A. Kaupp – Modèles de catéchèse paroissiale en Allemagne. La contribution des familles à la catéchèse – 2018

Pour citer cet article : Kaupp, A. (2018). «Modèles de catéchèse paroissiale en Allemagne. La contribution des familles à la catéchèse», Les Cahiers de l’ILTP, mis en ligne en mai 2018 : 13 pages. Disponible en libre accès à l’adresse : https://wp.unil.ch/lescahiersiltp/2018/05/a-kaupp-modeles-de-catechese-paroissiale-en-allemagne-la-contribution-des-familles-a-la-catechese-2018/

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Modèles de catéchèse paroissiale en Allemagne.

La contribution des familles à la catéchèse

Angela Kaupp[1]

«La transmission de la foi suppose que les parents vivent l’expérience réelle d’avoir confiance en Dieu, de le chercher, d’avoir besoin de lui, car c’est uniquement ainsi qu’un âge à l’autre vantera ses œuvres, fera connaître ses prouesses (cf. Ps 145,4)» (Amoris laetitia, n. 287)[2].

Par la publication de son écrit «?Amoris Laetitia?» en 2016, le pape François a contribué au fait que dans la catéchèse aussi le thème de la «?famille?» comme lieu de la transmission de la foi ait été remis à l’ordre du jour. La contribution suivante donne un aperçu des modèles d’une catéchèse pratiquée avec et dans des familles dans des paroisses en Allemagne. Souvent les formes données à la catéchèse familiale sont liées à la préparation à la communion des enfants et de ce fait diffèrent des formes de travail familial pratiquées chez les protestants. De plus, comme la situation ecclésiale en Allemagne diffère structurellement de celle des pays francophones, l’exposé suivant ne se réfère qu’à des publications catéchétiques issues de la sphère catholique qui ont été publiées en Allemagne.[3]

1. La catéchèse en Allemagne

L’enseignement religieux est en Allemagne une matière d’enseignement inscrite normalement aux programmes de l’école. L’enseignement religieux à l’école et la catéchèse en paroisse sont considérés comme deux lieux d’apprentissage différents, qui doivent se compléter mutuellement.[4] Aussi, convient-il d’expliquer brièvement l’emploi du concept de «catéchèse» en Allemagne.[5]

Comme conséquence de la théologie de Vatican II (1962-1965) de l’Église catholique, et en fonction de la situation ecclésiale et sociétale, il s’est développé dans la théologie germanophone, suite aux Synodes des diocèses en République fédérale allemande (1971-1975), une conception de l’Église qui s’est cristallisée dans la notion de «Communauté»[6]. Le terme «communauté» désigne un projet qui, sur la base du sacerdoce commun de tous les fidèles (Lumen Gentium, n° 10)[7], s’appuie sur l’égalité en dignité de tous et, par ce biais, sur l’être sujet de l’ensemble des fidèles en tant que fondement de la vie ecclésiale concrète.[8] Tandis que la communauté est regardée comme une valeur théologique, on comprend sous le mot «paroisse» une entité purement administrative (et donc définie selon le droit canon).

La communauté est regardée non seulement comme le lieu du vivre ensemble, mais aussi comme l’espace indispensable de l’apprentissage de la foi.[9] Le but catéchétique à portée fortement anthropologique consiste à «aider l’être humain à réussir sa vie en la plaçant sous le regard et dans la présence de Dieu»[10]. Il se décline selon les grands axes de l’être ecclésial que sont la marturia, la diakonia, la leitourgia et la koinonia dans lesquels la découverte de la foi, l’initiation à la vie chrétienne et à la pratique de l’Évangile se réalisent.

Aussi le concept de «catéchèse paroissiale» a-t-il fait son apparition. Il désigne «les processus d’apprentissage de la foi chrétienne, qui sont à la fois entrepris de manière consciente, structurés en partenariat, orientés vers le parcours de vie et limités dans le temps; ils sont organisés sous la responsabilité de la communauté, avec la participation de catéchètes bénévoles»[11]. La catéchèse cherche à introduire dans l’être-chrétien et dans la vie de l’Église, dans le cadre de processus d’apprentissage organisés et structurés. Elle veut contribuer à ce que «ceux qui désirent s’approcher de l’Évangile parviennent à une foi réfléchie»[12]. De tels processus catéchétiques sont mis en œuvre selon des formes d’apprentissage communicatives, créatives, méditatives et orientées vers l’action. Les «fidèles dans leur ensemble»[13] sont, selon le Synode, les porteurs de la catéchèse et les responsables de la transmission de la foi. Cela se réalise particulièrement là où des chrétiens adultes s’engagent comme catéchètes. Les modèles qui seront présentés ici sont enracinés dans cette compréhension de la catéchèse.

