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Recrutement Tuteur·trice·s SSP

Depuis, 2010, l’AESSP en collaboration avec la faculté des Sciences sociales et politiques ont mis en place des ateliers de tutorats de pairs. Ces derniers sont dispensés par des étudiant.e.s avancé.e.s de la faculté. Ils portent sur plusieurs thématiques dont la dissertation, la lecture de textes académiques ou encore la préparation aux examens, la recherche documentaire et la présentation orale. La faculté des SSP est à la recherche de deux :

Tuteur·trice·s dans le cadre des ateliers de tutorats de pairs en SSP à 10%

Informations liées au poste 

Entrée en fonction : 1er août 2020

Durée du contrat : 31.07.2021 Avec possibilité de renouvellement

Taux d’activité : 10 %

Lieu de travail : Université de Lausanne

Vos activités 

Dans le cadre de vos fonctions, vous serez amené·e à : 

  • Prendre la responsabilité d’un ou plusieurs ateliers thématiques.
  • Suivre une formation pédagogique.
  • Elaborer et concevoir des activités d’enseignement pour les ateliers.
  • S’approprier le matériel existant pour la préparation des ateliers.
  • Travailler de manière collaborative avec les autres tuteur·trice·s.
  • (CO)-Animer des atelier(s).
  • Répondre aux demandes des étudiant·e·s ayant suivi l’atelier.
  • Participer à l’auto-évaluation des ateliers. 

Votre profil

Nous sommes à la recherche d’une personne avec les qualités suivantes :

  • Etudiant·e immatriculé·e en SSP à l’UNIL, dans l’une des trois filières suivantes : sciences sociales, science politique ou psychologie, en deuxième partie de BA ou en MA.
  • Etre disponible pour les semestres d’Automne et Printemps.
  • Avoir la flexibilité quant aux horaires pour l’animation de séances en petits groupes.
  • Avoir un intérêt pour l’enseignement, en particulier avoir des compétences pour la dissertation. 
  • Avoir de l’expérience dans l’enseignement serait un atout.

Dossier de candidature 

Lettre de motivation, CV, attestation d’inscription en SSP la plus récente (téléchargeable sur MyUnil, sous « dossier administratif ») doivent être envoyés en PDF par courriel à aessp.dep.academique@gmail.com , avec mention recrutement tutorats SSP.

Délai de candidature

Candidatures jusqu’au 22.05.2020

Personne de contact

Département Académique, aessp.dep.academique@gmail.com

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Liste des tutorats du semestre de printemps 2020

Retrouvez ci-dessous la liste des tutorats que l’AESSP vous propose pour ce semestre ! Vous pouvez vous inscrire à ceux-ci via le lien suivant :

https://moodle.unil.ch/course/view.php?id=14879

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Journalisme Non classé

Abus sexuels : on en parle ?

Dans le cadre de mon master en Ethique, j’ai rédigé un mémoire sur « Les répercussions de la communication sur les victimes d’abus sexuels ». J’ai donc travaillé durant deux ans sur ce mémoire, ai lu de nombreux témoignages de victimes, analysé différents documentaires sur ce sujet, et rencontré plusieurs victimes d’abus sexuels. Les victimes que j’ai rencontrées sont toutes des femmes issues du milieu universitaire. 

Le sujet des abus sexuels est un sujet tellement vaste que j’ai dû limiter mes recherches à certains aspects. Ce travail ne tendait donc pas à être exhaustif mais simplement à questionner certaines de nos certitudes. Mes lectures étaient pluridisciplinaires, allant de la philosophie à la psychologie en passant par la sociologie. 

J’ai tenu à écrire ces articles afin de partager mes réflexions, et surtout les connaissances que j’ai pu acquérir à ce sujet. Il n’apporte pas de réponse à ce problème mais permet de questionner et de mieux comprendre certaines de nos réactions. Plusieurs articles seront publiés sur ce sujet afin d’aborder les aspects qui me paraissent les plus importants. 

