L’animation pour la télévision : Le studio Liechti
Les productions du studio Liechti sont représentatives de tout un contexte historique. Pour pouvoir fonctionner économiquement, le studio, ancré à Genève de 1965 à 1983, va répondre à divers besoins du marché audiovisuel suisse romand en proposant de très courts films. Mais plus que de simples commandes, ces films émergent à la croisée des demandes spécifiques et de la vision de l’homme qui fonde et dirige le studio. Edmond Liechti, fils de graphiste, lui-même formé dans ce domaine, puis dessinateur de presse et humoriste, va être amené à proposer des films d’animation, légers et souvent ouvertement comiques. Sa conception du dessin animé, qu’il dit inspirée par le modèle américain de Disney, mais qui relève aussi du cartoon, détermine non seulement le type de dessin qu’il met en mouvement, mais également la façon dont il organise son studio qu’il divise par spécialisations et dont il assure la supervision.
Le studio Liechti est un cas d’espèce pour comprendre les liens de l’animation en Suisse francophone avec la commande publicitaire. L’objectif de cette recherche est d’abord de saisir ce qui motive la création d’un studio d’animation au milieu des années 1960. L’hypothèse est que, dans ce cas, le contexte de développement médiatique – émergence de la télévision dès les années cinquante, l’apparition de la publicité télévisuelle, mais aussi structuration institutionnelle du cinéma suisse (dès les années soixante) – permet à de nouveaux arrivants dans le champ de la création cinématographique de mettre leur expérience et leurs compétences au service du monde des médias. Graphiste, dessinateur de presse, humoriste, entrepreneur, Liechti développe des savoir-faire au moyen. Comprendre les procédures de travail dans le studio impose de se pencher sur les techniques de fabrication des films et des choix esthétiques ou discursifs opérés. Ces court-métrages, publicités, TV-spots, portent en eux les marques liées aux enjeux de leur conception, aussi bien à travers leur récit qu’en tant qu’objet résultant d’un processus technique. L’analyse des discours et des formes complètera donc celle du travail, des échanges et des procédures de fabrication. Cette approche est essentielle car elle permet de comprendre la nature des images qui participent à identifier visuellement le média télévisuel pour son public. Ainsi du « Chirat Pickles Band », ensemble de personnages pour la publicité de l’entreprise genevoise de conserves Chirat, connu de toute une génération.
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