Cinémathèque française, Paris
Nicolas Dulac et Vincent Sorrel, « Les contre-emplois de la caméra Bolex ».
Nous verrons dans cette communication comment la société suisse Paillard, qui fabriquait jusqu’alors des instruments de musique mécanique, a développé la célèbre caméra Bolex H16. À partir de documents inédits collectés par ceux-là même qui l’ont conçue et fabriquée de 1935 à 1975, nous nous pencherons plus précisément sur les contre-emplois, les contradictions, l’ambivalence qui la caractérisent et lui confèrent un statut particulier parmi les caméras substandard de l’époque. En conservant la technicité issue d’une grande précision horlogère, ceux qui aimaient fabriquer cette caméra amateur ont résisté à l’automatisation et, ce faisant, préservé la possibilité de gestes et d’usages allant à contre-courant de la tendance générale. C’est l’un des nombreux paradoxes derrières le succès de cette caméra amateur de précision : des cinéastes expérimentaux s’en sont servis pour dérégler le temps et créer des débordements cinématographiques. La H16 représente aujourd’hui le point de départ d’une réflexion sur le statut de la caméra amateur et sur l’innovation au service de la création alors que la caméra, d’une longévité extraordinaire, n’a que peu évolué.