Fil conducteur de ma recherche

L’actualité de ces dernières années montre des victimes d’abus sexuels osant « se donner la parole ». Que ce soit par l’intermédiaire des mouvements #metoo, #balancetonporc ou Time’s Up, la parole des victimes de violences sexuelles semble se libérer. Le langage est central dans ces histoires et la parole semble contribuer à la guérison des victimes. J’ai effectivement été interpellée par le nombre de personnes de mon entourage osant enfin dire ou écrire ce qu’elles avaient vécu. La multiplication des témoignages écrits ou oraux irait effectivement dans le sens d’une guérison possible par la parole. Les mouvements comme #balancetonporc ont eu des répercussions politiques : le Président de la République Française, François Hollande, a demandé en 2016 à la journaliste Flavie Flament de travailler sur la question de la prescription des agressions sexuelles en France. Ce phénomène est donc devenu social et politique. Ces affaires taboues il y a encore quelques années prennent le devant de la scène. 

Mais pourquoi, malgré toutes les connaissances que nous avons sur les répercussions des abus sexuels sur les victimes, les réactions des confidents s’avèrent si souvent inadéquates et malvenues ? Quelles sont les répercussions de la révélation des faits, tant sur le récepteur que sur l’émetteur ?

Article 1 : « Pourquoi n’as-tu pas parlé plus tôt ? »  

« Pourquoi n’as-tu pas parlé plus tôt ? ». Telle est l’une des premières questions qui est souvent posée aux victimes d’abus sexuels lorsqu’elles révèlent ce qu’elles ont subi. Avant de se demander pourquoi cette question est posée, on peut se demander d’abord pourquoi les victimes ont des difficultés à parler de leur agression ? Quels peuvent-être les sentiments et les émotions à l’origine de leur silence ? 

La honte, la culpabilité et la dimension sociale du secret

Bernard Rimé (2009) a étudié « le partage social des émotions » et a cherché à comprendre pourquoi certains événements émotionnels très puissants n’étaient pas soumis au « partage social »[1]. Il a donc donné différentes pistes pour comprendre les origines du silence d’une victime d’abus sexuel et deux sentiments se révèlent avoir des conséquences importantes sur la parole des victimes : la honte et le sentiment de culpabilité. 

Pourtant, ces deux sentiments ne sont pas les seules causes du silence des victimes. Le secret n’a pas qu’une fonction individuelle mais aussi une fonction sociale. En effet, il est fréquent que les victimes ne parlent pas de ce qu’elles ont subi de peur de faire du mal à quelqu’un, à un proche le plus souvent. Prenons le cas de l’inceste, il est facile d’imaginer qu’une victime n’ose pas parler de ce qu’elle a subi en raison des conséquences et de la peine qu’une telle révélation entrainera dans sa famille. De nombreuses victimes m’ont confié, en substance « je ne le dirai jamais à mes parents car je ne veux pas leur imposer cette douleur ».

Une autre dimension sociale intervient. Les faits peuvent être gardés secrets afin de préserver une certaine image de soi aux yeux d’autrui. C’est une façon pour les victimes de se protéger du regard des autres. La révélation peut être une menace pour l’intégration sociale et entrainer une perte des liens d’appartenance. Une victime est sensible à ce que l’on va penser et dire de ce qu’elle a subi. L’estime de soi d’une victime est souvent fragilisée en raison d’un fort sentiment de culpabilité. Or l’estime de soi est la condition du partage social de l’émotion. Par conséquent, une restauration de l’estime de soi est nécessaire pour permettre un partage, ce qui peut prendre du temps.

Un silence mortifère ?

