Mercredi – Pour ce troisième jour, nous avons décidés de nous rendre à Binn. Ce petit village est situé au sud de Ernen, dans la vallée qui donne son nom au parc. Moins de deux cents âmes y vivent durant l’hiver. –Ryan Muza et Jérôme Küffer
Le village est enveloppé de neige et gardera son manteau jusqu’à fin avril selon les dires d’habitants.
Dans le car postal partant de Fiesch, nous retrouvons Dominique Weissen, la directrice administrative du parc. Nous discutons en chemin, c’est l’occasion d’avoir un entretien informel. Dans le car postal, nous sommes trois personnes. La taille du bus a certainement été décidée en fonction des périodes de fortes affluences. Pour notre recherche, c’est une chance de pouvoir discuter avec elle hors du stricte cadre d’un entretien. Après seulement deux jours sur place, nous avons déjà l’impression de connaître du monde, d’avoir une certaine familiarité avec le terrain. Cette situation est seulement possible dans un lieux à échelle réduite. C’est un sentiment assez agréable, qui donne l’impression que nous avançons dans la bonne direction.
Le village est enveloppé de neige et gardera son manteau jusqu’à fin avril selon les dires d’habitants. En soit, il n’est pas si reculé, on y accède en trente minutes de car depuis Fiesch. Pourtant, l’arrivée dans ce village donne l’impression que rien n’a changé depuis des siècles.
De nombreuses familles se sont exilées dans des villes.
Arrivés à Binn, Madame Weissen rejoint ses bureaux situés au dessus du café et de l’Office du tourisme. Nous entrons dans le café pour notre rendez-vous avec Beat Tenisch, l’ancien président de la Commune de Binn pendant plus de 16 années. Il est né ici et travaillait en tant que professeur dans l’école de Fiesch. Sa vision du développement de sa Commune sur une si longue période est passionnante. Il nous parle des difficultés par rapport aux résidences secondaires. De nombreuses familles se sont exilées dans des villes. A présent, ce sont les enfants voir les petits enfants qui ont conservés la maison familialle à Binn. Bien qu’ils ne s’y rendent que quelques fois dans l’année et ne participe que peu à la vie locale, ils conservent leur maison. A cela s’ajoute le risque d’avalanche qui réduit considérablement les terrains constructibles en dehors de Binn. Le village ne peut donc pas compter sur un grand nombre de lits disponibles pour accueillir des touristes.
Le poste de radio du café diffuse de la musique actuelle pour rappeler aux touristes de passage que la civilisation a bien atteint le village.
Le café dans lequel se déroule l’entretien remplit plusieurs fonctions. Dans un côté du café se trouve l’office du tourisme, qui sert également de bureau de poste. Le poste de radio du café diffuse de la musique actuelle pour rappeler aux touristes de passage que la civilisation a bien atteint le village. L’entretien terminé, nous montons par les escaliers dans les bureaux de Madame Weissen pour y récupérer de précieux documents sur le parc, puis courrons dans l’unique magasin pour trouver de quoi manger. Nous profitons de notre dîner pour faire un tour du village de Binn. Par un petit pont, on accède à l’église entourée de son cimetière. Sur toutes les pierres tombales, on retrouve seulement deux noms de famille.
La vallée de Binn est réputée pour ses minéraux.
Dans l’après-midi, nous rejoignons Ewan Gorsatt, un chercheur de minéraux. Né dans le village, il a travaillé durant des années comme ingénieur dans la vallée. Depuis deux ans, il vit de sa passion en organisant des excursions pour trouver des minéraux ainsi que des ateliers. La vallée de Binn est réputée pour ses minéraux. On y trouve une forme de roche unique au monde, qui fait la particularité de la région. Notre entretien se déroule dans la pièce qui lui sert de boutique, remplie du sol au plafond de roches et autres cristaux. Cette activité est exposée et mise en avant dans tous les supports de communication du parc. Ewan nous explique que cette communication est récente. Il avait fait partie d’un groupe de projet en 2002, pour mettre en avant l’intérêt géologique de la vallée. Pour l’ancien directeur du parc, la recherche de minéraux était en contradiction avec l’idée d’un parc. Depuis que Dominique Weissen est a la direction du parc, elle a souhaité mettre en avant ce type d’activité. Ainsi, son petit atelier et magasin bénéficie d’une communication qui va bien au-delà des limites de son village et lui permet d’en vivre.
Bien que nous soyons dans son garage, l’atelier est organisé comme une usine appliquant les principes du 5S du management japonais.
Nous sommes en hiver, il est principalement occupé à nettoyer et polir les minéraux qu’il a pu récolter à plus de 2000 mètres lorsque le terrain n’était pas enneigé. Nous visitons ensuite son atelier, situé sous la maison. De nombreux appareils pour polir les pierres et des dizaines de caisses de minéraux occupent l’espace. Il y organise notamment des ateliers découverte pour des privés ainsi que des écoliers. Bien que nous soyons dans son garage, l’atelier est organisé comme une usine appliquant les principes du 5S du management japonais. Nous rejoignons l’unique bus qui redescent à Fiesch dans l’après-midi et y retrouvons à nouveau Dominique.
Jérôme Küffer et Ryan Muza