Quentin Kany

Système d’irrigation ancestrale

Quentin Kany (HEC, 2018) a remis au goût du jour un système ancestral d’irrigation pour balcons et potagers en ville. Quand l’esprit d’entreprendre rencontre les savoirs d’un autre temps…

Parlez-nous de votre société

Wepot est né il y a 3 ans, sur les bancs de l’université avec mon ami et aujourd’hui co-fondateur Clément Perez. Durant notre dernière année de bachelor, nous avions plus de temps libre pour développer des projets. C’est en discutant avec un ami de toutes nos idées les plus folles que nous avons décidé de donner une chance à celle qui paraissait la plus réaliste en nous inscrivant au concours Start Lausanne. Ce concours–organisé par une association d’étudiant·e·s de l’UNIL et de l’EPFL–a pour objectif principal d’encourager la création de start-ups ex nihilo.

Nous étions parmi les finalistes mais n’avons pas gagné si bien que nous n’avons pas obtenu  les 30’000 francs pour démarrer notre projet. Cela ne nous a toutefois pas empêchés de nous lancer.

Au commencement, Wepot était un concept de potagers verticaux adaptés pour la ville, avec un système d’irrigation ancestral appelé Olla (prononcer Oya). L’idée des potagers verticaux était que chaque client puisse personnaliser le sien selon l’espace à sa disposition. Nous voulions avoir un impact positif sur la planète et sortir d’un modèle classique de business que nous avons pu rencontrer pendant nos études.

Après le concours, nous avons légèrement changé notre concept pour nous focaliser uniquement sur le système d’irrigation ancestral des Ollas mais avec la même ambition initiale: rendre le jardinage accessible au plus grand nombre, et ce, de façon écoresponsable.

Êtes-vous né dans une famille d’entrepreneur·e·s?

Non pas du tout. Tous les membres de ma famille travaillent dans le domaine médical. Moi, je rêvais de monter ma propre entreprise, c’est pour cela que je me suis inscrit à la Faculté des hautes études commerciales.

Quelle était votre situation personnelle au démarrage de votre projet?

Cette idée de monter mon projet a macéré dans ma tête pendant mes deux premières années d’études. J’étais déjà impliqué dans le monde associatif, par envie de découvrir un autre aspect du monde, d’avoir des responsabilités et surtout de créer des projets et événements autour d’une équipe.   En 3ème année, avec plus de temps à disposition, je me suis dit que le moment était venu de concrétiser ce rêve d’entreprise. Pour résumer, j’étais encore aux études, sans un sou et plein d’idées dans la tête.

Quel soutien vous ont apporté vos proches?

Après notre échec au concours Start Lausanne, nos parents et amis respectifs nous ont généreusement soutenus sur le plan financier pour nous permettre de nous lancer. Tout au long de notre aventure avec Clément – mon associé – nous nous motivions l’un l’autre et demandions régulièrement le feedback de nos amis afin de nous améliorer. Grâce à eux, nous avons pu concrétiser certaines idées dont un nouveau produit qui arrive prochainement mais que je ne peux pas encore dévoiler…

Quel est le trait de votre caractère qui s’est révélé le plus précieux pour vous lancer dans cette aventure?

Mon sang-froid, autrement dit ma maîtrise du stress. En entrepreneuriat on ne sait jamais à quoi s’attendre. Il faut être prêt à rebondir lorsque quelque chose n’a pas fonctionné comme prévu. Si on se laisse submerger par le stress, on perd le contrôle et ses moyens. Mon côté fonceur est un autre trait de caractère qui m’est très utile. Je n’ai pas peur de passer à l’action et je n’attends pas que tout soit parfait pour me lancer. Sinon je ne ferais jamais rien.

Quel était votre pire cauchemar au début? Et aujourd’hui?

Rien ne me vient à l’esprit. Je pense que j’étais tellement dans l’action et la mise en place de notre projet que je n’ai pas eu le temps de penser à ce qui pourrait arriver de mal.

Aujourd’hui mon plus grand souci est le fait que notre projet ne puisse pas être breveté, car il existe depuis plus de 4000 ans. On peut protéger le design mais pas le produit qui est un héritage culturel. Avec cette situation, nous courons le risque que notre concept soit copié par une grande boîte sans valeur écologique qui s’accapare tout le marché. Au niveau de la vie quotidienne, je dirais l’éventualité de ne pas m’entendre avec mes associés. J’ai des amis qui ont vécu cela et qui sont maintenant en procès. Ça, c’est un vrai cauchemar!

Deux tâches totalement saugrenues que vous avez dû effectuer à une étape ou l’autre du processus.

Au début, comme nous n’avions pas de locaux, c’est la chambre de mon ami et partenaire au travail qui a servi de local de stockage pour tout le matériel. Les cartons s’empilaient jusqu’au plafond.

Lors de la finale du concours Start Lausanne, nous devions présenter notre projet au public en 2-3 minutes devant un parterre de 300 personnes, à l’Amphimax. Nous voulions impressionner notre audience en présentant une partie de notre show sous la forme d’un rap. Une fois sur scène, la première phrase de la chanson terminée, nous avons tous les deux eu un blanc. Ce fut un vrai moment de solitude. Après une minute de bafouillage, nous nous sommes rattrapés grâce à un ami qui, connaissant les paroles, nous les a soufflées depuis l’audience.

Une activité à laquelle vous avez dû renoncer depuis que vous êtes à la tête de votre entreprise.

Un travail fixe rémunéré. Actuellement, je passe d’un petit boulot à l’autre, ce qui n’est pas idéal pour se construire une expérience professionnelle en entreprise. Mais c’est le seul moyen pour moi d’avoir suffisamment de temps pour travailler sur mon projet entrepreneurial. J’y consacre en moyenne entre 20 et 30 heures en semaine, plus un jour complet durant le weekend.

Le défi que vous avez relevé et qui vous fait bomber le torse quand vous y pensez.

Il n’existe que quelques entreprises dans le monde qui font un business similaire au nôtre. Notre particularité est que nous avons un design unique pour nos Ollas qui a été conceptualisé et réalisé avec un designer de l’ECAL. Nous ne pensions pas que le design serait l’élément qui nous démarquerait. En outre, nous avons relevé le défi de créer un produit écoresponsable et de fabrication suisse: les Ollas sont composées à 100% de terre helvétique. A cela s’ajoute le côté social car nous collaborons avec des ateliers protégés pour la fabrication de nos produits; ce qui permet à des personnes en situation de handicap de travailler et d’avoir une place dans la société. Je suis fier de tout cela.

Une journée « noire ». Rien ne va comme prévu. Quelle est votre recette pour rester positif?

Nous sommes trois associés. Donc lorsque l’un d’entre nous a passé une mauvaise journée, les deux autres sont toujours là pour lui remonter le moral. Notre rituel est de nous asseoir autour d’une bière et de parler du problème jusqu’à ce que qu’on en ait fait le tour et que nous en soyons débarrassés. Ensuite on passe à autre chose.

Avez-vous une devise que vous souhaiteriez partager?

N’ayez pas peur de vous lancer. Même si votre produit n’est pas parfait, vous pourrez toujours vous améliorer par la suite, car c’est en commettant des erreurs que l’on s’améliore.

Article de Jeyanthy Geymeier, Bureau des alumni, 14 décembre 2020