Les frontières se brouillent et on s’y croirait presque : les néons colorés hongkongais, les plaines désertiques californiennes, les reliefs brumeux islandais. Le climat est parfois capricieux : l’immensité montagneuse trop humide, le canyon trop chaud ou le béton trop froid. Pourtant, pour peu que l’on s’approche, les imperfections de la nuée pixelisée se révèle sur chacun des clichés de la série Nouveaux territoires (2022-2023).
Cinéaste, réalisateur et photographe autodidacte né à Genève, Pascal Greco a souvent privilégié les infrastructures urbaines dans ses travaux. L’attrait pour les créations humaines immortalisé à travers une série de Polaroids dans Hong Kong Neon (2021) ou encore dans le documentaire Tokyo Streets (2008), il se retrouve captivé par les paysages du jeu vidéo Death Stranding (2019) durant le premier confinement en raison de la pandémie. À défaut de pouvoir se rendre en Islande comme prévu, il redécouvre alors une nature inaccessible depuis son canapé.
L’in-game photography se caractérise par des clichés issus de la capture d’écran ou des modes photo intégrés aux jeux, activité courante pour les amateurs de jeux vidéo. Au travers d’un réalisme toujours plus frappant à mesure que consoles et jeux évoluent, les clichés de Pascal Greco interpellent, interrogent et mettent peut-être même mal à l’aise. Après son projet Place(s) (2021), Greco reprend donc sa console pour proposer la suite de son exploration des univers de jeux vidéo. D’une mégalopole dystopique dans Stray (2022) à la Californie réimaginée par Cyberpunk (2020) en passant par les montagnes de Death Stranding (2019) (fig. 1), Tom Clancy’s Ghost Recon Wildlands (2017) (fig. 2) et Assassin’s Creed: Valhalla (2020), l’artiste parcourt les paysages d’une culture numérique en plein essor. Il capture la nature, inhabitée ou surindustrialisée, mais surtout la nature-même d’un jeu vidéo, à la fois objet d’art et objet d’étude offrant une multitude de mondes à découvrir, infinis et sublimes.