Améliorer le rendement des portefeuilles obligataires en alliant machine learning et théorie économique

De la santé au marketing, de l’informatique aux transports, l’intelligence artificielle (IA) et le machine learning bouleversent le monde des affaires. Les services financiers ne font pas exception.

Donner plus de sens à l’investissement factoriel

Au cours des 30 dernières années, l’investissement en actions et en obligations s’est transformé avec l’utilisation de stratégies qui se concentrent sur des caractéristiques spécifiques de l’actif à investir, comme la valeur ou le momentum (investissement factoriel). Bien qu’il soit devenu extrêmement populaire, l’investissement factoriel se heurte à une difficulté majeure: déterminer les facteurs les plus importants pour pouvoir prédire les performances.

C’est là que l’IA peut faire la différence. Comme le révèlent de nouvelles recherches, il est possible de combiner l’IA et la théorie économique pour améliorer les décisions d’investissement factoriel prises par les gestionnaires d’actifs et les allocataires. « Il existe des centaines de facteurs; en finance, nous appelons cela un zoo de facteurs« , explique Amit Goyal, professeur de finance à HEC Lausanne (UNIL).   » Le Machine Learning permet de donner plus de sens à ce zoo de facteurs, de le structurer et de composer de meilleurs portefeuilles d’investissement. »

Allier machine learning et économie

Dans leur travail de recherche intitulé « Predicting Corporate Bond Returns: Merton Meets Machine Learning », le Prof. Goyal et ses co-auteurs se concentrent sur les obligations d’entreprise, un marché qui s’élevait en 2020 à plus de 49 000 milliards de dollars. Ils utilisent les données de transactions, entre juillet 2002 et décembre 2017, de plus de 22’000 obligations émises par env. 6’000 entreprises. Après avoir saisi plus de 40 facteurs d’obligations d’entreprise dans une série de différents modèles de machine learning, ils reprennent, pour chacun des modèles, les prévisions des obligations d’entreprise les plus performantes et les moins performantes. Ils utilisent ensuite ces informations pour construire une série de portefeuilles d’investissement simulés d’obligations d’entreprise. Puis, avec ces données de transaction, ils vont comparer les prédictions des modèles de machine learning avec la performance réelle des obligations.

Les chercheurs ne se limitent pas à utiliser le machine learning pour comprendre les facteurs obligataires. Ils ajoutent également la théorie économique à leur expérience de machine learning, en prenant en compte la structure du capital des entreprises. « Les obligations sont une partie de la structure du capital de l’entreprise, l’autre étant les actions », explique A. Goyal. « Quoi qu’il arrive à la santé financière de l’entreprise, cela aura un effet à la fois sur les actions et sur les obligations, et il y a donc naturellement une relation entre les deux.

« Imaginez deux machines« , explique A. Goyal. « L’une est alimentée par des données sur les facteurs boursiers et utilise le machine learning pour prédire le rendement des actions, l’autre est alimentée par des données sur les facteurs des obligations d’entreprise et utilise le machine learning pour prédire le rendement des obligations. Pour inclure l’élément économique, nous faisons en sorte que ces deux modèles communiquent entre eux. »

IA + théorie économique = de meilleurs résultats

Comme le fait remarquer A. Goyal, les meilleurs résultats sont obtenus lorsque les « machines » des obligations d’entreprise et des actions interagissent entre elles. « Si je laisse le machine learning autonome prédire les rendements obligataires, je m’en sors bien, je gagne de l’argent. Mais lorsque je fais dialoguer ces deux machines, ma machine de prédiction des obligations fait encore mieux. Nous apportons une certaine structure à la machine, en la guidant sur des voies dictées par la théorie économique. Cela permet à la machine de donner de meilleures prévisions pour les rendements obligataires. Tout ce que le modèle boursier nous dit en termes de prévisions de rendement des actions peut être utilisé pour améliorer les prévisions de rendement des obligations. Cette idée est le point fort de notre article ».

Il s’agit d’une approche rigoureuse qui applique le machine learning à l’investissement dans les titres à revenu fixe, en particulier les obligations d’entreprise. Une approche qui, en principe, devrait fonctionner dans tous les systèmes pour construire un meilleur portefeuille de titres à revenu fixe.


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