Un sandwich peu digeste aux saveurs punks

Par Ariane Mariot

Une critique sur le spectacle :

Voodoo Sandwich / Création et mise en scène d’Augustin Rebetez et Niklas Blomberg / Théâtre Spot à Sion / du 12 au 11 novembre 2021 / Plus d’infos.

© Augustin Rebetez

Contorsions, transformations, délires et hallucinations sont au programme de ce spectacle qui ne laisse pas indifférente, pour autant qu’on lâche prise face à cette excentricité débordante. Dans le cadre de la troisième nuit du Cirque à Sion, Augustin Rebetez, artiste plasticien, et son comparse Niklas Blomberg, artiste transformiste et musicien, nous offrent une heure de folie créative jusqu’à satiété.

L’univers hétéroclite, organique et gothique d’Augustin Rebetez est habité par des personnages monstrueux, des formes indéfinissables et des matériaux de récupération réhabilités en machines improbables. Ce monde onirique, voire cauchemardesque, est bien présent dans ce spectacle qui se situe entre performance artistique et arts plastiques. L’artiste propose un travail sur le corps, celui du performeur qui se transforme, se contraint au moyen de masques et d’ustensiles (scotch sur les paupières, cintre en métal dans la bouche, nez retroussé par un crochet, …), mais aussi des différents personnages présents sur scène, qu’ils soient installations-sculptures contemporaines, objets ou montages photographiques projetés sur écran. Il nous livre des visages de monstres, des corps désarticulés et en morceaux : une tête hurle depuis son chariot, les yeux clignotant rouge, en réponse à l’artiste-performeur. Et du son et lumière puissant, violent, techno-punk, rythmant la succession de tableaux scéniques proposés aux spectateurs qui encaissent pendant une heure cet univers déroutant.

Pour agrémenter ce Voodoo Sandwich, Niklas Blomberg se donne à fond pour faire vivre, au moyen de masques et autres artifices, ses personnages dans l’outrance, tantôt hystériques, tantôt créatifs fous, tantôt doux ou presque. Son corps se modifie quitte à ne plus ressembler du tout à un humain. Il devient des œuvres plastiques vivantes. Il n’y a pas de texte, pas vraiment de récit, mais des onomatopées, des cris, des grognements, des mouvements corporels bruyants, renforcés par une bande sonore très présente comme dans les dessins animés. Le performeur fabrique en direct des structures, des machines qui habitent l’espace scénique et qui lui permettent de jouer de la musique grâce à des bulbes de gingembre branchés et sonorisés ou à un petit clavier connecté. Il détruit aussi ce même espace en lançant les objets au travers de la scène ou en faisant tomber l’écran, tel un punk déjanté.

C’est un spectacle sur l’adolescence et pour les adolescents explique le flyer de présentation. Ce n’est pas vraiment identifiable à première vue. Mais après réflexion, les thèmes du rapport au corps à l’adolescence, du besoin de se trouver une identité, une image personnelle, quitte à sortir des codes de la société, prennent sens au milieu de ce capharnaüm artistique.

Le public passe du rire étonné, au rire gêné, au silence parfois. La lumière agressive dérange, le son réveille et les spectateurs continuent à savourer ce sandwich peu ragoûtant jusqu’à la fin de cette cérémonie Voodoo.