2. La famille et la transmission de la foi

Les mutations sociales ont conduit à des modifications dans tous les champs de l’existence: non seulement le monde du travail et l’importance de l’Église, mais aussi les structures familiales et la répartition des rôles au sein des familles se sont modifiés. «Les Églises chrétiennes perçoivent le tournant de la modernisation comme un mouvement de rupture dans lequel les familles sont engagées; elles portent le diagnostic d’un affaiblissement des traditions religieuses et des processus de transmission entre les générations, ainsi qu’une disparition croissante de la famille en tant qu’instance de socialisation religieuse.»[14]

Tandis que jusqu’au milieu du 20e siècle, du fait de l’association entre Église et famille, la socialisation religieuse des enfants avait lieu pour ainsi dire au quotidien, le lien entre famille et religion est à considérer aujourd’hui de manière plus différenciée.

Christian Hennecke distingue pour l’Allemagne quatre types religieux de parents (qui coexistent les uns avec autres) avec des différenciations régionales (différences entre l’Allemagne du Nord et du Sud, de l’Est et de l’Ouest) et qui ont des attaches diverses avec l’Église.

  • 1re génération: elle est marquée par un modèle de «l’Église pour tous» («volkskirchlich»), conduisant parents et enfants à aller ensemble à l’Église.
  • 2e génération: les parents envoient leurs enfants à l’Église, mais n’ont eux-mêmes aucune pratique ecclésiale.
  • 3e génération: les parents n’envoient pas leurs enfants à l’Église, mais disposent eux-mêmes de connaissances et de valeurs chrétiennes de base.
  • 4e génération: les parents et les enfants sont ensemble distants de l’Église.[15]

Pour la quatrième génération, il pourrait exister une différence entre ceux qui disposent de connaissances chrétiennes, acquises par le biais d’un enseignement religieux scolaire, et ceux qui n’ont pris part à aucun enseignement religieux. Les réflexions suivantes portant sur la catéchèse familiale se réfèreront à ces quatre générations.

Cependant, la famille reste indispensable pour la socialisation religieuse des enfants et la formation de leur identité.[16] Les résultats des recherches établissent que les parents et les autres membres de la famille sont de grande importance pour le développement religieux et que, malgré la baisse de la fréquentation des Églises, les familles transmettent la religion jusqu’à aujourd’hui.[17] Ulrich Schwab dépeint de tels processus de transmission sur trois générations qui conduisent à une religiosité familiale spécifique («une religiosité des familles»[18]). En particulier, ce sont les attitudes et les valeurs chrétiennes que la famille transmet. Martin Friedrich Schomaker a analysé l’importance des familles pour les processus catéchétiques d’apprentissage, ainsi que la place des parents et des grands-parents pour le développement moral des enfants[19]. Regina Sommer a pu constater que les formes religieuses apprises en famille sont une aide pour la pratique d’une religiosité personnelle — souvent éloignée de l’Église.[20]

Les familles contribuent donc à la mise en œuvre de processus de transmission religieuse. Toutefois, la «religiosité familiale» évolue à distance de l’enseignement de l’Église et des formes de pratique de la foi ecclésiales.[21] La religiosité des familles est peut-être influencée par l’Église, mais n’est pas ecclésiale.

2.1. Un exemple pour une «religiosité familiale»

La célébration de la fête de Noël en famille est, pour l’Allemagne (et éventuellement aussi pour l’Autriche et la Suisse alémanique), un exemple type de «religiosité familiale». Même dans un contexte postchrétien, Noël est non seulement célébré dans la plupart des familles, mais est la plus importante fête familiale de l’année. Dans les familles, il se produit un mélange entre des usages chrétiens ou à connotation chrétienne et des traditions familiales. La fête chrétienne de la nativité d’un enfant dans une famille sert de repère pour la construction ou reconstruction annuelle de chacune des familles — compte tenu également des nombreux changements (naissance, décès, séparation).[22] Les traditions ecclésiales jouent un rôle dans la mesure où elles correspondent aux traditions familiales, ou les renforcent. Ainsi, les enfants découvrent aujourd’hui encore des restes de traditions chrétiennes. Mais une réflexion à leur propos fait la plupart du temps défaut.