« Le silence tue… Une fois qu’on met le doigt dans le silence c’est fini, on ne parle plus. »[2]

Ainsi parle Laurent Boyer dans le documentaire Enfance abusée diffusée sur France 2 le 20 novembre 2018. Au cours de ce documentaire, j’ai pu relever différentes phrases allant dans ce sens, montrant le caractère mortifère du silence. Toutes les victimes qui témoignent lors de cette émission soulignent et insistent sur l’importance de la parole dans leur processus de guérison. Tous ont gardé ces histoires secrètes durant de nombreuses années en raison de la proximité de leur agresseur, qu’il soit ami de leur parent ou membre de leur famille. Tous sont catégoriques et affirment que le silence est ce qui les a détruits, ce qui les a emprisonnés dans leur histoire et ce qui les a éloignés du reste de leur famille ou des autres en général. Il est en effet assez commun de penser que le fait de parler de son vécu, le mettre en mots est un moyen de guérir. Dès lors, on pense souvent que le non partage des émotions a des conséquences néfastes sur la victime et que cela peut entrainer un stress et des troubles de la santé physique[3]. Des études rapportées par Bernard Rimé (2009) montrent par exemple que les personnes détenant des secrets indicibles seraient moins satisfaites de leur vie. 

Mais la parole est-elle véritablement libératrice et guérisseuse ? 

J’ai pourtant été interpelée par la réaction de certaines victimes dans le film Grâce à Dieu.[4] Notamment deux des victimes, qui ne font que des apparitions rapides ou sont simplement mentionnées. Elles ne veulent pas parler de ce qu’elles ont subi, car parler remue en elles trop de souvenirs douloureux. Les deux victimes ont des comportements révélateurs de leur mal-être, l’une ne peut s’empêcher de pleurer au téléphone tandis que l’autre est très violente. Je me pencherai sur ce deuxième exemple. Après avoir nié pendant des années avoir été victime d’abus sexuel, le jeune homme finit par en parler à sa famille. Il révèle les faits mais par la suite refuse tout dialogue à ce propos. Il ne veut pas parler de cette histoire et ne veut pas être vu comme une victime. Il martèle « je ne témoignerai pas, je ne veux plus entendre parler de cette histoire ». Une simple allusion à ce qu’il a subi le rend fébrile. Pour celui-ci, la parole ne semble pas être un moyen de guérison, bien au contraire. La violence de ses mots et de son comportement semble indiquer un véritable mal-être. Je me suis donc demandée si ces personnes qui témoignent à la télévision ou qui écrivent sur leur vie n’ont pas une certaine manière de guérir qui leur est propre. La parole a une importance capitale pour ces personnes en particulier, c’est pourquoi elles ont accepté de témoigner publiquement. Cela ne permet pas pour autant d’en faire une généralité.

Les études de Bernard Rimé (2009) confirment l’hypothèse que parler ne guérit pas toujours. Le partage social n’entraine pas nécessairement une régulation des émotions et n’éliminerait pas le stress qui y est lié. Il n’y a pas plus de rumination mentale et de pensées intrusives quand l’événement émotionnel n’est pas partagé. Certes, les souvenirs non partagés suscitent plus d’efforts cognitifs que les souvenirs partagés, dans la mesure où ils demandent plus de recherche de sens, plus d’efforts pour comprendre ce qu’il s’est passé et plus de tentatives pour remettre de l’ordre. Cela peut être assimilé à une tâche cognitive inachevée. Mais au niveau de la santé mentale de la personne, cela ne semble pas véritablement améliorer la situation. 

Il est certainement possible de très bien vivre avec un tel secret, mais ces secrets n’étant jamais exprimés, je n’ai pas pu les étudier. Je n’ai donc aucun élément de comparaison et ai été obligée de me concentrer sur des témoignages exprimés. Je ne peux que m’appuyer sur les témoignages de personnes ayant gardé le secret pendant un certain temps. Sauf quelques rares exception, comme les exemples cités plus haut extraits du film Grâce à Dieu, ces témoignages vont dans le sens d’un sentiment de libération au moment de la révélation des faits, dans la sphère privée. 

Il est intéressant de voir la différence entre le ressenti des victimes et les études de Bernard Rimé, qui montrent donc que le partage social n’aide pas les victimes et ne ferait que les soulager. Pourtant, les victimes ne s’estiment pas simplement soulagées mais affirment aller mieux et disent « revivre ».

Ainsi, il est difficile pour une victime de répondre à la question « pourquoi n’as-tu pas parlé plus tôt ? ». Ces révélations impliquent des émotions très fortes tant pour la victime que pour le récepteur, ce qui rend la communication difficile. Toutefois, une agression a des répercussions sur le comportement des victimes : si la communication n’est pas verbale, n’est-il pas possible qu’elle soit comportementale ?

