Sur le front de la recherche « revuiste »

Par Selina Follonier

Les revues littéraires, artistiques et scientifiques bénéficient d’un intérêt croissant de la part de la communauté des chercheurs. Vecteurs de la circulation des idées et des savoirs, lieux de sociabilité intellectuelle, elles forment un terrain d’investigation privilégié pour les sciences historiques de la culture.

Parallèlement à l’essor des periodical studies dans les pays anglo-saxons se sont développées de nombreux projets de recherche en France, en Belgique, en Suisse et en Allemagne, qui se proposent de cerner l’objet « revue » selon des approches situées à l’intersection entre les études littéraires, l’histoire de l’art, l’histoire des médias et l’histoire intellectuelle.On dénombre à l’heure actuelle plusieurs collectifs de chercheurs spécialisés dans ce domaine, tels que l’European Society for Periodical Research, le Groupe de Recherche Interuniversitaire sur les Revues de Théâtre (Université Paris Diderot et Sorbonne Nouvelle) ou l’Arbeitskreis Kulturwissenschaftliche Zeitschriftenforschung. Ce dernier, issu d’un partenariat entre le Kulturwissenschaftliches Institut Essen (KWI) et le Zentrum für Literatur- und Kulturforschung (ZfL) de Berlin, organise régulièrement des conférences et vient d’annoncer la publication d’un ouvrage consacré à la Lettre internationale : Geschichte einer europäischen Zeitschrift (Roman Léandre Schmidt, 2017).

Le colloque de l’International Association of Word and Image Studies (IAWIS), tenu en juillet 2017 à Lausanne, aura quant à lui fourni un aperçu des avancées scientifiques dans le domaine des revues illustrées. Dans ce contexte ont été présentés les résultats d’un projet de recherche consacré au périodique satirique suisse-alémanique Der Nebelspalter, mené par le Centre des sciences historiques de la culture de l’Université de Lausanne entre 2011 et 2014, ainsi que plusieurs travaux portant sur le Mercure galant (1672-1724), qui témoignent de la volonté d’élargir les bornes chronologiques d’un champ d’étude majoritairement centré sur les XIXe et XXe siècles. Le colloque de l’IAWIS a également donné lieu à des discussions méthodologiques relatives à l’exploitation de nouveaux outils de recherche informatiques. La numérisation de vastes fonds de périodiques facilite considérablement l’accès aux sources et la constitution de bases de données comme data.bnf, PRELIA (Petites REvues de LIttérature et d’Art) ou Revues Culturelles Suisses, réunissant des informations bibliographiques et prosopographiques, s’avère particulièrement utile lorsqu’il s’agit d’analyser la géographie du champ des revues ou d’identifier les acteurs impliqués dans l’élaboration d’un titre spécifique.

Au-delà du fait qu’il se trouve à l’origine d’un nouvel essor des études « revuistes », le tournant numérique conduit également à une transformation radicale de l’objet de ces dernières. Le déplacement progressif des pratiques d’écriture et de lecture du support imprimé à l’écran entraîne des modifications fondamentales en termes de modes de production, de rythmes de publication et de circuits de diffusion. Ainsi, les périodiques édités de nos jours prennent des formes qui peuvent nettement différer de celles de leurs prédécesseurs. À l’heure où la revue se détourne du format papier pour devenir une plateforme de publication virtuelle, la définition même du médium se voit remise en question. Cette évolution appelle la nécessité de développer de nouvelles catégories d’analyse et pose de nouveaux défis à la recherche. 

 

Groupes de recherche

European Society for Periodical Research (ESPRit)

Arbeitskreis Kulturwissenschaftliche Zeitschriftenforschung

Groupe de Recherche Interuniversitaire sur les Revues de Théâtre

Ressources

Data.bnf

Digithèque « Revues littéraires belges »

Revues Culturelles Suisses

Revues littéraires francophones du XXe siècle à nos jours

Revues littéraires et artistiques en langue française et endogènes

PRELIA (Petites REvues de LIttérature et d’Art)