3. Modèles de travail catéchétique avec des familles ou des parents

Plutôt que de nous plaindre de la situation religieuse des familles, il est plus opportun de concevoir l’offre catéchétique de telle sorte que les familles puissent y trouver une aide pour leur vie et leur quête de sens. Aussi, les modèles catéchétiques doivent se laisser interroger en permanence sur leur capacité de tenir compte de la situation religieuse des familles d’aujourd’hui, et sur leur aptitude à mettre en relation la vie familiale avec la praxis de foi ecclésiale. Il importe que les personnes responsables de la catéchèse dans le cadre de la catéchèse pour les parents prennent conscience que l’approfondissement ainsi de leur foi par des adultes et que cela est significatif pour l’aspect religieux de la vie en famille, est une chance. Les parents ne doivent pas être instrumentalisés pour la catéchèse de leurs enfants. Les modèles suivants montrent qu’il existe de multiples chemins praticables dans un travail avec des familles, avec des adultes qui sont des parents.

3.1. La préparation de l’accueil par le baptême

Dans de nombreux endroits, la catéchèse baptismale se vit dans des groupes de parents, de façon à ce que la préparation au baptême des enfants soit plus qu’un simple échange avec le prêtre, destiné à établir le déroulement de la célébration. Une équipe de pères et de mères prépare ainsi un groupe de quatre à six couples durant une série d’environ quatre rencontres en soirée. Au plan thématique, l’accent est mis sur le rôle nouveau des parents, sur la signification du baptême et sur sa préparation. Souvent la célébration se vit de manière communautaire, et les familles sont invitées les années qui suivent à des journées des familles[23]. Bien que ce modèle ait été déjà mûri depuis environ vingt ans, il n’est encore mis en œuvre que dans un petit nombre de communautés. De sorte qu’on perd ainsi une chance de mettre ensemble en dialogue des parents et, déjà avant l’âge de l’école des enfants, d’aborder en commun des thèmes de foi et peut-être de former de nouveaux liens communautaires dans la foi. Les différentes «générations de parents» pourraient en effet s’enrichir mutuellement à ces occasions.

3.2. La préparation à la réception de la première communion, avec participation particulière des familles

Depuis les années 1970, ce sont surtout les mamans — et rarement les papas — des enfants de la première communion qui sont engagées dans cette catéchèse[24]. Elles animent les groupes d’enfants pour la préparation de la communion en tant que catéchètes, et les enfants font l’expérience de leurs mamans en tant de témoins de la foi. En outre, les parents sont invités à des soirées qui leur sont dédiées. Celles-ci oscillent entre offres de formation de la foi pour adultes et pure discussion sur les questions d’organisation de la première communion. Depuis les années 1990, on observe que beaucoup de parents n’appartiennent plus à la première génération, mais à la deuxième ou troisième génération. De plus, les modifications des conditions de travail (ouvertures prolongées des magasins, activités professionnelles des deux parents, etc.) réduisent les possibilités d’engagements bénévoles. Cela a pour conséquences que le nombre de catéchètes diminue et que beaucoup de parents se sentent moins concernés. Pour faire face à la distance prise par les parents au plan religieux, des modèles ont été développés déjà dans les années 1970, pour confier une partie de la catéchèse aux parents eux-mêmes[25]. Deux modèles doivent brièvement être esquissés:

  1. Dès les années 1990, ce modèle de préparation a été appliqué par Elsbeth Bihler[26] à la première communion. L’idée de base est l’orientation vers l’année liturgique et la liturgie. Les parents doivent prendre en charge une partie de la préparation des enfants en priant avec eux, en dialoguant sur les textes bibliques et en mettant sur pied des liturgies et des fêtes personnalisées en famille. Le modèle de famille qui correspond est celui de la famille classique. Il est intéressant de noter qu’au cours de l’histoire, c’est la grand-maman qui, selon le livre familial, conduit les dialogues sur la foi avec l’enfant[27]. De toute évidence, ce modèle correspond à des parents de la première génération?; pour la deuxième génération, il devient difficile à appliquer; et les parents appartenant à la troisième ou quatrième génération ne voudront ou ne pourront pas remplir ces attentes.
  2. Depuis bien une vingtaine d’années, le modèle de la «catéchèse familiale» a été répandu en Allemagne par Albert Biesinger[28]. L’idée de départ s’appuie sur le modèle né au Chili de la catequesis familiar[29]. C’est le dialogue sur la vie quotidienne et la foi en famille qui est placé au centre. En outre, des temps forts de la vie familiale sont pris en compte comme certains événements telle la première communion. Le but est de stimuler «la communication de la foi familiale et la responsabilité des parents pour l’éducation religieuse»[30]. À côté des dialogues en famille, des rencontres pour les groupes d’enfants et de parents sont proposées, qui fournissent également un soutien pour les dialogues en famille. Toutefois, on peut se demander si vraiment des dialogues aussi exigeants quant à leur contenu que sur des thèmes comme les disputes en famille ou l’eucharistie sont menés dans des familles où une pareille culture du dialogue n’est pas habituelle. Lorsque des parents appartiennent à la deuxième jusqu’à la quatrième génération, et que dans leur famille ils n’ont jamais auparavant parlé de questions de foi, le danger existe que de tels dialogues paraissent artificiels. Des parents des troisième et quatrième générations se sentent dépassés, pour autant qu’ils ne s’investissent pas intensément dans le cadre de la catéchèse pour ces questions religieuses. Il faut aussi vérifier dans quelle mesure ces modèles tiennent compte de la situation de familles monoparentales.

3.3. Catéchèse intergénérationelle ou de décloisonnement des générations/ Generations of Faith (GoF)

Développés originellement aux États-Unis des modèles de catéchèse intergénérationnelle ont été répandus en Allemagne par Bernd Lutz et Christian Hennecke[31]. Jusqu’à présent, ils sont davantage pratiqués dans le nord de l’Allemagne (archevêché d’Hambourg, diocèse d’Osnabrück) et dans l’archevêché de Cologne, mais moins dans le Sud. En Suisse (Zurich), le modèle s’appelle «catéchèse enjambant (ou décloisonnant) les générations»[32]. La présentation idéale de la catéchèse intergénérationnelle consiste à offrir dans la communauté des rencontres catéchétiques sur différents thèmes s’adressant à des personnes de tous âges: «Tous ensemble se rencontrent comme peuple de Dieu et grandissent ensemble dans leur cheminement»[33]. On ne présuppose plus que les personnes doivent ensuite être insérées dans des communautés existantes, mais qu’un espace de communauté naît grâce à la rencontre elle-même. Ici, un tel modèle se distingue des autres décrits jusqu’alors, dont le but est l’intégration dans des structures existantes. À mon avis ces réflexions méritent une attention particulière, car elles peuvent apporter une contribution dans le contexte de la restructuration actuelle de nombreuses paroisses.

Generations of Faith (GoF) comprend la catéchèse comme un apprentissage et une croissance permanente de la foi, durant toute la vie. Cela peut éviter à la fois le «non-désapprentissage» de la vie par les enfants (s’ils sont entre eux) et une «fausse réduction de la catéchèse à l’espace familial»[34]. Car une orientation exclusivement vers les familles passe à côté, par exemple, «de personnes isolées dans la foi qui ne trouvent ni dans leur famille ni dans leur entourage d’autres personnes intéressées par la recherche spirituelle». Notamment cela vaut aussi pour des enfants dont les parents appartiennent à la deuxième génération. Une concentration sur la famille nucléaire rend aujourd’hui difficile la rencontre d’enfants avec des pairs hors de l’école ou avec différents adultes en tant que témoins de la foi. Dans une société vieillissante, la rencontre entre personnes jeunes et âgées peut susciter des processus de foi créatifs. Ce modèle ne pourra pas toucher tout le monde, mais grâce aux différents groupes d’âge, on peut envisager que des personnes dont la proximité à la foi et à l’Église est diverse se mettent ensemble en chemin et que le dépassement des structures habituelles favorise également de nouveaux rapprochements et constellations communautaires.

Les deux propositions suivantes sont mises en œuvre dans divers modèles catéchétiques et peuvent aussi être compatibles avec une catéchèse intergénérationnelle.

