Thèse soutenue par Leonardo COLAVITTI le 26 juin 2020, Institut des sciences de la Terre (ISTE)
La sismologie passive utilise des sources naturelles pour imager l’intérieur de la Terre
Classiquement, les ondes longitudinales provenant des tremblements de terre sont enregistrées et utilisées ; si ces séismes sont proche et sous la zone d’étude, une bonne image de la croûte terrestre peut être obtenue. Plus récemment, le bruit ambiant sismique – causé par l’interaction des océans et de l’atmosphère avec la Terre solide – a été exploité pour tirer des informations sur la vitesse de propagation des ondes transversales dans le sous-sol. Ces deux méthodes ont chacune leurs limitations, ce que j’essaie de dépasser en proposant une nouvelle méthode d’imagerie 3-D. Dans ma thèse j’ai développé cette méthode et écrit les logiciels correspondants, pour ensuite l’appliquer aux Alpes Centrales. Cette zone a une histoire et structure tectonique complexe, et imager les détails reste un défi et un objectif d’actualité de la géophysique.
La nouvelle méthode développée ici se base sur le fait que des ondes longitudinales, en arrivant à une limite de couche franche dans la Terre, transforment une partie de leur énergie en ondes transversales. Le bord entre la croûte et le manteau étant la plus marquée de ces limites, et comme d’autres peuvent exister à des profondeurs plus faibles, la nouvelle méthode est particulièrement bien adaptée à l’imagerie de la croûte entière. La seule condition d’applicabilité est le déploiement d’un réseau suffisamment dense de sismomètres à la surface de la Terre, sans qu’il soit large ou qu’il y ait des séismes locaux, car c’est les séismes lointains autour du monde qui sont la source de l’énergie.
Les principaux avantages de la méthode sont l’imagerie en 3-D, la localisation des limites franches, et la détermination de la vitesse de propagation d’ondes transversales à travers toute la croûte. Pour ce faire, plusieurs éléments clés ont été développés et mis ensemble. D’abord, un calcul très exacte de la géométrie de la trajectoire des rais dans un milieu 3-D et en considérant la transformation longitudinale-transversale. Ensuite, une nouvelle façon de décrire la structure de la croûte terrestre, qui permet d’imager les limites franches en profondeur de manière flexible, et des variations de vitesses à la fois rapides (à travers ces limites) et lentes (à travers les couches). Finalement, une procédure d’inversion de données sismologiques, basée sur un échantillonnage aléatoire des paramètres du modèle, qui trouve la gamme des meilleurs résultats pas-à-pas le long d’un itinéraire couvrant la zone d’étude. De nombreux tests ont été effectués pour calibrer la méthode et améliorer sa performance.
L’application aux Alpes Centrales utilise une grande quantité des données sismologiques de haute qualité. Le modèle de départ se base sur des études précédentes, et puis notre méthode tourne pour livrer des résultats sur un maillage de 25 km de la zone d’étude. L’épaisseur de la croûte augmente sous les Alpes, et ainsi reflète la topographie. On trouve également un saut net à la limite entre les deux plaques à l’origine de la collision alpine, l’Europe et l’Adria (un terrain faisant partie de l’Afrique dans le passé). La carte des vitesses de propagation d’onde montrent une différence entre la chaîne et l’avant-pays européen. De plus, une zone particulière de vitesses peut être contournée, ou des séismes ont lieu dans la croûte inférieure : nous attribuons la différence de cette zone par rapport à d’autres à des différentes propriétés mécanique des roches dues à l’héritage tectonique.
Nos résultats sont encourageants, aussi en comparaison avec des études précédentes. Des développements futurs de cette méthode peuvent inclure des inversions conjointes avec la gravimétrie ou d’autres types de tomographies sismologiques.