Par Laura Weber
Ohrtodhoxes / écrit et mis en scène par Casimir M. Admonk / TU –Théâtre de l’Usine / du 10 au 16 décembre 2015 / plus d’infos
Composé de chorégraphies aériennes, Ohrtodhoxes se développe par une succession de scènes en lévitation. Mais l’équilibre de ce ballet aérien se révèle précaire, et pointe la crainte d’un vacillement.
Pour sa première création théâtrale, Casimir M. Admonk compose une pièce pour le moins déroutante. Ohrtodhoxes se libère d’un certain nombre de conventions théâtrales. Constituée de sons énigmatiques et de corps en mouvement, cette pièce peut difficilement se résumer ; elle n’est en effet composée d’aucune intrigue ni même d’histoire, mais de lévitation. Ohrtodhoxes prend forme sur une scène dépouillée de tout décor figuratif. Deux hommes suspendus à des baudriers s’engagent dans une chorégraphie produite par des mouvements brusques et décousus. Au sol, une actrice, Marion Duval, orchestre le tout à l’aide de launchpads lumineux et de crossfaders, produisant ainsi un accompagnement sonore étrange.
À l’origine de ce projet, un livre nébuleux et poétique du même nom, également signé par Casimir M. Admonk. La transposition théâtrale de cette œuvre écrite abandonne les mots – à l’exception des courtes répliques loufoques énoncées par Marion Duval au milieu de la pièce – afin de laisser les corps s’exprimer. Face à Ohrtodhoxes, on ressent plus qu’on ne comprend. Des regards gênés échangés avec l’actrice, qui regarde chaque spectateur sans ciller, laissent le public pantois devant le déroulement de la pièce. La mise en scène affute également les sens. Devant l’absence presque totale de dialogue, chaque spectateur est aux aguets du moindre geste ou du moindre bruit émis par les corps suspendus.
Ohrtodoxes est un objet étrange qui se laisse difficilement cerner. Difficile effectivement de lui attribuer une signification, la pièce demeure imperméable à toute tentative de stabilisation et oscille invariablement. Pourtant son équilibre semble mis en péril par la chorégraphie de plus en plus impétueuse et frénétique des deux hommes. Un malaise envahit progressivement la scène et le public retient son souffle – craignant une éventuelle chute – jusqu’à la scène finale qui se termine en suspens, sans véritable résolution.
Si dans un premier temps, la pièce intrigue par son projet ambitieux, les gesticulations des acteurs ne produisent pas toujours l’effet escompté. L’intensité recherchée dans cette orchestration des corps ne parvient malheureusement pas toujours à ébranler le public.