3.4. Des «journées des familles»

Les «journées des familles» connaissent une certaine tradition, surtout dans les régions de l’Est. Leur but est «d’aider des chrétiens de différents âges à réussir leur vie dans le contexte postmoderne de diaspora»[35]. Les journées des familles traitent de sujets fondamentaux de la vie et de la foi chrétienne. Le travail sur la thématique dure à peu près trois heures (après une ouverture commune, les échanges se déroulent dans des groupes séparés par âges). À la fin, le travail est noué ensemble lors d’un plénum. Il arrive que s’y ajoutent une célébration et un repas en commun. De pareils modèles sont également proposés lors de catéchèses intergénérationnelles qui englobent des intéressés au-delà du cercle familial. À cette occasion, des personnes plus âgées peuvent aussi être concernées qui appartiennent également à la génération des grands-parents. À signaler que lors de telles journées intergénérationnelles, une grande attention est mise sur le repas commun et l’atmosphère fraternelle : il ne s’agit pas seulement de parler de communauté dans la foi, mais aussi de la vivre concrètement.

3.5. Une catéchèse attentive aux sexes et aux genres

Finalement, j’aimerais ajouter quelques considérations sur la catéchèse attentive aux sexes et aux genres qui est consciente du fait que non seulement la vie courante, mais aussi la foi opèrent une distinction entre femmes et hommes[36]. Dans beaucoup de familles, la responsabilité pour les thèmes religieux revient aux femmes. Aussi, en Allemagne, ce sont principalement des femmes qui sont actives en catéchèse sacramentelle. De même, lors des soirées de parents, la plupart des personnes présentes sont des femmes. En tant que minorité, beaucoup d’hommes se sentent mal à l’aise et se retirent encore davantage du domaine de la «religion». Quelques soirées de papas, organisées dans le cadre de la première communion, conduisent au constat que les hommes parlent plus librement entre eux de leur foi, particulièrement si l’animation proposée est également masculine. Dans les échanges, d’autres thèmes sont abordés, car le quotidien de beaucoup d’hommes se distingue de celui des femmes — au moins dans la phase où les enfants sont petits. Des journées enfants-papas durant la préparation à la première communion, ou pour la catéchèse de la confirmation des offres pères-fils contribuent à ce que les enfants et les jeunes puissent faire l’expérience non seulement de leurs mères, mais aussi de leurs pères en tant que personnes jouant un rôle dans la foi.

4.    Ouverture: le contexte de vie en catéchèse — enracinement social

Après avoir parcouru des modèles en montrant les possibilités qu’elles offrent ainsi que leurs limites je voudrais conclure par la présentation d’un concept qui, tout en n’étant pas catéchétique, peut néanmoins inspirer d’une manière constructive la catéchèse, car il intègre d’une part le contexte de vie des hommes et d’autre part aussi les ressources dont ils disposent.

Depuis les années 1990, le concept d’orientation selon les contextes sociaux de vie a été développé soit en travail social, soit en pastorale jeunesse[37]. Cette considération extrathéologique peut aider à mieux percevoir de quels présupposés une catéchèse avec des familles doit tenir compte, et comment elle doit devenir une tâche commune entre plusieurs partenaires. L’orientation selon les lieux sociaux de vie considère le lieu de vie comme un espace de relations. Le quartier urbain dans lequel on habite est le fruit de nombreuses relations.

Schéma : Noack, Michael: Kompendium Sozialraumorientierung. Geschichte, theoretische Grundlagen, Methoden und kritische Positionen, Weinheim/Basel 2015, p. 115.

Ce concept vise à dessiner les lieux de vie d’entente avec les destinataires et prend au sérieux l’enracinement de chacun(e) dans un contexte donné. L’orientation selon les lieux sociaux part des principes suivants:

  • les points de départ sont la volonté et les intérêts des personnes;
  • le travail d’animation a la préséance sur l’encadrement;
  • les ressources de personnes et d’espaces sociaux jouent un rôle important;
  • les activités sont déterminées en fonction des groupes, au-delà des frontières entre les domaines;
  • le réseautage et l’intégration, au-delà des champs d’activité, sont importants.[38]

Des parallèles peuvent être clairement établis avec la catéchèse intergénérationnelle. Une catéchèse attentive aux milieux sociaux procédera d’abord à une analyse de l’espace en question. L’apprentissage de la foi et son approfondissement seront ensuite conçus comme des processus marqués par les relations au sein de l’espace. Par conséquent, la foi ne peut être apprise et travaillée hors contexte.[39] L’espace social de vie exerce en quelque sorte une «fonction catéchétique», c’est-à-dire que la corrélation entre la vie et la foi devient tangible.

Une catéchèse ainsi conçue recherche la coopération avec les autres partenaires de l’espace social. Par ce biais, les ressources des partenaires peuvent être exploitées afin d’améliorer la vie dans l’espace social et ainsi le monde des catéchisés. Il devient clair que les formes catéchétiques élaborées de cette façon sont aussi diverses que le sont les espaces sociaux.

