Une nouvelle professeure Eccellenza aborde le rôle du bois flottant dans la dynamique des rivières

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La FGSE a le plaisir d’accueillir depuis avril 2020 Virginia Ruiz-Villanueva, bénéficiaire d’une bourse Eccellenza. Elle va s’intéresser à la dynamique des rivières et au rôle particulièrement méconnu des bois qui y sont charriés.

Virginia Ruiz Villanueva, Institut des dynamiques de la surface terrestre (IDYST)

Quelle est votre principale motivation pour votre projet Eccellenza ?

Pour préserver et restaurer des rivières saines et dynamiques, tout en atténuant les risques de crues, je cherche à mieux comprendre un trio crucial : débit-sédiments-bois. En tant que géomorphologue, je m’intéresse en effet aux processus physiques qui façonnent la surface de la Terre et interagissent avec nous, les humains. Et en tant que spécialiste en géomorphologie fluviale, je cible les processus qui contrôlent la forme et la fonction des rivières.

L’influence des arbres abattus, troncs, branches et racines qui gisent dans la rivière – ce qu’on appelle le bois flottant – est encore négligé. Classiquement, pour conceptualiser la physique des rivières, on se concentre essentiellement sur les interactions entre l’eau et les sédiments. Pourtant, en interagissant avec le débit et les sédiments, le bois des cours d’eau a une grande importance. Il préserve l’intégrité physique et écologique de la rivière, sa santé en somme. D’un autre côté, de grandes quantités de bois charriées lors des crues peuvent constituer un danger en cas d’embâcle. L’embâcle, accumulation de bois au niveau d’infrastructures telles que les ponts, présente un risque majeur. La santé d’une rivière dépend ainsi des régimes d’écoulement, de sédimentation et de bois. Je m’attache à évaluer tout particulièrement ce dernier élément, qui est rarement considéré.

Ici, vous pouvez voir une accumulation de bois dans un ruisseau du Vallon de Nant (Vaud). C’est un bel exemple de l’influence du bois sur le fonctionnement et la forme des cours d’eau. Le bois accroit la complexité physique des rivières et améliore la diversité des habitats, donc également la biodiversité au sens large. Le bois s’accumule et forme un seuil qui crée un reflux, dissipe l’énergie et la vitesse de l’écoulement, stimule le dépôt de sédiments en amont et une dépression en aval (affouillement local) entrainant la formation d’un bassin.

Quelles questions allez-vous aborder ces prochaines années à la FGSE ?

Mon projet Eccellenza du FNS, « Vers une nouvelle compréhension des écosystèmes fluviaux : intégrer le régime du bois à travers de multiples échelles », intègre le facteur « bois des cours d’eau » au sein de diverses disciplines et plusieurs échelles spatiales et temporelles.

Avec mon équipe, nous allons faire progresser la modélisation de l’approvisionnement en bois en développant des modèles probabilistes et décrire pour la première fois la cascade de bois. Pour déduire l’origine du bois stocké dans les rivières, nous combinerons la dendrochimie et les techniques d’empreintes digitales. L’ambition est d’établir le premier observatoire suisse de la dynamique du bois charrié et de surveiller le mouvement du bois dans plusieurs rivières alpines. Cela permettra, entre autres, d’estimer la quantité et la durée de stockage du bois dans les rivières alpines, ainsi que les liens entre la forêt voisine et les caractéristiques du bois stocké dans les cours d’eau. Enfin, nous élaborerons des recommandations relatives à l’utilisation du bois des cours d’eau pour la restauration des rivières.

Pourquoi avoir choisi la FGSE pour mener à bien votre projet ?

Pour comprendre les processus à la surface de la Terre en utilisant une approche multidisciplinaire, la FGSE et l’IDYST étaient la solution idéale pour mon équipe et moi-même. Avec d’excellents spécialistes de la terre et de l’environnement travaillant sur des sujets similaires, mais aucun sur le bois des rivières, et des installations de pointe, l’IDYST nous offre un formidable environnement de travail. Le projet bénéficiera des fortes interactions collaboratives entre les groupes, notamment pour l’analyse des processus géomorphologiques, l’utilisation de la télédétection et des drones, le développement de la géochimie isotopique et élémentaire, et l’écologie. Nous espérons renforcer les liens existants entre les groupes, tout en devenant part intégrante des activités de l’Institut. Malgré les difficultés de lancement du projet pendant la pandémie (j’ai commencé en avril 2020), l’accueil de la FGSE a été excellent, et nous sommes déjà parfaitement intégrés.

Un mot sur votre nouvelle équipe ?

Grâce à la bourse Eccellenza du FNS, je construis un groupe de recherche sur les écosystèmes fluviaux (RivES, River Ecosystems Research Group) à l’IDYST. L’équipe sera composée de trois doctorants, d’un assistant de recherche et d’un post-doc. Je pense que la meilleure façon de concevoir et mettre en œuvre notre projet est de constituer une équipe interdisciplinaire, pour s’appuyer sur les connaissances de différentes disciplines. Ainsi, les membres de l’équipe ont une formation très variée, comme l’ingénierie forestière et environnementale, la géomorphologie, la géologie, la biologie ou l’écologie.

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