La possible impossible maison

La possible impossible maison

De Forced Entertainment / Traduction française Aurélie Cotillard / Mise en scène Tim Etchells / Théâtre de Vidy / du 6 au 15 octobre 2015 / Critiques par Valmir Rexhepi .


6 octobre 2015

Regard d’enfant

©Vlatka Horvat

Entrer dans une maison, puis sortir. Dans l’intervalle, une quête. C’est le programme auquel le spectateur est invité dans La possible impossible maison. Mais on ne sait quand on est entré et si l’on est sorti. Ingénieux, immersif, le spectacle touche bien au-delà du public visé.

Venu de l’autre côté de la Manche, le premier spectacle pour enfant du collectif Forced Entertainment est transposé à Vidy dans la langue de Molière. Au-delà de la recréation, c’est à une récréation scénique que s’adonnent les comédiens (Judith Goudal et Alain Borek), et à laquelle participe le public. Un public d’enfants : ils ont entre 20 et 80 ans. Quelques-uns, une minorité, semblent plus jeunes.

Les comédiens entrent. Ou sont-ce déjà les personnages ? Les prénoms traversent les niveaux de fictionnalité. Alain sera notre guide, Judith, « l’ambianceuse ». Les rôles sont donnés, le jeu peut commencer. L’espace de ce jeu déborde de la scène, ou plutôt la scène s’étend jusqu’à la dernière rangée où quelques ingénieurs projettent des images qu’Alain réceptionne sur des panneaux. La possible impossible maison, dans laquelle nous sommes invités à entrer, ne s’offre au regard que par l’icône arrêtée sur le carton. Puis on y pénètre par l’oreille et par l’imagination: le guide raconte ce que nous y faisons, donne sa voix aux personnages projetés. Judith produit les bruits de nos possibles impossibles déambulations et rencontres.

À quoi joue-t-on ? Une succession de couloirs débouche enfin sur une table. Sur la table, un livre dans lequel une petite fille dessinée nous demande de retrouver, quelque part dans la maison, une araignée dessinée. Ce sera une quête, presque chevaleresque, arthurienne. Il faudra trouver l’araignée, sans perdre le fil. Et puis, l’histoire s’achèvera ; du moins c’est ce que dira Alain. Mais lequel ? On applaudit, sans trop d’assurance. On sort comme on est entré : dans le doute. Non pas ce doute d’adulte qui tient de la suspicion, du besoin de distinguer le possible de l’impossible. Mais un doute d’enfant, placé entre un possible et un autre possible, entretenu par un dispositif scénique qui floute les frontières des niveaux de parole. Plus qu’un spectacle pour enfants, La possible impossible maison fabrique des regards d’enfants.

6 octobre 2015


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