Dans la perspective d’une catéchèse centrée sur le contexte social, l’accent est mis sur les intérêts et les activités des sujets. Ce qui signifie qu’ils décident des actions qui sont pour eux importantes et comment ils veulent mettre en œuvre leur foi dans leur vie quotidienne. Cela se rattache à nouveau à l’importance théologique de l’apprentissage en lien avec sa propre biographie. L’orientation vers l’espace social protège du danger d’une concentration exclusivement individualiste qui restreint la foi à un exercice intérieur. Elle promeut et exige l’agir commun des enseignants et des apprenants. Pour réussir, il est incontournable que les bénévoles qui s’engagent dans le travail catéchétique soient accompagnés par des professionnels et que des formations permanentes leur soient proposées.

Le but d’une telle catéchèse peut se résumer par la déclaration suivante du synode: «Aider l’être humain à réussir sa vie en la plaçant sous l’éclairage et avec la présence de Dieu»[40]. Il vaut la peine de continuer à penser le travail catéchétique avec des familles dans ce cadre.


[1] Prof. Dr. Angela Kaupp, est professeure de théologie pratique à l’Institut für Katholische Theologie de l’Université de Koblenz-Landau, Allemagne.

[2] Pape François (2016): Exhortation Apostolique Post-Synodale « Amoris Laetitia », pp. 216-217, téléchargeable sur <http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/apost_exhortations/documents/papa-francesco_esortazione-ap_20160319_amoris-laetitia.html>, (consulté le 29.03.2017).

[3] Pour la traduction compétente en français je remercie François-Xavier Amherdt (Fribourg) et Reinhard Wild (Le Hohwald).

[4] Cf. « Das katechetische Wirken der Kirche » no. 5, Ein Arbeitspapier der Gemeinsamen Synode der Bistümer in der Bundesrepublik Deutschland, dans: Ludwig Bertsch (Dir.): Offizielle Gesamtausgabe II, Ergänzungsband, Freiburg i.Br. 1976, pp. 52-53; « Der Religionsunterricht in der Schule », no. 3.9, Ein Beschluss der Gemeinsamen Synode der Bistümer in der Bundesrepublik Deutschland Ludwig Bertsch u.a (Dir.): Offizielle Gesamtausgabe, Freiburg i.Br. 1976, dans: Ludwig Bertsch (Dir.): Offizielle Gesamtausgabe, Freiburg i.Br. 1976, pp. 113-152, ici : p. 152. Voir aussi la déclaration de l’évêque Dr Franz-Josef Bode à l’occasion de la journée d’études de la Conférence des évêques allemands sur la transmission de la foi dans l’enseignement religieux et la catéchèse, le 26 septembre 2012 à Fulda, téléchargeable sur http://www.schuleunderziehung.de/medien/16467/original /870/2012-154b-Herbst-VV-Studientag-Statement-B-Bode.pdf, (consulté le 29.03.2017).

[5] La situation semble être la même en Autriche.

[6] Voir à ce sujet Scheuchenpflug, Peter (2003): Katechese im Kontext von Modernisierung und Evangelisierung. Pastoralsoziologische und pastoraltheologische Analysen ihres Umbruchs in Deutschland vom Ende des Zweiten Weltkrieges bis zur Gegenwart. Würzburg; Emeis Dieter / Schmitt Karl Heinz (1986): Handbuch der Gemeindekatechese. Freiburg i.Br., pp. 11-28.

[7] Vatican II : Constitution dogmatique sur l’Église « Lumen gentium », téléchargeable sur http://www.vatican.va/archive/hist_councils/ii_vatican_council/documents/vat-ii_const_19641121_lumen-gentium_fr.html, (consulté le 29.03.2018).

[8] Cf. Bucher, Rainer (22005): Jenseits der Idylle. Wie weiter mit den Gemeinden?, dans : Bucher Rainer (Dir.): Die Provokation der Krise. Zwölf Fragen und Antworten zur Lage der Kirche, Würzburg, pp. 106-130; ici : p.110.

[9] Cf. « Das katechetische Wirken der Kirche », no. 4, pp. 49-51.

[10] « Das katechetische Wirken der Kirche », no. 3, p. 41.

