Chercheur et écrivain, Isaac Pante n’aime pas s’enfermer dans un cadre. Spécialiste en cultures et éditions numériques, il ose sans cesse le pas de côté qui ouvre l’imagination et le champ des possibles.
C’est un jeune homme de 40 ans, mince, soigné, qui se présente au Café des Philosophes. Lausanne est son port d’attache, entre deux voyages en Italie. Bilingue, double national, Isaac Pante franchit les frontières physiques, sociales, scientifiques sans trop se forcer. Posé et réfléchi, il ne manque pas d’audace. Sinon comment aurait-il pu aborder Lou Doillon sur une terrasse à Paris, pour lui proposer de lire un manuscrit ? Lors du même séjour, devisant avec la serveuse dans un café aux abords des Éditions Gallimard, il fait la connaissance en toute simplicité d’un éditeur de la distinguée officine…
Code informatique
Isaac Pante cultive les contacts, s’intéresse à autrui. Aux textes aussi et à la mise en récit sur différents supports : il est ainsi à l’origine de la création à l’UNIL d’un nouveau poste professoral en jeux vidéo (automne 2021) et vient de signer un contrat éditorial pour la sortie d’un jeu de cartes de sa conception. Le code informatique est aussi un texte, « un acte de communication avec des acteurs humains et non humains », précise-t-il. Longtemps cantonnée à la bureautique, l’informatique est devenue une « communauté linguistique » qui code avec des contraintes computationnelles mais aussi une visée esthétique. Isaac Pante ne croit pas à une stricte division du travail entre informaticiens d’un côté et chercheurs en sciences humaines et sociales de l’autre. Le dialogue gagne à être permanent et exige de « considérer l’informatique comme une science humaine et les sciences humaines comme le lieu d’une formalisation. C’est la meilleure manière d’enrichir notre regard, nos méthodes et nos objets. »
Pour soutenir la politique cantonale à l’éducation numérique, le chercheur a été nommé conseiller scientifique en transition numérique par la Direction de l’UNIL. L’enseignant a pris également, en janvier 2021, la direction scientifique côté UNIL du dhCenter UNIL-EPFL et préside à la Faculté des lettres la Section des sciences du langage et de l’information. S’impliquer avec d’autres ne l’empêche pas – au contraire – de déployer ses projets personnels. Il sort d’une année de congé non payé pour profiter du Prix de la Fondation de Famille Sandoz 2019 de littérature, une bourse dotée de 100 000 francs suisses pour développer un projet de création. « J’aurais voulu m’installer temporairement à Naples, qui est ma ville de cœur, mais la pandémie en a décidé autrement », évoque-t-il.
Depuis son premier livre publié en 2005 (Passé par les armes, Éditions Pillet), il propose des œuvres qui bousculent les frontières entre les genres et les impressions papier et numérique ; l’une de ses nouvelles a été traduite en anglais – là encore, ne pas se laisser limiter. L’année 2021 devrait le voir terminer l’écriture d’un roman qui fera exploser son nombre habituel de pages sous l’impulsion d’une « histoire qui me déborde ». Il prépare aussi un recueil de nouvelles courtes et un autre avec des récits plus longs entre vingt et cinquante pages chacun. Sans oublier une pièce de théâtre déjà prête avec deux personnages. Une histoire d’amour ? « Oui », concède-t-il. Mystérieux, concis, juste de quoi nous donner envie. /
Une ville de goût
Naples, la plus belle ville du monde et pas que dans l’assiette !
Un souvenir gustatif
Le spaghetti alle vongole de Gaetano, à la Locanda del Sole, près de la Piazza Dante. Dites que je vous envoie !
Un repas avec…
Alexandra Ocasio-Cortez.