La croissance et le modèle de Solow

La croissance économique est une augmentation sur le long-terme des richesses d’un pays. Elle est mesurée par le PIB.

Parmi les théories qui cherchent les causes de la croissance, celle de Solow est la référence pour l’économie néoclassique. A partir de plusieurs hypothèses, le modèle de Solow considère la croissance comme équilibrée à long-terme. Reposant en grande partie sur le progrès technique, la croissance serait stable et mènerait naturellement au plein-emploi.

La croissance

Définition

La croissance économique désigne l’augmentation de la production (de biens et de services) d’un pays pendant une longue période. Si la période est courte, on préfère le terme d’expansion.

Pour mesurer la croissance, on utilise généralement comme indicateur le produit intérieur brut (PIB) ou le produit national brut (PNB).Il est courant de calculer le taux de croissance, qui indique la variation du PIB d’une année à l’autre (en %). En d’autres termes, en additionnant la valeur de toutes les « richesses » (biens et services) qu’un pays a produit pendant une certaine période (un année par exemple), on obtient le PIB. Si pendant plusieurs années la valeur du PIB a augmenté, on parle de croissance.

Le PIB est supposé mesurer la richesse globale d’un pays, mais c’est un indicateur incomplet si l’on souhaite évaluer le bien-être ou le niveau de vie de la population. Il ne tient par exemple pas compte de la répartition des richesses au sein de sa population, ni des externalités négatives causées par la production. Par ailleurs, une augmentation du PIB ne signifie pas forcément que le niveau de vie augmente aussi: la population grandit peut-être plus vite que la richesse produite.

Si croissance et développement d’un pays sont souvent associés, on considère généralement que la croissance est un indicateur économique qui ne suffit pas à mesurer le développement. La croissance étant un indicateur quantitatif, elle ne permet pas de mesurer la qualité du développement.

Théories de la croissance

Depuis longtemps, les économistes tentent de comprendre les causes de la croissance et les facteurs qui permettent de la maintenir sur le long-terme. Ce sont les théories de la croissance.

Les Classiques sont les premiers à s’interroger sur la question. Pour Smith, la division du travail est à la base de la croissance, mais elle est liée à la taille des marchés. Le commerce international est donc essentiel pour la croissance. Pour d’autres (Ricardo, Malthus, Mill), la croissance n’est pas appréhendée comme un processus de longue durée: la loi des rendements décroissants mène l’économie à un « état stationnaire ». Toutefois, le progrès technique est déjà vu comme un facteur permettant de contrer les forces conduisant à cet état.

Dans les années 1920, Nikolai Kondratiev met à jour l’existence de cycles économiques longs de 40 à 60 ans, pendant lesquels l’activité économique connaît successivement une ascension et un déclin.

En 1939, Joseph Schumpeter explique ces cycles par le progrès technique: ces sont les innovations techniques, qui survenant par « grappes » (une innovation en entraînant d’autres), provoquent des périodes de croissance. On peut citer par exemple le moteur à vapeur, le rail, l’électricité, etc. Au fur et à mesure que ces progrès se répandent, la concurrence augmente et la demande décroît, le cycle entre alors dans une phase descendante. Dans cette perspective, la croissance vient du progrès technique, qui lui-même est causé par la croissance. Celle-ci est donc dite endogène (elle provient d’elle-même).

Dans les années 1940, Roy Harrod et Evsey Domar sont à l’origine des premiers modèles de croissance keynésiens. Ils discutent de la possibilité d’une croissance équilibrée, où la demande croît au même rythme que les capacités de production, ce qui garantirait le plein-emploi. Le modèle montre qu’il n’y a aucune raison que la croissance soit équilibrée et qu’une telle situation est très improbable. La croissance équilibrée serait un chemin étroit (« sur le fil du rasoir »), qui ne pourrait être maintenu qu’à l’aide de l’intervention de l’Etat.

Au cours des années 1950 et 1960, Robert Solow développe ce qui deviendra le modèle de croissance néoclassique de référence. Critiquant le modèle de Harrod-Domar, il montre qu’une croissance de plein-emploi stable et équilibrée est possible. Une place importante est accordée au progrès technique, mais celui-ci est exogène au modèle: on n’explique pas d’où il vient.

