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Thèse en géographie, soutenue le 3 juillet 2024 par Hannah Widmer, rattachée à l’Institut de géographie et durabilité (IGD) de la FGSE.
Chaque jour, dans l’espace public, les citadin·e·s d’une ville font l’expérience de la diversité. Dans un environnement urbain, nous rencontrons au quotidien d’innombrables « étranger·ère·s » dans notre vie quotidienne. Du fait que les villes sont caractérisées par une diversité de modes de vie culturels et socio-économiques, ces étranger·ère·s sont, d’une part, inconnus, et d’autre part étranges parce qu’ils proviennent de milieux très différents des nôtres.
Dans un contexte urbain, l’espace public joue un rôle important en tant que lieu de loisirs, d’activités sportives, de mobilité et de détente. Il sert également de lieu où une identité culturelle et l’appartenance à un quartier ou à une autre communauté se créent et s’expérimentent, par exemple dans le cadre de célébrations. Il convient de souligner tout particulièrement la fonction de l’espace public en tant que lieu de rencontre. Cependant, la mobilité des personnes fait que certains groupes ne se rencontrent jamais dans les espaces publics, même s’ils habitent dans un quartier mixte. En outre, les rencontres avec des étranger·ère·s, même si elles ne sont que fugaces, sont ambivalentes : elles peuvent être effrayantes ou inquiétantes d’une part, mais aussi inspirantes et passionnantes d’autre part.
Cette thèse a donc pour objectif d’explorer la mesure de la diversité sur les places publiques à l’échelle du quartier, la perception et l’expérience de la diversité par les usager·ère·s, et le rôle de l’aménagement à ces égards. Elle propose un outillage conceptuel et une méthodologie innovante pour étudier l’utilisation des places publiques. Les places Lindenplatz, Hallwylplatz, et Idaplatz à Zurich (Suisse) ont été analysées à l’aide d’une approche mixte. Des comptages, des observations et une enquête (n=1 474) ont été combinés à des entretiens qualitatifs (n=63) avec des personnes qui utilisent les trois places de différentes manières.
Les résultats montrent que les usager·ère·s des trois places de quartier sont assez diversifié·e·s en termes d’origines culturelles, de classes sociales, d’âges, de niveaux d’éducation et de statuts professionnels. La répartition entre hommes et femmes est équilibrée. L’aménagement des places joue un rôle important pour les activités optionnelles (rencontrer la famille ou des amis, se détendre, manger, boire, etc., par opposition aux « activités nécessaires » telles que le passage ou les achats): plus il y a de places pour s’asseoir, plus la proportion de personnes qui restent, et ne se contentent pas de traverser les places, est élevée.
Si l’on compare la diversité des usager·ère·s des places à celle de la population du quartier, il est évident qu’il existe un écart de diversité. La diversité sur les places est plus faible que dans le quartier si l’on tient compte de l’origine nationale, du revenu et de l’éducation. La « société mainstream », c’est-à-dire les personnes non issues de l’immigration, disposant d’un revenu moyen et d’un diplôme de l’enseignement supérieur, est surreprésentée sur les places.
Les personnes qui fréquentent les trois places perçoivent être entourées de personnes qui diffèrent d’elles-mêmes à bien des égards. Toutefois, cette situation ne pose généralement pas de problème pour les personnes s’y trouvant confrontées et ne les incite que rarement à modifier leur comportement. Si des personnes ou certains comportements sont perçus comme gênants, des éléments d’aménagement permettant de choisir librement sa distance par rapport aux autres (par exemple des chaises mobiles ou des bancs placés à différents endroits et orientés différemment) facilitent la cohabitation sur les places.Pour encourager les rencontres entre inconnus et au-delà des différences, la conception des places publiques pourrait offrir des possibilités qui conviennent à différents groupes de population, par exemple à travers une variété d’utilisations des rez-de-chaussées ou des éléments tels que des jeux d’eau, universellement attrayants. Ces espaces pourraient également offrir des adaptations flexibles de la distance entre les usager·ère·s de la place par un aménagement approprié, tout en promouvant la coexistence dans les espaces publics – quelle que soit la distance à laquelle elle se produit.