Thèse en sciences de la Terre, soutenue le 4 octobre 2024 par Charlotte Wolff, rattachée à l’Institut des sciences de la Terre (ISTE) de la FGSE.
Les mouvements gravitaires, tels que les glissements de terrain, les chutes de blocks ou les laves torrentielles, font partie des aléas naturels, au même titre que les séismes ou les éruptions volcaniques. Leur prédiction, bien que présentant une part d’incertitude, est essentielle afin de protéger les populations, les bâtiments et les voies de transport susceptibles d’être touchés, surtout que certains facteurs augmentent l’exposition et le risque. Les mouvements gravitaires par exemple sont plus susceptibles d’arriver dans les zones montagneuses et le dérèglement et le réchauffement climatiques amènent également leur lot d’incertitudes dans la prédiction de ces évènements, ayant une action d’altération de la roche par l’action des précipitations plus intenses, des fontes de neige et du dégel plus précoces dans l’année et des variations thermiques plus importantes. Néanmoins, les zones d’habitation et les infrastructures continuent de s’étendre dans ces régions montagneuses.
Pour prévoir et minimiser les futurs pertes et dommages potentiels, il est nécessaire de mettre en place des stratégies afin d’identifier, d’analyser et de comprendre ces aléas gravitaires. Cela passe par une instrumentation de surveillance et des analyses spécifiques sur le terrain, ainsi que par des méthodes de traitement des données dédiées, présentées dans une première partie de ce manuscrit.
L’analyse complète d’un aléa lié à un mouvement gravitaire de grand volume peut se décomposer en deux grandes parties, à savoir
- la description de scénarios de rupture de compartiments instables en justifiant leur volume, leur mécanisme et leur probabilité de se produire et
- la description de scénarios de propagation en justifiant la distance maximale atteinte et la surface impactée.
Cette approche en deux étapes est appliquée dans la deuxième partie de ce manuscrit, pour l’étude d’une instabilité majeure située dans les Alpes Suisses, appelée Cima del Simano. L’étude de cette instabilité est motivée par une fracture de 500 m de long, les fréquentes laves torrentielles endommageant les infrastructures, et le glissement de terrain historique de Monte Crenone en 1513 ayant eu lieu dans la même vallée.
La détection des zones subissant des mouvements de petites amplitudes (quelques mm/an) et des chutes de blocks, couplée à une analyse de la géométrie et de la géologie du massif, a permis de proposer huit scénarios de rupture avec des probabilités de se produire différentes. La propagation de ces volumes de rupture a ensuite été simulée afin de prédire les zones potentiellement affectées ainsi que les zones d’accumulation de débris pouvant engendrer des laves torrentielles dans un second temps.
L’importance du rôle joué par des facteurs météorologiques et climatiques a également été évaluée. L’augmentation de la température entraîne la disparition du permafrost et réduit la cohésion de la roche. Les cycles de gel-dégel fatiguent la roche et induisent la propagation des fractures. L’impact des variations cycliques des températures sur la contraction et la dilatation de la roche a été tout particulièrement étudié sur la falaise de La Cornalle (située à l’Est de Lausanne, Suisse), montrant des déplacements cycliques sur 24 heures corrélés aux variations de température.