Elégante, bien coiffée, les ongles manucurés, un iPad dans son joli sac à main. Ariane Baehni correspond bien à l’image que l’on se fait des diplômés HEC, la faculté où elle a étudié. Au détail près que la quinquagénaire à l’allure chic officie depuis septembre à la paroisse de Vallorbe. Car Ariane Baehni est désormais pasteure suffragante. Après des études de théologie reprises en 2004, elle effectue actuellement la dernière partie de sa formation pratique.
Et en l’écoutant parler, on se dit que l’ancienne diplômée en HEC correspond tout aussi bien à l’image que l’on se fait des gens d’Eglise. Une certaine aura, de l’éloquence, une oreille attentive. Ariane Baehni s’exprime volontiers, mais pas trop, davantage à l’écoute qu’oratrice.
«Une crise de vie», c’est par cette brève formule qu’elle explique son changement d’orientation vers 40 ans. «Réaliser que la vie n’est pas éternelle», après plusieurs années passées à travailler dans le secteur des voyages, et pour la communication à l’UNIL, au sein de son ancienne faculté. Mère de deux adolescents, afin de se consacrer à sa famille, elle travaillera aussi à temps partiel pour des mandats plutôt alimentaires. «Mais manquait un vrai projet.»
Un déménagement dans un village à la vie paroissiale plus présente lui fera reprendre le chemin de l’Eglise. Elle qui dit «avoir toujours été croyante, mais pas pratiquante» décide d’entreprendre sur le tard un bachelor à distance à l’Université de Genève. Puis le master en Théologie à l’UNIL, au cours duquel naîtra l’envie de devenir pasteure.
Passer de l’économie à la religion, déconcertant? Tout autant peut-être que sa motivation initiale à étudier en HEC. «Ce n’était pas un vrai choix, je n’étais pas assidue. Mais à la base, ces études étaient courtes et permettaient de trouver facilement du travail.» Sa formation aura ainsi permis à Ariane Baehni d’entamer une carrière professionnelle à l’Office du tourisme. Mais aussi de faire des rencontres importantes. Ce cercle d’amis «constitué à l’époque pré-religieuse», maintenu encore aujourd’hui. Et avec qui il lui arrive parfois de débattre sur son changement de vie.
Les deux mondes entre lesquels gravite Ariane Baehni ne sont pas si éloignés. «Au sens noble, l’échange humain est au cœur de l’économie.» Mais c’est aussi l’une des activités «qui s’éloigne de plus en plus de sa définition profonde». D’où le grand désarroi que la pasteure ressent dans le milieu, et auquel elle veut tenter de remédier par un service d’accompagnement spirituel. «Les chefs d’entreprises à qui j’en parle se montrent méfiants vis-à-vis de l’Eglise, mais ça ne les empêche pas de spontanément me confier leurs soucis.»
Davantage que sa carrière passée ou le fait d’être une femme, c’est dans cette volonté de réunir l’économie et la religion qu’Ariane Baehni pense se démarquer. D’ailleurs, «je ne suis pas la seule femme pasteure diplômée d’une autre faculté». Un mouvement en devenir? Mais il est temps de laisser Ariane Baehni préparer son sermon du dimanche: un parallèle entre la pyramide de Maslow et le récit de la tentation de Jésus dans le désert. «Le diable nous tire vers le bas de la pyramide, Jésus veut nous ramener vers le haut. Ici ou là, au fond, on parle toujours de l’être humain.» On serait presque tenté d’y croire… Aura de la femme d’Eglise ou excellente communicatrice?