Rédactrice : Blanche Moinard 

Source image : https://www.curml.ch/sites/default/files/rubriques/3.png


[1] B. RIME, Le partage social des émotions, Paris, Presses universitaires de France, 2009.  

[2] E. GUERET, « Enfance abusée » [documentaire], France 2, première diffusion le 20 novembre 2018, 84min. 

[3] B. RIME, Le partage social des émotionsop.cit. 

[4] F. OZON (réalisateur), Grâce à Dieu, Mars Films, 2019, 137min. 

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T’es cap ou pas cap ?

Le système de filières à l’école obligatoire créateur d’inégalités

Dans le domaine de la sociologie de l’éducation, nombreux sont les écrits qui évoquent l’école comme vecteur important d’inégalités. De par son organisation et son fonctionnement, cette dernière jouerait en effet un rôle crucial à la fois dans la perpétuation d’inégalités préexistantes mais également dans la production d’inégalités en terme d’apprentissages proposés et de parcours scolaires (Felouzis, 2014, pp. 5–6). 

C’est dans cette perspective que Felouzis évoque, dans son ouvrage Les inégalités scolaires (2014)la segmentation précoce du système scolaire en filières hiérarchisées et qu’il souligne l’impact majeur de ce « mode de regroupement » sur l’émergence d’inégalités (Felouzis & Charmillot, 2017, p.3). 

Dans un système dit segmenté, très tôt durant l’école obligatoire, les performances de l’élève sont en effet évaluées et lui permettent d’accéder ou non aux diverses filières proposées par l’établissement dans lequel il effectue sa scolarité. Fréquemment, ces dernières marquent une distinction entre les élèves se destinant au monde professionnel ou académique.

« Les cantons les plus inégalitaires ont tous des systèmes d’enseignement segmentés »

(Felouzis & Charmillot, 2017, p.9)

Quid du canton de Vaud ?

Un certain nombre de cantons suisses procèdent à une segmentation des parcours scolaires durant l’école obligatoire. C’est le cas notamment du canton de Vaud, dont le système scolaire répartit les élèves, dès la fin de l’école primaire, en fonction des notes obtenues durant les années précédentes. En effet, durant le secondaire I d’une durée de 3 ans, les élèves âgés de 12 ans sont orientés dans une voie dite prégymnasiale (VP) ou une voie générale (VG).

La première est destinée aux meilleurs élèves et a pour but de les former pour l’obtention future d’une maturité gymnasiale en vue d’une carrière académique. Les élèves peuvent ainsi étudier le latin, l’économie, le droit, la physique etc. La voie générale propose quant à elle une formation davantage orientée vers le milieu professionnel, une école de culture générale ou de commerce. Les enseignements alors proposés aux élèves ciblent le développement de compétences artisanales, techniques ou encore commerciales. En ce qui concerne les mathématiques, le français et l’allemand, la voie générale répartit encore les élèves en deux niveaux, un niveau de compétences de base ou un niveau plus exigent (Etat de Vaud, s.d.).

Cette fragmentation des parcours scolaires possède certains avantages fréquemment mis en évidence pour la justifier. Le premier argument est que chaque filière propose un programme différent et adapté au niveau scolaire des élèves, pour leur permettre de se développer à leur rythme et d’acquérir des connaissances ciblées et ajustées à la carrière envisagée, académique ou professionnelle. De plus, le processus de segmentation fournit la possibilité de créer des classes homogènes et ainsi d’optimiser l’efficacité des enseignements dispensés (Felouzis et Charmillot, 2017).

Quelles conséquences ?

Les nombreuses recherches concernant l’impact des filières hiérarchisées ont permis de démontrer que « le système segmenté est celui qui produit le plus d’inégalités sociales entre élèves » (Felouzis, 2014, p.85). Les élèves qui performent le mieux bénéficient souvent d’un enseignement de meilleure qualité, de « programmes plus fournis et ambitieux », ils étudient entre autres le latin ou l’économie. Au contraire, les élèves plus faibles scolairement restent cantonnés dans des apprentissages de base et souvent de qualité inférieure (Felouzis, 2014, p.85).

