Influence des formations superficielles sur l’évolution des sols du Jura suisse – Origine, composition et transformation du matériel minéral parental

Thèse soutenue par Loraine Martignier le 3 mai 2013, Institut des sciences de la Terre (ISTE)

Le massif du Jura est essentiellement constitué de roches calcaires. Cependant, l’histoire géomorphologique de la région, en particulier les glaciations du Quaternaire, a fortement remanié les sédiments et constitué une couverture quasicontinue de formations superficielles, mélangeant les matériaux jurassiens et alpins (silicatés). C’est pourquoi l’objectif de cette thèse a été d’étudier l’origine et la nature de ces dépôts minéraux, ainsi que leur influence sur la pédogenèse actuelle, le long de deux séries de profils de sols disposés le long d’un gradient topographique. Les deux sites d’étude sont situés de part et d’autre de la première crête du Jura suisse (combe des Amburnex et côte de Ballens).

Les diverses formations superficielles ont été identifiées grâce à leurs compositions minéralogique, granulométrique et géochimique. Les résultats obtenus ont permis de définir trois sédiments de référence : les roches calcaires, les loess alpins (dépôts constitués de particules éoliennes) et la moraine silicatée acide d’origine alpine. Ces dépôts ont ensuite été mélangés le long des versants pour former des sédiments mixtes. La superposition des formations superficielles a permis de reconstituer la chronologie de leur mise en place en lien avec les dynamiques de transport (glaciaire, périglaciaire, éolienne) et l’histoire du paysage depuis le dernier maximum glaciaire (il y a environ 20’000 ans). Le dépôt sédimentaire le plus superficiel a été vraisemblablement formé durant la période froide du Dryas récent (entre -12’600 et -11’500 ans environ) et constitue le substrat initial pour le développement des sols actuels.

L’influence de ces formations superficielles sur la pédogenèse a été étudiée grâce à l’analyse des argiles minéralogiques et des conditions édaphiques régnant au sein des profils de sol, ainsi que par des observations microscopiques. Pour chaque type principal de matériel parental (calcaire, loess, moraine silicatée), une dynamique de pédogenèse a été identifiée en fonction des influences respectives du calcium, du fer et de l’aluminium. Ces dynamiques agissent plus particulièrement sur les processus d’altération de la fraction fine des sols (particules <2 mm). Dans cette fraction, les phases primaires (issues des roches) de la calcite, des oxy-hydroxydes de fer et des argiles minéralogiques sont dissoutes ou transformées. Les éléments chimiques et les particules ainsi libérés sont redistribués dans les sols et participent à la formation de phases minérales secondaires.

En conséquence, la présente recherche a permis de mettre en évidence que les sols actuels de la Haute-Chaîne du Jura se développent depuis 11’500 ans environ dans des matériaux minéraux complexes, constitués de sédiments hérités de la dernière phase glaciaire. Le substrat lithologique calcaire est généralement recouvert par des formations superficielles diverses. La couverture sédimentaire, en fonction de son épaisseur, perturbe le lien génétique entre la roche et les sols susjacents à des degrés divers. Les dépôts d’origine alpine provoquent l’apport de minéraux et d’éléments géochimiques variés dans les sols jurassiens, orientant la pédogenèse vers des voies d’évolution différentes de celles observées sur roche calcaire.

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