Max Lobe, la réjouissance contagieuse

Max Lobe. Master en politique et administration publique de l’IDHEAP en 2011. Ecrivain © Pierre-Antoine Grisoni - Strates
Max Lobe. Master en politique et administration publique de l’IDHEAP en 2011. Ecrivain © Pierre-Antoine Grisoni – Strates

Son dernier mail envoyé avant de se rencontrer, il l’a signé «Maxouille». On sentait qu’on allait bien l’aimer. Lorsqu’il a débarqué sur la terrasse du Bistrot du Flon, petit short, T-shirt turquoise, une fleur nouée à son sac à dos, s’excusant mille fois de son retard à cause d’un train raté, l’impression était confirmée. Max Lobe est Camerounais et homosexuel, oui. L’emballage. Un créneau peu occupé dans lequel on va pouvoir le classer. Peu importe. Max Lobe est avant tout écrivain. De la race des conteurs qui parviennent à vous tenir en haleine quatre heures d’affilée en interview, captant même l’attention des tables voisines. «On a écouté, on approuve!», dira une femme à côté, commentant notre discussion sur la liberté dans le couple.

Finalement, on ne lui aura pas posé trop de questions à Max. Parti comme il l’était, lui demander un souvenir de son cours préféré à l’uni semblait un peu benêt. L’UNIL a pourtant occupé une place de choix dans la vie du jeune homme de 28 ans, puisque c’est sa participation au Prix de la Sorge, remporté en 2009, qui lui a permis de faire son entrée en littérature. Il étudie alors en master à l’IDHEAP. L’anecdote mérite d’être partagée, même si Max Lobe la raconte mieux. Son ordinateur empli de textes écrits sans s’imaginer les publier un jour, il tombe sur l’affiche du Prix de la Sorge et se dit pourquoi pas. Le soir de la remise du prix, il préfère rentrer tranquillement chez lui après ses cours, mais dans le bus tombe sur un ami, par ailleurs membre des Belles-Lettres de l’uni. «Viens, il y aura à boire!» Max accepte de l’accompagner, mais sans avouer avoir pris part au concours. Et il ne dira rien jusqu’au moment où son texte est lu et qu’il constate que le public apprécie beaucoup. «Là, j’ai réalisé que mes mots pouvaient toucher et j’ai pris confiance en moi.» S’ensuivra la parution d’un premier livre, L’en­fant du miracle. Puis l’an passé 39 rue du Berne chez Zoé, qui vient tout juste de publier son dernier ouvrage: La Trinité bantoue.

A l’heure où nous rencontrions Max Lobe, il était au chômage depuis une semaine. Un écrivain en recherche d’emploi. «J’ai eu bien des expériences professionnelles dans ma vie, dont entre autres: représenter la Suisse en République Démocratique du Congo pour le DFAE. Je n’imaginais pas ne pas trouver de travail après tout ça. Mais si, c’est possible!» Il évoque le jeu subtil de la discrimination – «J’en suis convaincu, mais en suis-je directement victime?» – le réseautage en défaveur des immigrés mais nécessaire pour évoluer, le sacrifice de ses parents aussi, pour lui permettre de venir étudier en Suisse à 18 ans, d’abord au Tessin puis à Lausanne. Des thèmes mélangés allègrement en discutant et mis en scène dans La Trinité bantoue, qui prend pour point de départ la maladie de sa mère.On ne s’attardera pas, elle va mieux. Avec Max Lobe, les sujets sérieux s’évoquent en pirouettes. A l’image d’une plaisanterie qui court dans les rues camerounaises: trois années de suite, le Cameroun a été classé pays le plus corrompu au monde, «mais au moins nous sommes champions en quelque chose!». Un humour acide qui lui parle… Ses origines «bantoues avant tout», il ne les oublie pas, mais elles ne l’empêchent pas de se sentir «culturellement Cenovis» par ailleurs. Les traits d’esprit de Max Lobe n’en finissent pas de réjouir. Même s’ils laissent un petit goût amer, comme le Cenovis.

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