Pierre-Victor, le plus Parisien des Soleurois

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Pierre-Victor de Besenval. En amateur d’art, le baron est installé dans son salon de compagnie. Tableau d’Henri-Pierre Danloux (1791). © Londres, National Gallery

Né en Suisse, Pierre-Victor de Besenval (1721-1791) a mené une belle carrière au service de la monarchie française. Un ouvrage récent raconte la vie de ce militaire, à la fois collectionneur et libertin. Son destin éclaire les liens franco-suisses de l’époque.

«Il a les manières à se faire aimer; il apprend aisément ce qu’il veut savoir […] Il ne veut pas qu’on fasse du mal à une personne; il est fort libéral, voilà son portrait.» Ces mots qualifient Pierre-Victor de Besenval alors qu’il n’était encore qu’un bambin, en 1726. Il naquit au sein d’une famille installée à Soleure, qui évoluait au cœur des réseaux européens. Son père œuvra en tant que diplomate au service de Louis XIV, avant de commander le régiment des Gardes suisses à Paris. Sa mère Katarzyna Bielińska fut une comtesse polonaise.

Fruit d’un colloque, un ouvrage bilingue richement illustré retrace la vie de Pierre-Victor de Besenval. Son pied-à-terre soleurois, où il n’a passé que fort peu de temps à l’âge adulte, était le sublime château de Waldegg. Directeur de ce dernier, Andreas Affolter codirige justement l’ouvrage en compagnie de Guillaume Poisson, chargé de recherche à l’Institut Benjamin Constant (Faculté des lettres).

Salons et champs de bataille

Enfant, Pierre-Victor de Besenval entra comme cadet au sein du régiment des Gardes suisses. Plus tard, il en devint lieutenant-colonel. Militaire professionnel au service de la France, le Soleurois fréquenta aussi bien les champs de bataille que les salons. Collectionneur d’art et intéressé par la botanique, il laissa le souvenir d’un personnage haut en couleur. En 1977, l’historien Gabriel de Broglie le décrivit comme un «aimable m’as-tu-vu […] Courageux, avec du panache et des bons mots […]». Les charges de Pierre-Victor de Besenval l’éloignèrent de la politique soleuroise, qualifiée de «panier de crabes». Les tensions entre ce célibataire – qui eut bien des maîtresses, comme un chapitre délicieux le détaille – et sa famille s’accumulèrent.

Il fit parler de lui au moment de la Révolution française, dans le cadre de la répression d’une émeute par les Gardes suisses, en 1788. Plus tard, lorsque les événements s’accélérèrent, il adopta une position attentiste. Recevant leurs ordres d’un régime crépusculaire, les Suisses n’étaient pas enclins «à en découdre avec la population française».

Cible des révolutionnaires, Besenval tenta de fuir vers la Suisse à la demande de Louis XVI, mais il fut arrêté en route. Un compatriote, le populaire ministre Jacques Necker, travailla dur pour obtenir son acquittement, lui évitant sans doute une exécution. Le baron mourut deux ans plus tard dans son lit à Paris. Aujourd’hui, son hôtel particulier, dans le 7e arrondissement, abrite l’ambassade de Suisse.

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Pierre-Victor de Besenval (1721-1791). Une vie au service de la France. Dir. Andreas Affolter et Guillaume Poisson. Société d’Histoire de la Suisse romande et Schloss Waldegg (2024), 265 p.

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