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Thèse soutenue par Anthony Michelon, le 26 janvier 2022, Institut des dynamiques de la surface terrestre (IDYST)
Les bassins versant de haute altitude jouent un rôle primordial dans le cycle de l’eau en milieu Alpin. En accumulant la neige en hiver, puis en la relâchant plus tard lors de la période de fonte, ils jouent le rôle de « château d’eau pour l’humanité ». L’augmentation actuelle des températures moyennes provoque toutefois un changement du type de précipitations, avec d’avantage d’évènements de pluie et moins d’accumulation de neige. La conséquence observée est un décalage du pic annuel de débit plus tôt dans la saison, ce qui impacte la disponibilité en eau plus tard dans l’année, lorsqu’elle devient primordiale. Bien que cette tendance soit déjà observée et bien documentée, les études hydrologiques sur les chemins d’écoulement de l’eau de fonte sont rares, et les modèles souffrent du manque de connaissance sur ces processus à l’échelle du bassin versant.
Dans cette thèse, nous proposons d’étudier les chemins d’écoulements de l’eau dans un tel environnement Alpin en étudiant le Vallon de Nant, un petit bassin versant (13.4 km²) situé dans la partie ouest des Alpes Suisses. Ce bassin, très largement influencé par la neige, est l’un des rares bassins non perturbé (en termes d’utilisation humaine des ressources en eau) en Suisse, et intéresse de très divers domaines de recherches en géosciences. Les recherches hydrologiques dans ce bassin ont toutefois commencé en même temps que cette thèse, avec donc aucunes connaissances préalables. Un point de départ pour cette étude fut l’observation détaillée des processus météorologiques intéressants pour l’hydrologie. Bien que le terrain d’étude soit petit, l’une des premières interrogations était de savoir si à cette échelle l’hétérogénéité spatiale de la pluie avait un impact sur les variations de débit de la rivière principale à l’exutoire. Pour ce faire, un réseau temporaire de 12 pluviomètres a été déployé et 48 évènements de pluie ont été enregistrés. Ces mesures ont permis de mettre en évidence que, même à cette échelle, l’hétérogénéité de certaines caractéristiques du bassin avait bien un impact sur la réponse de la rivière à l’exutoire. Bien qu’un tel réseau a été nécessaire pour cette étude, une telle densité de points de mesures n’est pas absolument nécessaire, et nous avons déterminé que 3 pluviomètres seulement sont nécessaires pour saisir l’essentiel de l’hétérogénéité des précipitations dans ce bassin versant.
Dans un second temps, les chemins d’écoulement de l’eau ont été étudiés à divers endroits dans le bassin versant, en mesurant diverses propriétés de l’eau, à savoir sa température, sa conductivité électrique, et sa composition en isotopes stables (2H, 17O et 18O). Les mesures de température ont été effectuées en continu à la sortie des différentes sources d’eau du bassin, et les mesure de conductivité électrique et de composition en isotopes stables a été effectué en laboratoire à partir de 2861 échantillons qui ont été collectés sur le terrain à partir de diverses sources d’eau (provenant principalement de sources, de rivières, de l’eau de pluie, et du manteau neigeux).
Cette étude a notamment permis de montrer que même au cours du pic annuel de débit, lorsque les apports en eau de fonte sont si importants que l’eau de toutes les sources montrent des caractéristiques similaires, l’eau de fonte s’écoule jusqu’à la rivière par un chemin de subsurface. Nous avons également mesuré un apport continu d’eau à la rivière lors de la période de débit de base en hiver, et nous avons identifié des écoulements de faible profondeur au cours d’évènements de pluie qui surviennent pendant la période de fonte de neige.
Au-delà des conclusions spécifiques à ce terrain d’étude, notre analyse détaillée des différents traceurs a montré comment, ensemble, ils contenaient des informations. La température de l’eau des sources renseigne sur la profondeur des chemins d’écoulement, ainsi que sur la manière dont les différents réservoirs sont interconnectés. Les valeurs de conductivité électrique des sources et du cours d’eau principal peuvent être interprétés en termes d’âge de l’eau (plus l’eau est au contact d’un sol minéral, plus elle va se charger), et donc informer sur la longueur du chemin d’écoulement de subsurface. Contrairement à la température et à l’EC, qui eux sont impactés par les propriété locales du sol qui est traversé, les isotopes stables de l’eau fournissent des informations sur l’origine des précipitations avant qu’elles ne pénètrent le sol. Par exemple, les isotopes stables de l’eau informent sur la présence d’eau de fonte récente dans la rivière, et donc sont complémentaires à la température et à l’EC.