Rencontre avec Gaëtan Cassina, professeur honoraire

En complément de l’article « Dans la cathédrale, les animaux rejouent la lutte du Bien et du Mal » paru dans Allez savoir ! 55

Si dès les origines du christianisme, les animaux jouent un rôle symbolique, leur « polyvalence est frappante », résume Gaëtan Cassina. Avec Claire Huguenin, ce professeur honoraire de l’UNIL a contribué au chapitre consacré au portail Montfalcon, dans le récent ouvrage La cathédrale Notre-Dame de Lausanne 1).

Par exemple, au Moyen-Age, le chien est réprouvé car considéré comme lubrique. Pourtant, on le trouve sur certains gisants comme représentation de la fidélité. Placé au pied d’une colonne, le lion a un rôle inférieur et peu digne : il est dominé. Mais ce fauve « devient le roi des animaux après la déchéance de l’ours » 2)

Ces deux exemples prouvent qu’il convient d’être prudent avec les interprétations. De plus, dès le XIVe siècle, les animaux présents dans l’iconographie prennent des aspects plus pittoresques ou décoratifs, qui entrent en concurrence avec la symbolique héritée du Moyen-Age, et notamment des fables. Il semble logique que la statuaire ait suivi le même mouvement. Gaëtan Cassina indique que les stalles de bois commandées par l’évêque Aymon de Montfalcon (1443-1517) évitent cette tendance et visent à renouer avec une théologie solide, loin des excès de superstition que l’on a observé peu avant la Réforme.

Si les animaux de la cathédrale ont survécu aux iconoclastes du XVIe siècle, c’est parce qu’ils n’étaient pas des objets de vénération. Le bestiaire se fait ensuite plus discret, jusqu’à son retour sur le monument funéraire d’Henriette Canning (1823), situé tout près de l’entrée, à droite. Les curieux peuvent y dénicher un chien, un papillon évoquant la résurrection ainsi qu’un serpent qui se mord la queue. Ce dernier, dit ouroboros, renvoie au cycle de la nature.

Le portail Montfalcon, réalisé au tournant du XXe siècle par le sculpteur Raphaël Lugeon, fait revivre l’esprit du gothique flamboyant. De très nombreuses créatures ornent cette œuvre, qui mérite d’être observée en détail.

1) La Bibliothèque des Arts (2012), 323 p.

2) L’Ours, histoire d’un roi déchu. Par Michel Pastoureau. Seuil (2007), 419 p. A lire également, du même auteur, Bestiaires du Moyen-Age, un ouvrage de référence sur le sujet

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