Jumeaux numériques pour les villes : il est nécessaire d’intégrer davantage de complexité dans les analyses

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Céline Rozenblat, Institut de géographie et durabilité (IGD)

En plein essor, les représentations virtuelles de villes – ou jumeaux numériques locaux (Digital Twin Cities) – visent à faciliter la gestion et la planification des systèmes urbains à court et moyen terme. Mais sont-elles pertinentes ?

L’Union européenne a mandaté un groupe d’expert·e·s en modélisation, dont fait partie la prof. Céline Rozenblat, afin de l’évaluer. Résultat : les modèles souffrent d’un manque de complexité, et négligent notamment les composantes socio-économiques du tissu urbain, ainsi que les approches à différents niveaux et échelles nécessaires à une planification de développement urbain durable à long terme.

Créés il y a plus de cinquante ans par la NASA pour tester des fusées, les « digital twins » (jumeaux numériques) se sont progressivement développés dans de multiples domaines. Depuis quelques années le développement de Digital Twin Cities a connu un essor en parallèle aux recherches menées sur le sujet (> 400 articles publiés en 3 ans). 

Ces « jumeaux numériques locaux » sont la représentation virtuelle des processus et des systèmes qui constituent la ville. Ils visent à faciliter sa gestion et sa planification à court et moyen terme. Leur modélisation repose sur de grandes quantités de données provenant de systèmes humains et physiques, pour lesquels des capteurs automatisés sont de plus en plus utilisés pour fournir ces données en temps quasi réel.

En 2022, une commission d’expert·e·s, dont fait partie Céline Rozenblat, professeure à l’IGD, a été mandatée au sein de l’Union Européenne, afin d’établir un standard ISO définissant les critères à remplir pour l’établissement de jumeaux numériques locaux. Un article publié dans Nature computational sciences « The role of complexity for digital twins of cities »(accès au texte intégral en lecture seule via un lien Sharedlt) dresse un bilan des modèles existants et adressent plusieurs critiques à leur égard : manque de transparence des données et des modèles utilisés ; centrés sur les infrastructures et le bâti des villes ; analyses effectuées à la même échelle et s’arrêtant la plupart aux limites administratives de la ville centre du temps. Cette approche de type « mécanique » montre des lacunes significatives et néglige des éléments déterminants dans le développement d’une ville, tels que le tissu économique et les liens sociaux. De même les interactions à des micro-niveaux qui peuvent influencer des éléments à plus large échelle.

Ainsi selon les expert·e·s, il est nécessaire d’introduire dans les modèles de villes numériques plusieurs niveaux de complexité et différents types de données, afin d’avoir une représentation la plus fidèle possible des villes réelles. Il sera ainsi possible de répondre aux besoins des gouvernances de ces agglomérations en leur donnant les moyens d’agir à plusieurs niveaux, ainsi qu’à différentes échelles d’espace et de temps.

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