Wannabe
Performance par Kiyan Khoshoie / Théâtre Le Pommier (Neuchâtel) et l’ADN – Association Danse Neuchâtel / Du 14 au 15 novembre 2024 / Critique par Odile Jaques .
Il voulait être danseur
15 novembre 2024
Par Odile Jaques
Sur les planches du Pommier, en co-acceuil avec ADN – Danse Neuchâtel, se déhanche un enfant, un ado, un danseur, sur les musiques pop des années 2000, du Temps qui court d’Alliage à Everybody des Backstreet boys. En même temps que se formaient les premiers boys bands et girls bands, s’est formé, dans le secret de sa chambre, la passion d’un jeune homme.
C’est l’histoire d’un enfant de 36 ans. Ou disons, c’est l’histoire de Kiyan Khoshoie enfant. Dans sa chambre, chez lui, il regarde le clip de Baila du groupe Alliage. Lentement, par petits gestes discrets, son corps commence à bouger. Et gentiment, il se met à vouloir reproduire la chorégraphie, en répétant les mouvements encore et encore pour être sûr de les avoir justes. Il commence à chanter certains passages, d’abord par-dessus la musique, puis en solo, a cappella.
Toujours dans sa chambre, en secret, il en reproduit d’autres, imite ses clips préférés et improvise certains moments. Dans ses gestes, on comprend très bien qu’il s’imagine une vingtaine de danseur·euse·s et au moins une dizaine de projecteurs lumineux.
Une fois qu’il est adolescent, la découverte se refait, cette fois autour des possibilités du corps. La danse devient une séduction, une pièce de costume se rajoute. Il s’agit d’un manteau avec des couches très colorées qui rappelle certains costumes d’Elton John. Il traduit le rêve de star devant la foule et les projecteurs, et évoque en même temps les plumes d’oiseaux qui transforment la danse en parade nuptiale.
Le spectacle se termine là où il avait commencé, dans une pièce où le danseur est seul, et on voit les similitudes entre l’action de créer une chorégraphie dans son studio et celle de reproduire une chorégraphie dans sa chambre : le jeu, les essais, les tests, les galères, le plaisir.
En nous racontant son histoire, Kiyan Khoshoie s’adresse à notre passé, à l’enfant qui beuglait des chansons en sautant sur son lit. L’adulte sur scène possède pourtant une très belle voix claire, belle et fraîche, sans fioriture ou exagération.
Sans aucun dialogue, la narration est pourtant très claire. L’évolution des mouvements de danse qui se font de plus en plus assumés puis de plus en plus « sexy » traduit l’évolution narrative du personnage. En se servant uniquement de gestes, Kiyan Khoshoie raconte un gain de confiance en soi, une progression lente mais certaine en danse, la découverte et le plaisir d’une passion et la découverte de soi.
Kiyan Khoshoie ayant 36 ans et moi 25, nous n’avons pas été bercés aux mêmes tubes. Le spectacle est facilement compris et apprécié par toutes les personnes qui ont une fois rêvé dans leur chambre, mais, au vu des éclats de rire des personnes assises à côté de moi, il prendra une saveur toute particulière si ces morceaux ont aussi accompagné votre adolescence.
15 novembre 2024
Par Odile Jaques