En outre, cette division en termes de performances engendre fréquemment une ségrégation des élèves en fonction de leurs caractéristiques socio-économiques. De ce fait, les programmes scolaires sont différenciés non seulement selon le niveau des élèves mais de façon indirecte également selon leurs milieux sociaux (Felouzis et Charmillot, 2017). 

Certes ces répartitions dans une voie ou une autre ne sont pas hermétiques et définitives. Dans certaines conditions et si les résultats le permettent, les élèves peuvent être réorientés en fin d’année ou de semestre. A la fin de l’école obligatoire, une année de rattrapage est également mise en place pour les élèves qui souhaiteraient acquérir les compétences en vue d’une maturité gymnasiale (Etat de Vaud, s.d.). Cependant, ces raccordements demeurent coûteux, en termes de temps mais également d’efforts devant être fournis par l’élève qui souhaite rattraper son retard. Retard qu’il n’aurait peut-être pas accumulé s’il avait été placé en fonction de ses choix et non de ses résultats ou si on lui avait laissé plus de temps avant de le ranger dans la case des prétendus « moins bons ». On peut supposer dans les faits que cela décourage plus d’un élève.

« On donn[e] moins à ceux qui ont déjà le moins et plus à ceux qui ont le plus »

(Felouzis, 2014, p.80)

En outre, le processus de segmentation engendre un regroupement des élèves aux performances plus basses dans les mêmes classes. Cette homogénéité empêche la mise en place d’une dynamique d’enseignement favorable aux apprentissages. Elle limite également nettement l’apprentissage entre pairs, idéal pour stimuler les élèves à l’acquisition de connaissances. Il a également souvent été mis en évidence que dans les filières rassemblant les élèves aux résultats moins élevés, les professeurs diminuent la qualité de leur enseignement ainsi que le niveau de leurs exigences. Les élèves ne bénéficient donc aucunement de conditions égales d’encadrement entre les différentes filières proposées, facteur permettant d’expliquer en partie la création d’inégalités scolaires (Felouzis, 2014, p.78). 

L’effet Pygmalion

Aux multiples conséquences déjà mentionnées s’ajoute le stigmate associé aux filières regroupant les élèves aux moins bons résultats. En effet, en associant l’idée que les meilleurs élèves, les méritants, ont accès à une filière académique et ceux plus faibles à une voie professionnelle, on sous-entend également qu’une voie est plus prestigieuse qu’une autre et on risque de transmettre implicitement à l’élève plus faible le message qu’il n’est pas assez capable pour prétendre à cette voie prestigieuse. L’élève peut alors être amené à intérioriser ce message et ajuster ses attentes et ses objectifs en fonction de ce dernier. Ce phénomène nommé effet Pygmalion d’après l’étude de Rosenthal et Jacobson (Trouilloud & Sarrazin, 2003) se retrouve également au travers des attentes négatives des enseignants vis à vis des élèves aux moins bons résultats. Le professeur modifie son attitude en fonction de ses attentes. Il aura tendance, même inconsciemment, à davantage s’impliquer avec l’élève de la voie prestigieuse, et nettement moins avec l’élève de la voie moins prestigieuse. Or ce mécanisme impacte le comportement de l’élève qui se sent étiqueté et va agir comme son étiquette le prédit. Il influence également ses performances et le bon déroulement de son cursus scolaire (Trouilloud & Sarrazin, 2003).

« Une idée, pour peu qu’on s’y accroche avec une conviction suffisante, qu’on la caresse et la berce avec soin, finira par produire sa propre réalité »

(Watzlawick, 2014, pp.53-54)

Ainsi, regrouper les élèves par filières, les classer en fonction de leurs performances est bien loin d’être un acte anodin mais au contraire contribue, comme une « prophétie auto-réalisatrice » (Trouilloud & Sarrazin, 2003, p. 92) à créer une réalité concrète qui n’était auparavant que virtuelle. En effet un élève jugé moins bon d’après ses résultats (mais qui ne l’est pas forcément dans les faits, comment en juger, d’autant plus qu’il n’a que 12 ans !) sera placé dans une filière adaptée à son niveau, il bénéficiera d’enseignements de médiocre qualité, il sera stigmatisé et influencé par les attentes du système et des enseignants, et il terminera son école obligatoire en étant cette fois réellement moins bon alors que ce n’était pas forcément le cas au départ. 