[11] Lutz, Bernd (2002): Katechese in der Gemeinde, dans : Bitter, Gottfried u.a. (Dir.): Neues Handbuch religionspädagogischer Grundbegriffe, München, pp. 305-310; ici : p. 305.

[12] « Das katechetische Wirken der Kirche », no. A 3.1, p. 42.

[13] « Das katechetische Wirken der Kirche », no. A 4, p. 49.

[14] Blasberg-Kuhnke, Martina (2015): „Familie“, téléchargeable sur < https://www.bibelwissenschaft.de/stichwort/100100/, (consulté le 29.03.2017). Plus généralement, à propos des processus de transformations et des conséquences pour la catéchèse, voir Altmeyer, Stefan / Bitter, Gottfried / Boschki, Reinhold (Dir.) (2016): Christliche Katechese unter den Bedingungen der „flüchtigen Moderne“, Stuttgart.

[15] Cf. Hennecke, Christian (2015): Not-wendiger Aufbruch. Auf der Suche nach neuen Wegen der Katechese, dans : Hennecke, Christian / Dörsam, Anke (Dir.) (2015): Generationen des Glaubens. Kontexte, Modelle und Erfahrungen generationenübergreifender Katechese, München, pp.10-19; ici : pp. 10s.

[16] Cf. Domsgen, Michael (2004): Familie und Religion. Grundlage einer religionspädagogischen Theorie der Familie, Leipzig; Zehnder Grob, Sabine (2009): Religiöse Sozialisation in der Familie. Eine empirische Studie, dans : Zeitschrift für Pädagogik und Theologie 61 (3), pp. 227–239; Forschungsgruppe « Religionnd Gesellschaft » (2015): Werte – Religion – Glaubenskommunikation, Wiesbaden. Zum aktuellen Forschungsüberblick zu Familie und Religion cf. Zehnder Grob, Sabine (2015): Religiosität, psychische Gesundheit und Kohärenzsinn. Eine empirische Befragungsstudie Adoleszenter, Dortmund, téléchargeable sur <http://nbn-resolving.de/urn:nbn:de:101:1-2016120957>, pp. 30-33, (consulté le 29.03.2017).

[17] Cf. Kaupp, Angela (2005): Junge Frauen erzählen ihre Glaubensgeschichte, Ostfildern; Forschungsgruppe „Religion und Gesellschaft“ (2015): Werte – Religion – Glaubenskommunikation, Wiesbaden; Könemann, Judith / Sajak, Clauß Peter / Simone, Lechner (2017): Einflussfaktoren religiöser Bildung. Eine qualitativ-explorative Studie, Wiesbaden, pp. 156-167.

[18] Cf. Schwab, Ulrich (1995): Familienreligiosität. Religiöse Traditionen im Prozess der Generationen, Stuttgart.

[19] Cf. Schomaker, Martin Friedrich (2002): Die Bedeutung der Familie in katechetischen Lernprozessen von Kindern. Eine inhaltsanalytische Untersuchung von Konzepten zur Hinführung der Kinder zu den Sakramenten der Beichte und der Eucharistie, Münster.

[20] Cf. Sommer, Regina (1998): Lebensgeschichte und gelebte Religion von Frauen. Eine qualitativ-empirische Studie über den Zusammenhang von biographischer Struktur und religiöser Orientierung, Stuttgart.

[21] Cf. Schwab, Ulrich (1995): Familienreligiosität. Religiöse Traditionen im Prozess der Generationen, Stuttgart; Morgenthaler, Christoph / Hauri, Roland (2010): Rituale im Familienleben. Inhalte, Formen und Funktionen im Verhältnis der Generationen, Weinheim.

[22] Cf. aussi : Baumann, Maurice / Hauri, Roland (2008): Weihnachten – Familienritual zwischen Tradition und Kreativität, Stuttgart.

 

[23] Cf. Hofrichter, Claudia (2003): Wir möchten, dass unser Kind getauft wird. Eine Handreichung für Taufgespräche in Elterngruppen, München; Hofrichter, Claudia / Ball, Matthias (2009): Wir möchten, dass unser Kind getauft wird. Die Taufe verstehen und feiern. Elternheft, München.

[24] Pour l’impact de la catéchèse de la première communion sur les enfants et les parents, voir Forschungsgruppe « Religion und Gesellschaft » (2015): Werte – Religion – Glaubenskommunikation, Wiesbaden.

[25] Cf. Stüsser, Helmut (1982): Hinführung zur Eucharistie durch die eigenen Eltern, dans : Lebendige Seelsorge 33, pp. 160-163.

