L’économiste du 7e art

Samuel Grandchamp Bachelor à la Faculté des hautes études commerciales (2012). Photographié à New York où il vit actuellement. © Aline Paley
Samuel Grandchamp
Bachelor à la Faculté des hautes études commerciales (2012).
Photographié à New York où il vit actuellement.
© Aline Paley

A l’heure où nous le rencontrons dans un café genevois, Samuel Grandchamp passe quelques jours dans sa ville natale pour réaliser un documentaire sur la musique baroque. «Nous avons suivi un orchestre préparant une tournée sur la Messe en si mineur de Bach.» La musique, il connaît bien. Certificat du Conservatoire en percussions, puis en batterie. Il touche à tout: classique, rock, jazz. Aujourd’hui, il s’adonne à la guitare. «C’est plus discret quand on vit au centre-ville de New York», concède, amusé, l’ancien étudiant en HEC.

C’est cependant une autre forme d’art qui porte désormais Samuel Grandchamp sur le devant de la scène: le cinéma. A 25 ans, le réalisateur a remporté le Léopard d’or du meilleur court-métrage suisse au Festival international de Locarno 2015. Son film, intitulé Le Barrage, relate le road trip d’un père et d’un fils, à la découverte de la Grande – Dixence. L’histoire d’une famille éclatée. Même s’il ne s’agit pas à proprement parler d’une autobiographie, le jeune homme avoue, avec franchise, que le scénario fait écho aux relations parfois compliquées avec son propre père, cinéaste et photographe. Cette œuvre de fiction, une manière de renouer avec la figure paternelle à travers la passion partagée qu’est le cinéma.

Initié très jeune à la culture de l’image, le Genevois réalise le premier de ses quatre courts-métrages en 2009. Caméra au poing, le gymnasien dresse le portrait d’Artamis, haut lieu de la culture alternative alors en perdition. Le documentaire sera plusieurs fois primé. Malgré une maturité en physique et application des maths, Samuel Grandchamp n’embrassera pas la carrière d’astronaute dont il rêvait enfant. «Mon côté analytique vient de mon oncle, physicien de formation, dont je suis très proche.»

Il se lance dans des études en économie politique à l’UNIL. «En première année, c’était la guerre.» A chaque éclat de rire, sa tignasse hirsute virevolte. Il garde un excellent souvenir de son investissement au sein du comité des étudiants HEC. «J’ai adoré ajouter un côté associatif à ma vie estudiantine.» Mais le cinéma n’est jamais bien loin. C’est durant son séjour à Lausanne qu’il achève son second court-métrage, avant de partir terminer son bachelor à Barcelone. Diplôme en poche, il se lance à la conquête de New York, «un rêve de toujours». Il achève actuellement un master en réalisation à la NYU Tisch School of the Arts.

On le questionne sur son parcours atypique. «Si c’était à refaire, je ne changerais rien! HEC m’a permis d’acquérir une capacité entrepreneuriale essentielle dans le monde du cinéma. Réaliser un film, c’est comme créer une start-up.» Les mots sont posés et choisis, toujours. Ils contrastent parfois avec une gestuelle nerveuse.

Cette année, le cinéaste s’est vu décerner la Martin Scorsese Young Filmmakers Scholarship. Un honneur puisque le réalisateur de Taxi Driver et des Affranchis inspire tout particulièrement le jeune artiste. «Ces deux films sont de vrais chefs-d’œuvre, mais esthétiquement, je suis beaucoup plus proche des frères Dardenne. Leurs fictions s’apparentent presque à des documentaires.» Un cinéma réaliste et, surtout, intimiste, cher à Samuel Grandchamp. Son avenir, il l’imagine entre New York et la Suisse. Il prépare actuellement son premier long métrage, l’adaptation d’un livre d’un écrivain genevois.

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