Quelles alternatives ?

Une étude menée par Felouzis et Charmillot concernant Les inégalités scolaires en Suisse (2017) a révélé qu’aux côtés des cantons de Neuchâtel, St-Gall et Zürich, le canton de Vaud était un des plus inégalitaires en termes de système scolaire. En revanche, les inégalités sont moins marquées dans les cantons suisses dont les systèmes sont intégrés et non ségmentés. En Valais par exemple, tous les élèves suivent un cursus identique durant les deux premières années du secondaire 1 à l’exception des branches élémentaires comme les mathématiques, l’allemand ou le français. Une division en filière s’opère néanmoins durant la dernière année pour préparer les élèves qui le souhaitent à une maturité gymnasiale (Felouzis et Charmillot, 2017). 

Une première alternative serait donc d’opter pour un système scolaire intégré où tous les élèves, sans considération pour leurs résultats, suivent un même cursus jusqu’à la fin de leur scolarité obligatoire. Un autre facteur joue également un rôle important pour réduire les inégalités, le retardement dans la scolarité de la division en filières. En effet, la littérature a « démontré qu’une orientation/sélection précoce défavoriserait particulièrement les enfants issus de milieux familiaux modestes, alors que l’orientation repoussée […] réduisait les écarts tout en assurant une meilleure réussite scolaire pour tous » (Charpentier, 2014).

Ce système a été notamment adopté par les pays Scandinaves qui rejettent la division en filières durant l’école obligatoire. Jusqu’à l’âge de 16 ans, les élèves poursuivent un cursus scolaire identique, en bénéficiant d’une aide spécialisée gratuite si l’élève en ressent le besoin. Chaque élève peut néanmoins composer une part de son programme d’enseignement en fonction de ses intérêts. De plus, pour réduire le phénomène de compétition et de sélection, les notes ne sont introduites que durant les dernières années de l’école obligatoire. Dans cette perspective de refus de la sélection, les redoublements ne constituent pas non plus une pratique courante (Charpentier, 2014).

En outre, les systèmes scolaires scandinaves prônent, au contraire des systèmes segmentés, l’hétérogénéité des classes pour mieux stimuler les élèves entre eux et que chacun puisse bénéficier d’un climat d’enseignement le plus favorable possible. Les élèves progressent ainsi ensemble et ce n’est qu’à 16 ans, à la fin de leur scolarité obligatoire qu’ils choisiront de s’orienter en vue d’une carrière académique ou professionnelle (Charpentier, 2014). 

Pour conclure, bien que le système de segmentation précoce en filières hiérarchisées ne soit pas l’unique cause des inégalités scolaires, il existe néanmoins des alternatives possibles, telles que des systèmes intégrés ou une orientation plus tardive qui permettent de les atténuer et de proposer aux élèves des conditions d’apprentissages plus favorables.

A l’exemple des pays scandinaves, la conception de la scolarité devrait permettre de promouvoir un système scolaire qui s’ajuste à l’élève et non pas au contraire un système pour forcer les élèves à s’adapter pour ne pas se faire distancer. Un système pour construire une dynamique adéquate pour stimuler les élèves, les accompagner dans leur formation et non pas les sélectionner, les classer, les catégoriser. Abandonnons l’idée d’une école qui « donn[e] moins à ce qui ont déjà moins » (Felouzis, 2014, p.80), d’une école élitiste pour « une école réellement démocratique et émancipatrice » (Charpentier, 2014, p.9).

