Suzette

Suzette

Texte et mise en scène de Fabrice Melquiot / avec Emmanuelle Destremau, Simon Aeschimann, Alain Frey, Vincent Hänni, Louis Lavedan, Nicolas Rossier et Gabriel Bonnefoy / Théâtre Am Stram Gram / du 27 septembre au 18 octobre 2016 / Critique par Valmir Rexhepi.


Le cerveau qui pousse

18 octobre 2016

©Elisabeth Carecchio

Suzette grandit vite : de sa naissance à ses vingt ans, nous sommes invités à grandir avec elle.  

Tandis que l’on s’assied, que l’on se parle encore, que l’on se prépare à être au théâtre, sur scène quelqu’un fredonne un extrait de chanson au micro, puis un autre et un autre. Les sept personnes sur les planches semblent aussi se préparer, on dirait une équipe de régisseurs :

ils déplacent là des cartons, ici ils règlent quelques instruments de musique. Un jeune garçon du public est sollicité pour les aider. Et puis le silence se fait dans nos rangs, comme pour marquer un début. Mais les sept prétendus régisseurs poursuivent leur manège. Ce sont eux, les comédiens, les déjà-personnages, la pièce a commencé bien avant notre geste de silence.

Emmanuelle Destremau, Simon Aeschimann, Alain Frey, Vincent Hänni, Louis Lavedan, Nicolas Rossier et Gabriel Bonnefoy, tous venus d’horizons différents (musiciens, vidéastes, chanteurs, comédiens), sont réunis autour du projet de Fabrice Melquiot. C’est l’histoire d’un couple qui va avoir un enfant, une fille, Suzette. À peine née, du haut de ses quatre consonnes et trois voyelles et de sa petite bosse sur le front, elle est vue par ces géniteurs comme géniale. Et puis ça s’emballe : elle grandit vite, très vite. Les parents attendent que son génie s’exprime, mais il tarde. Au point que le doute s’installe. Pourtant, le doute ne s’exprime pas dans la mise en scène. Bien au contraire : des chansons, du live painting exécuté en direct sur un support plat et reproduit en gros plan, en fond de scène, par le biais d’une caméra, des comédiens qui sont Suzette à tour de rôle, encore des chansons : la vitesse de croissance de la petite fille n’a d’égale que la profusion des stimuli scéniques.

Ça pourrait être vertigineux ; ça ne l’est pas. On est comme dans les sinuosités d’un cerveau qui pousse. Des sinuosités en forme de points d’interrogation. On se laisse prendre, on glisse ici, on saute là, parfois on bute. Suzette grandit, on grandit avec elle. Le génie ? C’est peut-être ce regard d’enfant qui nous est transmis partout sur scène.

18 octobre 2016


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