Enfin, à la fin des années 1980, apparaissent les théories de la croissance endogène. Dans cette perspective, la croissance vient de facteurs qui en sont aussi des conséquences. Par exemple, pour Robert Lucas, la croissance permet l’élévation du niveau de formation des individus, qui permet à son tour une augmentation de la croissance.

Modèle de Solow

En réaction au modèle de Harrod-Domar, Robert Solow propose en 1956 un modèle de croissance qui est à la base des modèles contemporains. Alors que le modèle de Harrod-Domar était pessimiste (l’équilibre est difficilement atteignable si on « laisse faire »), celui de Solow est de nature optimiste car il conçoit que la croissance peut être durable et stable.

Robert Solow (photo par Olaf Storbeck, cc-by-sa)
Robert Solow (photo par Olaf Storbeck, cc-by-sa)

Le modèle de Solow est construit sur la base de plusieurs hypothèses simplificatrices qui viennent pour la plupart de la théorie néoclassique. Il considère un monde à un seul bien et un seul agent (la « communauté »), ne connaissant ni chômage, ni dysfonctionnements. Dans ce monde, la production ne dépend que de deux facteurs, le travail et le capital. Les autres hypothèses sont la flexibilité des facteurs de production (alors que dans le modèle de Harrod-Domar, ceux-ci étaient fixés), les rendement décroissants, les rendements d’échelle constants et le réinvestissement de toute l’épargne.

Dans le modèle de Solow, l’augmentation des facteurs de production (travail et capital) explique une part de la croissance. C’est donc parce qu’il y a une augmentation de la population (facteur travail) et des investissements (facteur capital), qu’il y a de la croissance. Toutefois, la plus grande part de la croissance n’est pas expliquée par ces deux facteurs, mais est due à un « facteur résiduel ». Il s’agit du progrès technique, dont on ne connaît pas vraiment l’origine (certains disent que c’est un facteur « tombé du ciel »). Les causes de la croissance (augmentation de la population et progrès technique) sont donc exogènes: le modèle n’explique pas leur origine.

Ce modèle est en équilibre stable: à long-terme, l’économie converge vers un « état stationnaire », où l’activité économique évolue au même rythme que la population.

L’hypothèse de substituabilité des facteurs est particulièrement importante car elle montre que la croissance mène au plein-emploi. Par exemple, s’il y a du chômage, le prix du travail baisse. Profitant des faibles salaires, les entrepreneurs peuvent donc remplacer du capital par du travail et donc embaucher, ce qui mène à une diminution du chômage. La croissance assurerait donc naturellement le plein-emploi. Toutefois, ce modèle reposant sur des hypothèses très simplificatrices, cette interprétation est, selon certains, erronée (Bénicourt & Guerrien, 2008).

Bibliographie commentée

Solow, R. M. (1956). A Contribution to the Theory of Economic Growth. The Quarterly Journal of Economics, 70(1), 65-94.

Robert Solow présente dans cet article son modèle de croissance. Il commence par critiquer les hypothèses du modèle auquel il entend s’opposer, celui de Harrod et Domar. Puis il présente son modèle, dans lequel la croissance équilibrée est possible à long-terme. Il développe ensuite trois exemples mathématiques, pour lesquels la fonction de production diffère. Enfin, dans sa conclusion, il montre les limites de son modèle.

Références

Bénicourt, E., & Guerrien, B. (2008). La théorie économique néoclassique. Paris: La Découverte.

Deubel, P., & Montoussé, M. (dir.). (2008). Dictionnaire de sciences économiques & sociales. Rosny-sous-Bois: Bréal.

Guerrien, B., & Gün, O. (2012). Dictionnaire d’analyse économique (4e éd.). Paris: Éd. la Découverte.

Huart, J.-M. (2003). Croissance et développement. Rosny-sous-Bois: Bréal.

Jessua, C., Labrousse, C., & Vitry, D. (dir.). (2001). Dictionnaire des sciences économiques. Paris: Presses universitaires de France.

Webclass – Terminale SES | Un site pour les Sciences Economiques et Sociales au baccalauréat ES. (s. d.). Consulté  à l’adresse http://terminale.ses.webclass.fr/

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