[26] Cf. Bihler, Elsbeth (2006): Kommt und seht. Familienbuch zur Erstkommunion, Limburg-Kevelaer; dies. (2008): Kommt und seht. Weg-Gottesdienste zur Erstkommunion, Limburg-Kevelaer.

[27] Cf. Arzt, Silvia (2008): Großeltern als TradentInnen von Religion und/oder Kirchlichkeit? dans : Ritzer, Georg (Dir.): Mit euch bin ich Mensch – Festschrift anlässlich des 60. Geburtstages von Friedrich Schleinzer, Innbruck/Wien, pp. 265-282.

[28] Cf. Biesinger, Albert / Schramm, Melanie (2004): Gott mit neuen Augen sehen. Wege zur Erstkommunion. Neuausgabe, München.

[29] En résumé Cf. Jakobs, Monika: Neue Wege der Katechese, München 2010, pp. 74-78.

[30] Hauf, Jörn (2011): Familienbiographische Katechese, dans : Kaupp, Angela / Leimgruber, Stephan / Scheidler, Monika. (Dir.) (2011): Handbuch der Katechese. Für Studium und Praxis. Freiburg, pp. 464-474; ici : p. 473.

[31] Cf. Hennecke, Christian / Dörsam, Anke (Hg.) (2015): Generationen des Glaubens. Kontexte, Modelle und Erfahrungen generationenübergreifender Katechese, München.

[32] Cf. Fachstelle für Religionspädagogik Katholische Kirche im Kanton Zürich: Intergenerationale Katechese, téléchargeable sur http://www.religionspaedagogikzh.ch/index.php?na=7,6,0,0,d, (consulté le 29.03.2017).

[33] Hennecke, Christian (2015): Not-wendiger Aufbruch. Auf der Suche nach neuen Wegen der Katechese, dans : Hennecke, Christian / Dörsam, Anke (Dir.) (2015): Generationen des Glaubens. Kontexte, Modelle und Erfahrungen generationenübergreifender Katechese, München, pp. 10-19; ici : p. 17.

[34] Lutz, Bernd (2015): Intergenerationell durch GoF – statt fragmentiert wie sonst. Praktisch-theologische Reflexionen zum US-amerikanischen Ansatz „Generations of Faith“ (GoF), dans : Hennecke, Christian / Dörsam, Anke (Dir.) (2015): Generationen des Glaubens. Kontexte, Modelle und Erfahrungen generationenübergreifender Katechese, München, pp. 20-27; ici : p. 25.

[35] Cf. Scheidler, Monika (2011): Kinderbibelwochen und katechetische Familientage, dans : Kaupp, Angela / Leimgruber, Stephan / Scheidler, Monika (Dir.) (2011): Handbuch der Katechese. Für Studium und Praxis. Freiburg u.a., pp. 476-488; ici : p. 484.

[36] Cf. Kaupp, Angela / Kaupp-Herdick, Markus (2012): Katechetische Lernprozesse geschlechtersensibel durchbuchstabieren. Ein Beitrag zur religiösen Identitätsfindung, dans : Lebendiges Zeugnis 67 (3), pp. 188-198.

[37] Pour le concept et sa discussion, voir Früchtel, Frank / Cyprian, Gudrun / Budde, Wolfgang: Sozialer Raum und Soziale Arbeit. Textbook: Theoretische Grundlagen, Wiesbaden 2013; Fürst, Roland / Hinte, Wolfgang: Sozialraumorientierung. Ein Studienbuch zu fachlichen, institutionellen und finanziellen Aspekten, Wien 2014; Noack, Michael: Kompendium Sozialraumorientierung. Geschichte, theoretische Grundlagen, Methoden und kritische Positionen, Weinheim/Basel 2015.

[38] Cf. Hinte, Wolfgang: Sozialraumorientierung – Konzepte, Debatten, Forschungsbefunde, dans : Fürst, Roland / Hinte, Wolfgang: Sozialraumorientierung. Ein Studienbuch zu fachlichen, institutionellen und finanziellen Aspekten, Wien 2014, pp. 9-29; ici : p.15.

[39] Les « théologies de la libération » en Amérique latine soulignent l’importance de chaque « espace », comme du reste les conceptions théologiques d’Afrique et d’Asie.

[40] « Das katechetische Wirken der Kirche » no. 3, pp. 41,