Par Roxane Coquoz, Novembre 2019

Bibliographie

Charpentier, H. (2014). Systèmes scolaires et équité sociale. Retrieved November 23, 2019, from Ecole changer de cap website: http://www.ecolechangerdecap.net/spip.php?article107

Etat de Vaud. (n.d.). Déroulement de l’école obligatoire dans le canton de Vaud. Retrieved November 23, 2019, from https://www.vd.ch/themes/formation/scolarite-obligatoire/deroulement-de-lecole-obligatoire-dans-le-canton-de-vaud/

Felouzis, G. (2014). Les inégalités scolaires. Paris (6, avenue Reille 75685): PUF.

Felouzis, G., & Charmillot, S. (2017). Les inégalités scolaires en Suisse. Social Change in Switzerland, (8). https://doi.org/10.13094/SMIF-2017-00001

Trouilloud, D., & Sarrazin, P. (2003). Les connaissances actuelles sur l’effet Pygmalion: processus, poids et modulateurs. Revue française de pédagogie, (145), 89–119.

Watzlawick, P. (2014). Faites vous-même votre malheur, Paris : Ed. du Seuil.

Source de l’image : https://unsplash.com/photos/zFSo6bnZJTw

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Invitation à l’AG de l’AESSP

Chères étudiantes, chers étudiants,

Comme tout-e étudiant-e en sciences sociales, science politique, psychologie ou sciences du sport, tu es un-e membre (passif-ve ou actif-ve) de l’AESSP!  Nous te convions à notre dernière assemblée générale du semestre qui se tiendra le 03 décembre 2019 ‪à 18h en salle 1612 de Géopolis !
Voici l’Ordre du Jour :

  1. Formalités de bienvenue et adoption de l’ODJ
  2. Adoption du PV de l’Assemblée Générale du 05.11.19
  3. Elections complémentaires du Comité
  4. Elections complémentaires des Représentant.e.s étudiant.e.s
  5. Charte interne : Sponsoring
  6. Présentation des comptes 2019
  7. Verrée de clôture

C’est l’occasion pour toi de mieux saisir le fonctionnement de notre association et de rencontrer les gens du comité. Les votes se faisant de manière électronique, nous te rappelons de prendre un ordinateur ou un téléphone avec accès au Wi-Fi.  

Comme tu le constateras, la co-présidence de la section ESSOPOL pour la Science politique est ouverte à candidature. Si ce poste t’intéresse, n’hésite pas à nous écrire un mail et nous t’expliquerons la démarche de postulation. 
Tu trouveras ci dessous : 

Nous clôturerons l’assemblée par un apéro auquel tu es cordialement invité-e !
Nous nous réjouissons de ta présence !
Meilleures salutations estudiantines,

La Présidence de l’AESSP 

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Illustrateur/trice pour SSP

Tu adores dessiner ce qui t’entoure ? 

Le décanat SSP recherche un·e étudiant·e illustrateur/trice ou dessinateur/trice pour la rubrique « Entre étudiant·e·s » de la newsletter facultaire. Intéressé·e ? Ecris rapidement à eventssp@unil.ch.

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Assemblée générale du 5.11

Chères étudiantes, chers étudiants,

Comme tout-e étudiant-e en sciences sociales, science politique, psychologie ou sciences du sport, tu es un-e membre (passif-ve ou actif-ve) de l’AESSP!  Nous te convions à notre deuxième assemblée générale qui se tiendra le 05 novembre 2019 ?à 12h en salle 1612 de Géopolis !

Voici l’Ordre du Jour :

  1. Formalités de bienvenue et adoption de l’ODJ
  2. Adoption du PV de l’Assemblée Générale du 26.09.19
  3. Elections complémentaires du Comité
  4. Présentation des comptes
  5. Présentation des Statuts 2020
  6. Présentation des Cahiers des Charges 2020
  7. Divers et propositions individuelles
  8. Verrée de clôture

C’est l’occasion pour toi de mieux saisir le fonctionnement de notre association et de rencontrer les gens du comité. 
Tu trouveras en annexe  : 

Nous clôturerons l’assemblée par un apéro auquel tu es cordialement invité-e !
Nous nous réjouissons de ta présence !
Meilleures salutations estudiantines,
La Présidence de l’AESSP