Nicolas Bousser, Pierre Spicre au château Saint-Maire ? Le dossier complexe d’un peintre dijonnais du XVe siècle

Le château Saint-Maire, siège du Conseil d’État du Canton de Vaud, renferme plusieurs peintures murales datées entre le XVe et le XVIe siècle. Parmi celles-ci se trouvent un ensemble attribué au moins depuis le début des années 1930 à Pierre Spicre, peintre dijonnais dont le passage dans les sources est éclair. D’origine vraisemblablement nordique et peut-être tournaisienne, son nom apparaît pour la première fois dans les archives dijonnaises en 1470, avec une orthographe changeante et capricieuse allant de « Spicker », « Spilgr » ou encore « Spicr ». Retour sur l’origine de cette attribution et sur les problématiques autour du dossier complexe Spicre.

Anonyme, La Résurrection de Lazare, 3e tiers du XVe siècle, Beaune, chapelle Saint-Léger de la basilique collégiale Notre-Dame (photo Nicolas Bousser)

Thibault Hugentobler, Entre « classicisme et modernité ». Le décor intérieur du Tribunal fédéral à Lausanne

À l’occasion de l’inauguration du Tribunal fédéral de Mon-Repos à Lausanne en 1927, le critique Paul Budry évoque le caractère double de l’édifice, empruntant autant au « classicisme » qu’à la « modernité ». Cette formule trouve son pendant dans les étiquettes stylistiques tenaces qui qualifient encore aujourd’hui ce palais judiciaire : extérieur néoclassique, intérieur Art déco. De ce fait, une apparente dichotomie semble se dégager entre ces ensembles. Pourtant, l’observation minutieuse des formes et ornementations révèle un programme décoratif plus complexe. La présente étude s’attache à étayer les étiquettes stylistiques communément admises afin d’apporter quelques éclairages sur ce riche et impressionnant décor, ni totalement classique, ni totalement moderne.

Vue générale du premier étage (photo Jeremy Bierer, 2023)

Dave Lüthi, L’église Saint-John à Montreux-Territet. Histoire et architecture d’un monument importé

Construite à l’initiative de l’hôtelier Ami Chessex, l’église anglicane Saint-John de Territet a été conçue pour l’important communauté anglophone qui séjournait à Montreux dans le dernier quart du XIXe siècle et jusqu’à la première Guerre mondiale. Véritable morceau d’Angleterre, elle a été conçue en trois phases par trois architectes de renom – George Frederick Bodley, Richard Popplewell Pullan et Reginald Blomfield – et dotée d’un décor également importé depuis la Grande-Bretagne – vitraux, mobilier, orgues – et Bruges – le spectaculaire retable du maître-autel dû au sculpteur Alphonse de Wispelaere. Particulièrement bien conservée, restaurée avec soin, elle est l’une des plus importantes églises anglicanes de Suisse, rappelant à quel point la Suisse chantée par Rousseau et Byron était l’Arcadie des Anglais de la Belle-Époque.

La nef de l’église dans son état actuel, avec la charpente de bois apparente formant voûte (photo Rémy Gindroz, 2022)

Mathias Glaus, La chronologie de la cathédrale de Lausanne. Nouvelles données sur les voûtes quadripartites de la nef

Les analyses réalisées sur la voûte et les coursières hautes de la cinquième travée de la cathédrale de Lausanne ont permis de récolter deux bois d’œuvre qui offrent pour la première fois une date fixe pour la chronologie de la construction de l’édifice et plus particulièrement pour la seconde étape de la nef où des voûtes quadripartites ont été substituées aux sexpartites. Depuis plus d’un siècle, de nombreuses hypothèses de datation ont été proposées par les chercheurs successifs, privilégiant tantôt des comparaisons stylistiques, tantôt une interprétation des sources. La nouvelle datation de la seconde étape du chantier de la nef, en cours en 1195/96 nous oblige à reconsidérer toute la chronologie du chantier.

Vue de la voûte quadripartite de la cinquième travée (photo Claude Bornand, 2021)

Catherine Schmutz Nicod, Chaletisation à l’américaine. La Violette à Arzier

Profitant des recherches historiques effectuées autour de la maison de la Violette à Arzier, l’article propose une première synthèse du mouvement de « chaletisation » que connut la région nyonnaise dans les années 1860 à 1870. L’article affronte le propos tant du point de vue du contexte social, que du point de vue architectural et stylistique. Il ne distingue pas les objets selon les modalités exactes de leur « chaletisation », mais s’intéresse plus spécialement à l’idée générale qui a primé, décorative avant tout, faisant référence à l’architecture rurale vernaculaire en bois. Le style des chalets suisses, ou rustique national, s’inscrit dans un courant international qui s’épanouit surtout en France, en Angleterre et en Allemagne dans la première moitié du XIXe siècle.

La Violette après la deuxième phase de travaux datant de 1876. La mise en couleurs, vert et blanc, n’est pas d’origine (photo Jeremy Bierer, documentation MAH-PBC Vaud)

Pauline Nerfin, La balade des frères Spring dans le Pays de Vaud : chalets bienvenus ?

Cet article s’intéresse au chalet suisse préfabriqué au début du XXe siècle, tant dans le canton de Vaud que celui de Genève, via l’exemple des frères Spring. Cette fabrique qui s’implante à Genève en 1903 domine rapidement le marché romand mais est malheureusement peu documentée. Son succès lui donne l’opportunité de construire au-delà des frontières cantonales et c’est ainsi qu’elle est chargée par M. Sack d’ériger un petit chalet dans la commune de Pully au début des années 1930. Ce cas d’école questionne le rapport ambigu qu’entretiennent les administrations publiques, les autorités politiques, les architectes et les propriétaires-mandants avec l’objet architectural qu’est le chalet. En effet, dans un grand nombre de communes, le chalet est peu à peu mis au ban, vilipendé par les plans d’affectation et d’urbanisme. L’ampleur de la polémique ne s’épuisera finalement qu’avec l’épuisement de la mode du chalet urbain.

Chalet-villa « Les Roses » du prince Masséna d’Essling, Francis Gindroz, architecte. Photographe anonyme, non datée (Centre d’iconographie de Collonges-Bellerive)

Denyse Raymond, Leysin, communauté paysanne. Vivre et bâtir avant l’essor médical et touristique

À travers la présentation détaillée de l’évolution de la commune de Leysin, l’article pose les bases matérielles et typologiques du chalet, rappelant notamment qu’il n’est pas une maison paysanne en madriers – Le swiss chalet est une invention récente. Les différentes constructions en bois du village sont ainsi présentées selon les liens qu’elles entretiennent avec l’activité agricole d’altitude, prise entre vignes, champs et prés. Leur description détaille le développement des plans, le soin apporté aux inscriptions des façades et esquissent une brève sociologie des charpentiers qui œuvrèrent à Leysin. L’article ne manque pas d’aborder la modernisation du village, d’abord par le développement des sanatoriums, puis par le constat des conséquences matérielles de la nouvelle vie d’altitude.

Maison de 1785, le double escalier conduit à la cuisine, avec une chambre de chaque côté (photo Denyse Raymond)