau paradigme
La plupart des critiques qui ont été émises quand au développement normatif concernent le fait que celui-ci fait partie de l’hégémonie ancienne qu’ont les pays développés sur les pays en développement. Il y a quelques années, les plus riches parmi les pays en développement ont commencé à collaborer pour tenter d’améliorer le développement depuis l’intérieur. Ce groupement de pays, BRICS, comprend cinq pays: le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud. Ces cinq pays ayant une économie relativement stable et des richesses intéressantes ont décidé de poser des alternatives au monopole de l’aide que détiennent les pays occidentaux. Par exemple, en 2013 ils ont par exemple essayé de créer un fond d’aide à ces pays, la Banque des BRICS, pour pouvoir prêter de l’argent à des taux plus avantageux par rapport à la Banque mondiale et aux autres institutions de Bretton-Woods.
Un des acteurs phare des BRICS est la Chine. En effet, elle est aujourd’hui, bien qu’officiellement toujours en développement, la deuxième puissance économique mondiale. Ce statut lui permet plus de liberté sur le plan géopolitique. C’est ainsi qu’elle ne se gêne pas pour proposer son aide aux pays moins développés à des conditions plus avantageuses que les pays occidentaux. La Chine est alors devenue incontournable dans le monde du développement. Que ce soit en Asie du sud, en Afrique ou en Amérique du sud, la Chine place ses pions sur l’échiquier international en proposant un nouveau modèle de développement, moins engagé politiquement et peut-être plus efficace économiquement.
Bibliographie commentée
Rist, G. (2013). Le développement: histoire d’une croyance occidentale. Paris: Presses de Sciences Po.
Cet ouvrage est le meilleur survol existant de l’histoire du développement et de ses alternatives. Adepte des études postcoloniales, l’auteur nous emmène à travers l’histoire et à travers la discussion interminable ayant pris forme autour de ce concept et des différents moyens d’arriver à améliorer les conditions de vies des pays les plus en difficulté. Cet ouvrage permet une vue d’ensemble parfaite de toute cette problématique.
Références bibliographiques
Castel, O. (2002). Le sud dans la mondialisation: quelles alternatives? Paris: La Découverte.
Rist, G. (2013). Le développement: histoire d’une croyance occidentale. Paris: Presses de Sciences Po.
Projets de recherche
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