«Fleur», «nature», «couleur» ou encore «féminisme». Tels sont les mots, aussi épars soient-ils, qui viennent à l’esprit lorsqu’on nous dit «violet». «Les gens n’arrivent pas à dire si les émotions associées au violet sont plutôt positives ou négatives». Pourquoi? Telle est la question que Déborah Epicoco, 30 ans, a choisi de creuser à travers sa thèse. Une colossale investigation qui l’emmène, depuis quatre ans déjà, au cœur de notre espace sémantique où elle explore les liens entre couleurs et émotions. «On a souvent l’impression qu’un doctorat est une énorme montagne à franchir, mais j’ai appris à l’envisager sous la forme de petits escaliers qui se succèdent.»
Dans le labo
Au quotidien, ses journées ne se ressemblent guère: récolte de données, analyse, travail administratif, lectures, enseignement ou encore rédaction. Lorsqu’on choisit de faire un doctorat, il faut, dit-elle, vouloir être polyvalent. D’ailleurs, c’est probablement l’aspect qu’elle préfère: «De l’extérieur, c’est un travail qui ne semble pas très sexy, surtout lorsque, comme moi, la récolte de données se fait en ligne. Mais en réalité, la thèse n’occupe que 40 – 50 % du temps; le reste, on jongle avec 27 autres choses à faire, en lien avec les projets de l’équipe qu’on intègre.» La Fribourgeoise d’origine valaisanne évolue depuis 2019 au sein du Laboratoire d’étude des processus de régulation cognitive et affective (CARLA) de l’UNIL. En parallèle de sa thèse, elle contribue également aux différents projets de recherches qui sont menés au sein de la Colour Experience Research Team, équipe appartenant au CARLA, une occasion de découvrir l’expérimental sous des formes variées.
Genèse d’une évidence
La chercheuse a notamment chaussé ses bottes de terrain pour mener une série de tests dans les écoles, avec de jeunes enfants, afin de tester leurs associations entre couleurs et émotions. «On voulait vérifier si certaines similarités pouvaient être liées à l’âge», explique-t-elle. Cette expérience lui a permis de constater la rigueur requise par la recherche expérimentale, où rien n’est jamais laissé au hasard. «Il faut placer l’écran et la chaise à une distance identique pour chaque participant, ajoute-t-elle. Si cette distance change, ne serait-ce que de 2 centimètres, on s’expose à des résultats faussés puisque la couleur montrée risque d’être perçue différemment.» Un setting d’apparence simple aura donc pu demander en réalité «une mise en place de 30 minutes», témoigne-t-elle.
Pour cette éternelle curieuse, c’est au fil des années que la recherche est devenue une vocation: «J’aime lire, j’aime apprendre et surtout c’est un milieu où on est sans cesse remis en question, ce qui est très stimulant.» Déborah Epicoco a découvert le domaine de la psychologie des couleurs durant son travail de master. Après quelques mois de stage en psychologie clinique, sa décision est prise, elle suivra l’appel de la voie doctorale. «Dans un monde idéal, j’aimerais continuer à faire ce que je fais jusqu’à la fin de mes jours», confie celle qui aspire trouver ensuite un post-doctorat en Suisse. Mais gravir les échelons du monde académique n’est pas une voie facile, et la jeune femme est lucide quant aux contraintes et à la précarité de ce type de carrière.